Revenir sur le devant de la scène après dix sept ans d’absence, et une petite apparition lors d’un festival il y a trois ans n’est jamais chose facile. C’est pourtant le pari des Suédois de Refused. Leur dernier album, “The Shape Of Punk To Come” est sorti en 1998, juste avant leur séparation. Cette dernière avait été nécessitée par leur besoin de grandir, et de garder leur intégrité quant à leur image d’anarchistes, sans que celle-ci soit entachée par ce que peut impliquer une carrière musicale. Malgré tout, Refused a tenu le pari, le 29 juin dernier, avec son nouvel album “Freedom”.
Forcément, la sortie de cet opus impliquait que les musiciens soient attendus au tournant, tant par les fans que par leurs détracteurs. Malheureusement, ils partaient avec un malus, dû au recours au producteur de pop Shellback sur deux pistes, lequel est notamment en charge de la carrière de Taylor Swift. Fort heureusement, pas de “Blank Space”, ni de “You Belong With Me”, et encore moins de “Love Story” parmi les chansons. Au contraire, la formation continue de dénoncer les travers de la société, plutôt que les ruptures sentimentales. Cependant, si les textes sont toujours là, ils donnent l’impression d’avoir été lissés, et de manquer de hargne. De fait, “Freedom” a ceci de paradoxal qu’il ne semble pas promouvoir la liberté, la création, le côté sauvage ou punk qui faisait l’esprit de Refused par le passé. Au contraire, l’essai donne l’impression d’une peur de prise de risques. Dans l’ensemble, le disque est constitué de bonnes chansons, bien construites, appréciables, mais pas que l’on attendrait d’un groupe comme Refused aujourd’hui. De fait, bien que certaines lignes, notamment de batterie, reprennent d’anciennes formules du combo (“Dawkins Christ” par exemple, qui a la même structure que “New Noise”), il semblerait que les garçons n’aient pas misé sur l’évolution et la prise de risque, couillue et engagée, humainement et musicalement, qui était leur marque de fabrique. Lorsque, auparavant, ils semblaient vouloir toujours sortir des sentiers battus, et toujours expérimenter, repousser les limites, “Freedom” se présente aujourd’hui comme un effort dans la lignée de leurs précédents travaux… datant d’il y a presque vingt ans. Si cela fonctionne toujours, beaucoup de groupes se sont essayés à l’exercice, et cela ne semble plus si innovent, ni rebelle. Nous sommes loin d’un “New Noise” audacieux de l’époque. Pour autant, des chansons telles que “Destroy The Man”, “Dawkins Christ”, mais aussi “Françafrique” ou “War On The Palaces” prouvent le talent musical de la formation, capable de jongler avec les rythmes, alliés à des refrains catchy, soutenus par des riffs tout aussi entraînants.
D’une certaine façon, nous pourrions dire que l’album est une réussite, et a de quoi satisfaire les amateurs du genre, et ne pas trop alimenter les propos des plus médisants. Mais de fait, nous pourrions en attendre plus venant d’un groupe anarcho pop, sans aller jusqu’à crier à l’arnaco pop, bien sûr ! Le tout est de savoir l’apprécier dans la totalité, sans malheureusement le replacer dans la discographie de Refused.
Informations
Label : Epitaph Records
Date de sortie : 29/06/2015
Site web : www.officialrefused.com
Notre sélection
- Dawkins Christ
- Destroy The Man
- Françafrique
Note RUL
4/5