Chroniques

Dream Theater – A Dramatic Turn Of Events

Ça y est, nous y voilà. Dream Theater sort son onzième album, le premier sans Mike Portnoy à la batterie. Entre le battage lié au départ de ce dernier et la prévisible “nouvelle direction”, “A Dramatic Turn Of Events” a ravivé la curiosité des fans du groupe, et les spéculations vont bon train : renouveau ou déception annoncée ?

Avant toute chose, j’aimerais prévenir : ceci est la chronique d’un fan. Mes attentes vont de pair avec l’estime que j’éprouve pour le groupe. Vous pouvez donc vous attendre à une forte dose de subjectivité !

Commençons donc par enfoncer les portes ouvertes. Oui, le départ de Portnoy se fait sentir. Le virage annoncé est bel et bien là, et on assiste à un simili retour aux sources avec un redressement de trajectoire vers le metal progressif. Avec les précédents albums, nous avions droit à un mix plutôt orienté metal (tout court) et à des riffs assez velus (voire même des growls). Pas de danger de croiser un “The Dark Eternal Night” ici ; ce sont clairement les couloirs progressifs qui sont privilégiés, dans l’esprit -plus soft- du DT des années 90. Inutile de citer un opus précis, “ADTOE” pioche un peu des éléments dans toutes les époques du groupe.

Les compositions ne se privent pas pour autant d’un certain mordant et on n’a pas non plus affaire à un album “allégé”. “Build Me Up, Break Me Down”, par exemple, se la joue franchement neo metal et laisse un arrière-goût de Linkin Park à plusieurs niveaux. Le résultat est sympathique mais sans plus. Globalement, le disque offre pas mal de variété, avec du progressif “pur jus”, des sonorités metal, des ballades… et, il faut bien le dire, une qualité de composition quelque peu erratique. Arrêtons-nous d’ailleurs un instant sur les paroles. Loin de moi l’idée de demander un Scenes From A Memoryà chaque nouvel opus, mais écrire au sujet d’anges, de démons et d’agneaux sacrificiels me paraît être un choix de facilité. Surtout de la part du porte-étendard du metal progressif. Ce n’est toutefois pas rédhibitoire, fermons donc la parenthèse. D’autant plus que ce “défaut” ne concerne pas toutes les pistes, et que l’album n’en comporte pas moins de très bons morceaux/passages. “Bridges In The Sky, avec son soupçon d’originalité, “Breaking All Illusions”, où chaque instrument dispose de l’espace nécessaire pour s’exprimer, et Beneath The Surface, où LaBrie est tout simplement excellent, méritent par exemple d’être cités.

Concernant l’exécution, aucun suspense, tous les membres de Dream Theater affichent une technique irréprochable. LaBrie, dans un exercice plus polyvalent que sur les précédents albums, saisit ici l’opportunité de nous montrer tous ses talents. Petrucci, fidèle à lui-même, nous gratifie de quelques solos reflétant sa maîtrise sans limite de l’instrument. Myung bénéficie du recadrage stylistique et sa basse gagne un peu de liberté par rapport à la guitare de Petrucci. De même pour Rudess qui gagne en présence sur l’ensemble du disque et ressort son piano du placard. Enfin, un seul membre (me ?) déçoit. Malheureusement, il s’agit bien du nouveau batteur, Mike Mangini. Si la technique est limpide et qu’il s’acquitte parfaitement des tâches confiées par le groupe (ou plutôt par John Petrucci), la comparaison avec Portnoy n’est pas flatteuse. Le “coup de baguette” du nouveau venu est tout simplement sans saveur, aseptisé. Quand on a en tête l’énergie, voire parfois la rage que Mike Portnoy parvient à insuffler à chaque percussion, on ne peut que se dire qu’en termes d’individualité, on a perdu. Bien sûr, il ne s’agit sur “ADTOE” que d’un exercice imposé, et il reste à voir ce que Mangini fera lorsqu’il aura son mot à dire durant la composition du prochain album.

A mon sens, “A Dramatic Turn Of Events” est à la fois le renouveau attendu et une légère déception. Il est porteur de renouveau car il affirme la volonté du groupe de changer de direction et de retourner vers ses origines progressives. Néanmoins, une somme de détails non négligeable en fait également une déception : l’album est irrégulier, ne se montre que peu aventureux (rien n’est neuf, tout ou presque a déjà été entendu sur un disque passé) et surtout, il ne s’envole jamais à un niveau d’intensité exceptionnel, où la musique vous prend aux tripes. Certes, il prouve qu’il existe une vie après Portnoy, mais où est le “Octavarium” ou le The Count Of Tuscany qui porte l’album à bout de bras et le transforme en tout autre chose ? Je ne le vois pas, et c’est bien dommage.

Informations

Label : Roadrunner Records
Date de sortie : 12/09/2011
Site web : www.dreamtheater.net

Notre sélection

  • Bridges In The Sky
  • Breaking All Illusions
  • Beneath The Surface

Note RUL

4/5