A l’occasion de la sortie de “That’s The Spirit”, nous avons rencontré Jordan Fish, véritable architecte et homme fort du groupe anglais depuis son arrivée dans le groupe en 2012. L’occasion pour lui d’évoquer ce que devient Bring Me The Horizon petit à petit et comment le groupe en est arrivé à ce statut de nouveau poids lourd de la musique alternative.
Salut Jordan ! Moins de dix jours avant la sortie de “That’s The Spirit“, comment te sens-tu ?
Jordan Fish (claviers) : Excité ! Et heureux que l’album n’ait pas encore leaké. Nous nous attendions à parler d’un leak aujourd’hui donc… C’est un miracle ! Mais oui, je suis très excité et impatient que les gens puissent écouter l’album.
On a entendu dire que quelques magasins autour de Paris ont commencé à vendre l’album il y a quelques jours.
J : Oui, il y a deux jours des magasins ont commercialisé l’album. Nous pensions que l’album se trouverait sur internet aujourd’hui. Habituellement, l’album leak une semaine avant sa sortie. Pour le moment ce n’est pas le cas. Mais le mec a vendu treize albums, je suis très heureux qu’aucun des clients ne l’ait mis sur Internet.
Tu as parlé avec un des acheteurs.
J : Oui en effet j’ai parlé avec l’un des clients. Il est journaliste pour un site internet donc je lui ai dit “écris dessus, mais ne le mets pas sur Internet s’il te plait”.
Si ça nous arrivait, on garderait le CD précieusement pour nous !
J : Moi aussi mec, mais tout le monde n’est pas aussi bien intentionné malheureusement.
Il est donc évident que “That’s The Spirit” suscite une attente encore plus grande que celle entourant “Sempiternal“. Comment expliques-tu ce phénomène ?
J : Je pense que “Sempiternal” a justement joué un grand rôle. Cet album était bien plus mélodique. Nous avons fait énormément de tournées pour défendre cet album et nos concerts étaient vraiment bons donc je pense que ça aide. Mais bon, qui sait ? Je pense que c’est quelque chose de progressif. Nous n’avions pas réalisé à quel point les gens attendaient cet album.
Pourtant la stratégie très offensive de votre label prouve que vous avez changé de dimension.
J : Oui c’est vrai que nous avons vu que le label avait mis plus de moyen qu’habituellement dans la promo. Nous ne voyons pas l’argent, mais on voit comment elle est investie. Je pense qu’il y a plus d’attentes derrière nous car justement, le dernier album a bien mieux marché que ce qui était attendu. Donc, c’est évident que le label cherche à faire encore mieux avec cet album.
En France nous parlons de votre album depuis quelques mois désormais. Nous avons eu la chance d’entendre quelques chansons au début de l’été et c’est à partir de cet événement inédit que nous avons pu constater que votre label comptait sur vous. Pour parler d’autre chose, votre concert à Reading était lui aussi très attendu. Et c’est comme si dès la fin de votre show tout le monde était conquis et convaincu de votre grandeur. Comment avez-vous préparé ce concert ?
J : C’était assez flippant car nous n’avions pas joué sur scène depuis neuf mois. Nous avons beaucoup répété et nous avons joué deux shows de préparation. Un à Liverpool près de là où le groupe vient et un à Oxford, près de là où je viens. Mais nous avons juste essayé de donner un concert à la hauteur. C’était étrange car nous n’avions pas joué de l’année, puis on se retrouve à ouvrir pour Metallica au Reading Festival. C’était fou. Je me suis arrêté avant le concert et je me suis dis “wow, mais qu’est ce qui nous arrive ?!”. Habituellement, on se retrouve sur la route juste avant l’été et ses festivals. Mais cette fois-ci nous avons pris notre temps pour concocter un spectacle spécialement pour l’occasion. Je pense que tout s’est bien passé du coup, je suis hyper excité à l’idée de jouer en festival encore !
Il y avait beaucoup de vidéos et d’effets visuels à Reading. Est-ce une formule que vous allez reproduire sur la route ?
J : Non, ce show était spécialement préparé pour Reading. Mais nous avons un set différent pour nos prochaines tournées. Quelque chose d’hyper cool que nous n’avions jamais expérimenté avant. Nous allons avoir pas mal d’effets visuels grâce à un système de LED sur la scène. Ce n’est pas encore tout à fait fini, mais ce sera hyper cool. Nous avons maintenant l’habitude d’utiliser du CO2, des confettis et un grand backdrop. Mais nous avons eu cette idée assez folle et je suis sur que ce sera génial. C’est sûrement le spectacle qui m’a le plus excité depuis que je suis dans le groupe. C’est juste chiant que nous ne venions pas tout de suite en France avec.
Bring Me The Horizon était assez critiqué pour les prestations live avant ton arrivée dans le groupe. Mais maintenant vous êtes une valeur sûre tant sur CD que sur scène. Avez-vous particulièrement travaillé cet aspect du groupe ?
J : On est toujours très critiqué. On ne peut pas être aimé de tout le monde. Je pense d’ailleurs que beaucoup de gens nous détestent, mais je m’en fous pas mal. Je pense même que c’est une bonne chose. Le fait que des gens nous aiment ou nous détestent fait que nous sommes un plus grand groupe. C’est la seule raison pour laquelle nous sommes plus gros, c’est parce que les gens nous considèrent. La pire chose qui puisse arriver à un groupe c’est qu’on les ignore, qu’on ne pense rien d’eux. Je veux dire, même Metallica a plein de gens qui les détestent mais… ils sont Metallica !
Parlons plus précisément de l’album désormais. Finalement, même si certaines chansons sont surprenantes, il est la suite logique du virage prit sur “Sempiternal”. Avec plus de confiance en vous, non ?
J : C’est exactement ça. C’est notre ressenti également. Quand nous avons commencé à écrire cet album nous étions très confiants. Et nous avons essayé de le traduire dans notre musique. Nous avons énormément travaillé les guitares et les voix surtout. On ne voulait pas se cacher derrières des superflus. Je pense que tu dois faire en sorte d’oublier ce que les gens pourront penser. Nous sommes conscients que, à l’image de nos concerts, beaucoup de gens penseront que c’est un album de merde. C’est la vie ! Mais il était hors de question de faire le même album que le dernier. Du coup, nous avons travaillé juste en écoutant ce qui nous excitait. C’est une dernière chose dans lesquelles tu peux avoir confiance aujourd’hui : ce que tu aimes, ce que tu ressens et ce qui t’inspire pour écrire de la musique.
“Happy Song”, “Throne” et “True Friends” sont les trois chansons que vous avez choisi de révéler en premier et sont les chansons qui ressemblent le plus à ce que vous faisiez sur “Sempiternal”. Etait-ce un choix pour ne pas décontenancer vos fans ou pour préserver la surprise du reste de l’album ?
J : C’est compliqué quand tu écoutes l’album dans son intégralité de choisir une chanson qui le représente entièrement. Par exemple, si tu écoutes juste “Throne”, tu vas pouvoir penser que ça sonne un peu comme du Linkin Park et pourtant, le reste ne l’album ne sonne pas comme du Linkin Park. “Happy Song” ressemblerait à ce que BMTH a l’habitude de faire, mais dans l’ensemble de l’album, elle ressort comme une chanson particulière. Du coup, c’est compliqué de choisir un single, mais logique que nous choisissions de révéler ce que les gens attendent le plus de nous. “Avalanche” aurait pu être révélée dans les premières aussi. Mais pour être honnête, je suis surtout impatient que les gens puissent entendre l’album dans son intégralité.
En effet, mais cependant, on a vraiment envie de savoir qui est arrivé en studio et a dit “Okay les gars, nous allons mettre du saxophone sur “Oh No” !”.
J : (rires) C’était Oli ! Nous voulions tous que cette chanson sonne un peu old school. On pensait à mettre une section de cuivres ou un truc du genre. Mais Oli a proposé l’idée du saxophone et… ça s’est avéré très cool ! C’est un de ces trucs qui arrive en studio. Au départ tu es un peu hésitant puis au final, on a tous adoré le rendu et hop c’était dans la boite ! On s’en fout en fait. On est déjà parti si loin que… fuck it!
Envisagez-vous de la jouer sur scène ?
J : (rires) Oh oui j’espère ! Je ne sais pas jouer de saxophone mais…. oui je pense que nous allons finir par la jouer sur scène donc… merde, il va falloir trouver quelqu’un qui sache jouer du saxophone !
Selon nous, le fait que vous produisiez vous-même l’album envoie deux messages : tout d’abord que vous êtes très fiers de cette évolution et surtout, que vous insistez que “That’s The Spirit” est la chose la plus représentative de Bring Me The Horizon aujourd’hui.
J : C’est ça. Honnêtement ce n’étaient pas les raisons pour lesquelles nous avons décidé de le produire. Nous savions tous la direction que nous voulions emprunter avec cet album et notre mentalité nous poussait à le faire nous même. Mais il n’empêche que je suis tout à fait d’accord avec ce que tu dis, merci pour cette analyse ! (rires)
Avais-tu peur de produire cet album toi-même ?
J : Je dirais plus que je ressentais de la pression plus que de la peur. J’étais confiant sur le fait que nous pouvions le faire sans souci. L’album sonnait très bien avant même que nous allions en studio du coup j’étais rassuré. Pour être tout à fait juste, nous avons presque produit “Sempiternal” aussi. Je venais tout juste de rejoindre le groupe, du coup c’était compliqué pour moi de tout prendre en main, mais j’ai été impliqué dans l’enregistrement et même lorsque du mixage de l’album, j’étais constamment avec l’ingénieur du son. Du coup, c’était naturel pour moi de produire “That’s The Spirit”.
A l’exception de “Doomed”, qui est notre chanson favorite de l’album, toutes les autres sont très positives et lumineuses. Donc l’idée c’est ça, accepter la dépression et en faire quelque chose de beau ?
J : Oui c’est l’idée en effet. C’est vraiment l’idée que nous avons cherché à transcrire au travers de l’album, de la musique et des paroles. Mais je ne pense pas que l’idée soit d’accepter la dépression. Il s’agit surtout d’adopter un point de vue positif face aux choses. Je veux dire, on est tous dans le même bateau. Mais je pense qu’il y a plusieurs manières d’interpréter ce message. Mais personnellement, cet album est moins agressif et colérique que “Sempiternal”, mais beaucoup plus positive et euphorique.
Penses-tu que c’est l’âge qui permet d’adopter un point de vue positif sur les choses quand ton esprit te joue des tours ?
J : Je pense tout simplement que nous sommes heureux dans nos vies et que nous retranscrivons à travers de notre musique. On est heureux et stables, posés. La vie est vraiment belle pour nous et c’est pourquoi, je pense, notre musique est bien plus positive. Nous allons juste bien.
Êtes-vous conscients qu’une chanson comme “Happy Song” peut aider de nombreuses personnes grâce à ses paroles ? Est-ce que vous cherchez à aider les gens à travers votre musique ?
J : Je pense qu’il y a une limite à ne pas franchir entre utiliser nos ressentis pour toucher notre public et écrire une chanson à propos de quelque chose dans le simple but de vendre ton produit car tu sais que des kids vont s’identifier à ça. Nous n’écrivons pas notre musique de manière cynique. Il ne s’agit pas d’écrire une chanson sur quelque chose dont tu n’as aucune idée mais tu sais que des milliers de fans vont être touchés par ton discours. Oli n’écrit pas du tout ses chansons dans cet état d’esprit. Il écrit ce qu’il a besoin de sortir de lui, sur les problèmes qu’il veut régler et ensuite, il se dit que, peut-être, certains pourraient être aidés par ses paroles. Mais nous ne voulons pas être trop moralisateurs.
“Drown” a été un grand tournant dans votre carrière. On la voit comme le “Chelsea Smile” de vos nouveaux fans.
J : Ouais c’est un peu l’idée ! On a l’impression que cette chanson est un peu considérée comme un classique maintenant. Je pense que c’est une bonne chanson et qu’en plus, elle marque un changement de style drastique pour BMTH. C’est marrant parce que oui c’est vraiment ça, elle est considérée comme un classique alors que ça fait moins d’un an qu’on l’a sorti ! Nous avons choisi de la mettre sur l’album car la musique et le message étaient en parfaite harmonie avec le reste des chansons.
Désormais, vous ne faites plus du tout parti de la scène metalcore. On pense pouvoir avancer qu’on ne vous verra plus au Vans Warped Tour.
J : En effet, il y a peu de chances qu’on y soit. On y jouera peut-être un ou deux concerts mais cette tournée ne nous correspond plus. C’est une immense tournée avec un style de groupe particulier dans lequel nous ne nous reconnaissons plus. L’idée est d’être nous même en fait. Nous ne voulons pas être un groupe faisant parti d’une scène. Bring Me The Horizon est juste un groupe de rock maintenant.
Votre nouvelle et grandissante notoriété vous apportera forcément des gens qui ne vous aiment pas. Mais qu’est-ce qui t’effraies le plus ? Les gens qui ne t’aimes pas ou la célébrité ?
J : Je ne sais pas. Je ne crois pas me soucier du fait d’être haïs. Je veux dire, si un groupe était soucieux d’être détesté, ce serait compliqué pour eux de sortir un album. Et concernant la célébrité, je ne suis pas quelqu’un de célèbre personnellement donc ça ne change rien pour moi. Mais en tant que groupe je ne sais pas. En fait, on ne veut pas être célèbre. On veut juste être les meilleurs. Quand nous avons écrit cet album, nous voulions donner le meilleur de nous-mêmes et avoir ce sentiment qu’on a tout donné. C’est la même chose avec les concerts d’ailleurs. Nous ne faisons pas ça pour se faire plus d’argent car, à cette échelle nous ne voyons pas la différence. Ce n’est pas mille albums supplémentaires vendus qui vont changer nos vies. Je m’en fous d’être riche, je veux juste être fier de moi.
Quelles sont les prochaines étapes pour Bring Me The Horizon et qu’est-ce qui peut vous empêcher de devenir le plus gros groupe au monde ?
J : Rien. Je pense que n’importe quel groupe peut devenir énorme s’il travaille assez et s’implique. Concernant les prochaines étapes, il y a la sortie de l’album déjà. Puis ensuite partir sur les routes, pendant deux ans je pense. Et ensuite, qui sait ?
Dernière question, notre site s’appelle “RockUrLife” alors, qu’est ce qui rock ta life ?
J : “East Side Burgers” rock ma life ! Parmi les meilleurs burgers que j’ai pu manger, ils sont excellents !
Site web : bmthofficial.com