Plus d’un mois avant la sortie de leur nouvel album “Dream Theater”, RUL en a profité pour rencontrer James LaBrie, l’illustre frontman de Dream Theater, histoire d’en savoir un peu plus sur leur nouvel opus, qui sortira le 23 septembre via Roadrunner Records.
Hello James, comment vas-tu ?
James LaBrie (chant) : Je vais bien, tout va très bien.
Votre nouvel album va sortir le mois prochain. Comment te sens-tu avant la sortie d’un nouvel opus ?
J : Je me sens très bien, en forme, confiant. C’est comme si tout était exactement à sa propre place. Nous avons réalisé un album que nous sentions être classique chez Dream Theater et je pense que celui-ci montre que nous sommes toujours alertes et enthousiastes. Le groupe est très déterminé ces derniers temps, ce qui est, à mon sens, identifiable avec “A Dramatic Turn Of Events”, une toute nouvelle vibe qui ressort du groupe. Pour cet album, nous sommes extrêmement impatients, nous sentons que ces nouvelles compositions vont, une nouvelle fois, montrer que nous avons significativement muri en tant que groupe et je pense que cela va être une superbe sortie. Je pense qu’il sera bien accueilli par les fans et en faisant référence à du classique Dream Theater, avec tous ces éléments avec lesquels nous avons grandi au fil des années, que vous allez adorer la suite, dans une dimension plus grande encore.
La première chose qui surprend est le titre. Pourquoi avoir attendu si longtemps pour sortir l’album éponyme “Dream Theater” ?
J : Je pense que beaucoup d’éléments sont entrés en jeu. C’est une combinaison de choses qui touchent à l’état dans lequel nous sommes, actuellement, dans nos carrières, qui nous a emmené à cela. De plus, si tu reviens aux trois années qui viennent de s’écouler, les modifications qui ont eu lieu autour du groupe, la transition de laquelle nous sortons, le procès ; parce que tu vois, j’imagine qu’à la base, le changement d’un des membres du groupe et l’idée que nous étions en train de travailler sur un nouvel album, nous étions conscients que les fans à travers le monde entier étaient impatients mais en même temps, nous savions qu’il y aurait eu du scepticisme dans l’air et de la controverse avec “ça va être le même groupe qu’on connait depuis vingt ans, tout ayant un peu changé, que nous allons écouter un album autour duquel nous ne pourrons pas partager”. Je pense donc qu’avec “A Dramatic Turn Of Events”, nous avons prouvé que “oui nous sommes le même groupe et nous allons continuer ce mouvement musical que nous avons créé et que nous continuerons à créer” mais en même temps, nous sommes dans une nouvelle phase, avec une fraicheur nouvelle. A partir du moment où nous sommes passés par là et puis, la tournée mondiale a prouvé que “tu sais quoi ? Nous allons sur scène, visionnant l’énergie qui s’y trouve, observant la relation et l’interaction avec le public ” tout était à sa place; donc une fois que tout cela fut fait, cet album nous permet d’être qui nous sommes vraiment et ce que nous ressentons maintenant décrira de la meilleure façon ce groupe. D’ailleurs, bien avant même la phase de composition, nous nous sommes dits “si tu repenses à tout ce qui nous a mené à ce moment précis, cela prendrait tout son sens et une parfaite opportunité d’avancer au travers d’un album éponyme” car c’est une annonce audacieuse musicalement et je veux suivre cette écoute. Nous pensons vraiment que cela va retenir votre attention et qu’il aura quelque chose à exprimer que vous n’avez sans doute pas encore écouté ; puis c’est comme je l’ai dit précédemment, c’est du classique Dream Theater.
Après plusieurs longues écoutes, la première impression était cette fraicheur que dégage le son, en général, comme si c’était votre premier album. Comment pourrais-tu justifier ce ressenti ?
J : Nous y voilà, merci ! Je pense que cela résulte du fait de l’arrivée de Richard Chycki, notre ingénieur, qui a également mixé l’album, un vieux pote à moi. Nous étions tous les deux dans un groupe dans les années 80, Winter Rose; simplement la façon qu’il a d’approcher l’enregistrement, il arrive en studio, prépare tout et nous y voilà, prêt à commencer. Je veux dire, c’est une chose d’aller en studio, jouer ses parties et faire une bonne démo, mais au fond, tu sais que tu veux y aller et que tout le monde doit être prêt et parfaitement calé pour l’album. Il avait tout prévu, il disait “les gars, si vous sentez que ce que vous avez accompli en une prise a capturé tout ce que vous vouliez, alors c’est bon” car tout était prêt pour enregistrer en mode album, ce qui a sans doute changé quelque chose et il y a également eu beaucoup de spontanéité et tout cela fut enregistré. Si tu écoutes les parties de batterie de Mike Mangini, une grande partie fut prise en une fois; “Que pensez-vous de ça (imitant une batterie)” et nous étions “quoi ? c’est parfait !”. En amenant ça, cela fut différent pour nous, pour l’enregistrer, plus brut et plus naturel; je suis connecté à ce moment et si je sens qu’il est capté comme il faut, alors cela suffira amplement pour le résultat final. Je suis vraiment décidé lors de ces enregistrements; parfois nous aimons, plus ou moins, être isolé et dirigé uniquement sur ce que nous faisons. Je suis allé au studio uniquement avec Rich’ et personne d’autre. J’aime être seul, laisse-moi faire mon truc et lorsque j’aurais fini, John Petrucci arrive, en tant que producteur, ce qui est très important. S’il a des remarques comme “tu sais, je pensais que tu allais faire comme ça, je veux entendre cette facette de ta voix parce qu’elle est cool” donc ensuite il y a des modifications à faire mais très minimes. Tout s’est emboité parfaitement avec les parties de Jordan, John idem, Mike et son immense kit; l’imminence était cool, cette interaction et cette énergie donc je pense que s’est parfaitement déroulé jusqu’au résultat final.
Lors de nombreuses interviews, John a dit que le son était plus cinématique. En effet, beaucoup de séquences ressemblent à des bandes originales de films
J : Absolument.
A l’image de “Behind The Veil”, as-tu eu le même ressenti lorsque tu as écouté les compositions ?
J : Si tu veux parler des éléments cinématiques, “False Awakening”, le premier morceau est cinématique. C’est une B.O. et si tu entres dans la sphère telle que “Illumination Theory”, c’est très cinématique et symphonique. C’est vraiment comme “oh mec, je suis dans un film, parcourant l’histoire qui se déroule devant moi”. Cependant nous en avions parlé depuis un moment comme quoi “nous devons créer notre titre-B.O.” et cela nous renvoie sur scène. Pour débuter la prochaine tournée mondiale “False Awakening” sera la parfaite introduction; en la lançant, le public se dira que quelque chose est sur le point d’arriver puis c’est à cet instant que nous monterons sur scène pour jouer notre set.
De plus, la musique est bien plus technique (même si elle l’est toujours), un peu à l’image de l’album “Awake”, qu’en penses-tu ?
J : Ah oui, en effet. Je pense que c’est plus brut encore. De plus avec la lourdeur, je pense que cela mène à cette énergie pure qui provient de ta connexion avec les instruments ou le moment de création. Et beaucoup de cela s’est passé lors de l’album “Awake”. Quelque chose de très dynamique et technique, absolument. Mais beaucoup d’attention et de concentration furent nécessaires sur celles-ci, la façon dont elles sont construites et retouchées, sonnant donc de façon spéciales. Nous ne voulions pas souffrir ou être superflue; donc je pense qu’avec cette attention particulière, cela rend le côté brut qu’avait “Awake”.
Qu’est ce qui t’a inspiré pour l’écriture ? N’est-il pas difficile d’innover étape après étape ? Sachant que tu as également sorti un nouvel album solo.
J : Voilà qui est marrant. En fait, je n’ai rien écrit pour cet album. Je me suis mis en retrait. Parce que je finissais mon album solo. Lorsque est arrivée l’étape des paroles, j’ai juste dit à John et aux autres “vous savez quoi, je vais me mettre en retrait, je m’impliquerais sur le prochain album, mais à cet instant, j’ai écrit tant de mots pour mon album solo que je vais faire machine arrière ici“. J’ai tout écrit pour “Impermanent Resonance”, Matt (Guillory) et moi-même nous sommes partagés la tache mais j’ai senti que je m’étais bien assez exprimé et tout le monde était cool. Ils voulaient que j’écrive quand même comme John “allez mec, tu dois en écrire quelques-unes“ et je lui disais qu’il ferait mieux de s’y atteler. Puis John Myung a écrit “Surrender To Reason” mais je ne pourrais te détailler le contenu si tu voulais. Je n’aurais peut-être pas du dire ça ? (rires) Je chante les mots. (rires) “Enemy Inside” évoque le stress post-traumatique, comment les gens font face à ces horribles événements de leurs vies ou ce qui les ont vraiment choqué en tant qu’être humain, ce qui les ont vraiment scotché, le monde est dans un état… Ces gens qui reviennent de la guerre, de conflits, ils sont totalement transformés en tant qu’individu et ne pourront plus capter l’innocence qu’ils avaient. “The Bigger Picture” reflète assez bien le processus de l’album; maintenant l’équilibre, être capable de trouver ton chemin dans ce labyrinthe et de voir que tout est fait pour atteindre proprement ton but. En fait, c’est de réaliser que tout, et chaque étape a un but mais qu’il faut rester du bon côté des choses afin de réaliser ton objectif. “Along For The Ride” traite de toutes ces choses que l’on voit dans le monde, particulièrement ces jours-ci, tant de choses hors de notre contrôle, nous ne pouvons pas tout contrôler mais ce que nous pouvons, c’est d’essayer d’envoyer un exemple afin de créer un meilleur monde. Cela pourrait se propager et s’étendre mais peu importe ce que nous faisons ou qui nous sommes, nous sommes tous sur cette planète et nous voulons tous le Bien. “Illumination Theory” traite de cela dans le but de réaliser les magnifiques choses de la vie et toutes ces choses qui nous permettent d’atteindre un stade d’euphorie ou de extase; l’unique façon que nous avons d’atteindre cette reconnaissance et réflexion passera par la difficulté, via la douleur. C’est une dynamique, une dichotomie qui existe dans le but de nous faire ressentir ce que nous avons besoin de ressentir. “Behind The Veil” est sur la maladie dans le monde, la façon qu’ont les gens d’être de véritables monstres, si diaboliques, si insensibles et sans cœur, simplement noirs. John s’est inspiré, je ne sais pas si tu as vu ces évènements, de ces jeunes filles qui ont été retenues par trois frères durant dix ans… Que leur est-il arrivé ? Qu’est ce qui leur a donné la foi de penser que “le chemin est long et sombre mais je vois une lueur au bout, donc je vais rester et je vais exister et persévérer et m’en sortir“; cela traite également des bas-fonds de l’humanité. Mon Dieu… John Myung traita de ce type de thème, l’adversité et le fait que l’unique solution que tu as de t’en sortir et de passer via ces étapes et de rester fort.
Comme tout album de Dream Theater, il y a un morceau de vingt minutes et celui-ci est décomposé en cinq sous parties. La première est dans notre langue, en français, “Paradoxe De La Lumière Noire”; qui a eu l’idée et pourquoi ?
J : Ah ! Nous étions certains que vous alliez demander cela ! John pensait juste que cela sonnait mieux. C’est quelque chose que la langue française exprime mieux que l’anglais. C’était très marrant la façon dont il m’a présenté l’idée “donc qu’en penses-tu ?” moi ”oh, c’est cool, donc comment cela les relient-ils ?” ”Je ne suis pas sûre, il faut que je vois ce que cela veut dire.” (rires) De toute façon, cela sonnait bien mieux en français, la traduction française était beaucoup plus musicale.
Mis à part le nouvel album, il y aura également un nouveau DVD avec “Live At Luna Park”. Est-ce une façon de marquer l’histoire du groupe, avec ce nouveau line up et l’arrivée de Mike Mangini ?
J : En plein dans le mille ! Absolument, c’est exactement pour cela. Nous sentions qu’il y avait un truc dans l’air avec le groupe, cette énergie, cet esprit qui résidaient au fil des évènements récents. Nous serions incapables de capter à nouveau cet instant particulier de notre carrière donc on s’est dit qu’il fallait le documenter et quelle meilleure façon qu’un incroyable DVD ? Il y a donc les deux soirs, filmés à Buenos Aires et il y a presque cinq heures et demie, rien qu’en termes de concert. La combinaison de toutes les chansons jouées lors du premier set ainsi que toutes celles non jouées le premier soir, qui ont été jouées le second soir. De plus, il y a un documentaire entourant toute cette expérience en Amérique du Sud, l’envers du décor, la préparation et la production qui entourent quelque chose comme ça, le nombre de personnes travaillant pour ça, c’est incroyable, les commentaires sont inutiles tant il y a du travail. Il y a également beaucoup de choses marrantes, l’adaptation de Mike, son arrivée et l’ampleur qu’il a pris, l’homme génial qu’il est avec une grande personnalité, plus d’humour mais également un batteur phénoménal. Lorsque tu vois le DVD et les séquences de Mike, tu te dis juste “Oh. Mon. Dieu“ il est incroyable. De plus, je ne sais pas si tu es au courant, mais tout cela sera projeté dans les salles de cinéma le 19 septembre, à travers le monde entier.
En effet et justement, pourquoi le diffuser au cinéma ? Comme beaucoup de groupes qui ont utilisé ce procédé.
J : Eagle Rock (Entertainment) qui va sortir notre DVD sont ultra fans du groupe et ils disaient “les mecs, on doit vraiment projeter ça sur grand écran ! Votre groupe, la façon dont vous vous produisez sur scène et toute la musique autour, c’est magnifique, vraiment“. Ils disaient “quel meilleur environnement que les salles obscures, avec un son surround etc. ça va être ahurissant, nous devons le faire“ et nous étions du genre “ok, faisons-le, on est partant“.
Quels sont les derniers groupes que tu as écouté ces derniers temps ?
J : Beaucoup de groupes ! Récemment je discutais avec Myles Kennedy, d’Alter Bridge, on faisait du troc “eh mec qu’est-ce que t’écoutes en ce moment ?“. Hier il m’a parlé de ce type, Allen Stone, venant de la côte ouest, vers Seattle, dans l’état de Washington; et c’est vraiment cool. Il a une voix soul mais avec une incroyable palette vocale, c’est du style pop jazz rock avec beaucoup d’éléments bluesy. De plus, avec Myles, nous sommes tous les deux d’immense fans de Jeff Buckley donc c’était sympa d’en discuter également. Autrement, je dirais : Switchfoot, Two Door Cinema Club, Mutemath, Young The Giant, I See Stars, Bring Me The Horizon, Sleeping With Silence, August Burns Red, qui d’autres ? Et bien Muse, toujours, “The 2nd Law” est un superbe album, le dernier Deftones, “Koi No Yokan”; des groupes que j’écoute actuellement, ce sont les premiers qui me viennent à l’esprit.
Si tu devais choisir trois titres qui décrivent le mieux le nouvel album, lesquels et pourquoi ?
J : Je dois en citer trois ? Oui parce que c’est marrant que tu dises cela car je disais dans d’autres interviews que s’il y avait quelqu’un qui ne connaissait pas Dream Theater et que je devais répondre à la question “quel album lui conseillerais-tu ?“ je dirais celui-ci parce qu’il englobe vraiment ce qu’est Dream Theater, tout y est. Autrement, les trois premiers titres qui me touchent particulièrement : “The Bigger Picture” la façon dont elle se révèle et la façon que j’ai de chanter celle-ci, tout en émotion, “Illumination Theory” encore une fois, ayant tout ce que peut proposer Dream Theater, sa construction, son énergie, les dynamiques, la progression, les éléments hard rock, les éléments plus atmosphériques et symphoniques. Ce titre est parfait pour ça et spécialement sa fin qui est majestueuse et émotionnelle. Puis enfin “Behind The Veil”, je pense qu’elle est sublime, des gros refrains, de sublimes mélodies. Voici donc mes trois, je suppose.
Un mot à propos des instrumentales ?
J : Oh “Enigma Machine”, tu vois, nous étions en train d’en discuter, ça faisait un moment qu’il n’y avait plus d’instrumentale et nous nous sommes dit qu’il était temps. Nous étions dans une phase où nous n’avions plus rien à prouver à quiconque mis à part faire ce que nous aimons vraiment faire et c’est un des plus grands éléments de Dream Theater, d’aller à l’aventure, dans l’inconnu et d’expérimenter. J’ai toujours été un grand fan de Rush. A chaque fois qu’il sortait un album et qu’une instrumentale était prévue, j’étais tellement excité “YEAHHHH”. Ce titre démontre bien la cohésion et l’esprit du groupe actuel, en plus d’être un excellent titre.
Un petit message pour vos fans français ?
J : Ouais, à chaque fois qu’on vient ici, c’est phénoménal. Nous voulons continuer cette relation, nous ne sommes pas prêts d’arrêter, nous nous épanouissons encore beaucoup et c’est pourquoi nous avons encore tant de choses à partager musicalement. Donc nous sommes impatients de revenir ici et d’échanger avec nos fans.
Finalement, nous sommes “RockUrLife”, donc en guise de conclusion, qu’est ce qui rock ta life James ?
J : Qu’est ce qui rock ma life… Mon Dieu je ne sais pas. (rires) La vie ! La vie rocks ma life, juste le mystère de celle-ci et tout l’inattendu qui réside autour, le fait que je puisse apprendre jusqu’au point où j’estime être ok et la vie tout simplement. Je suis, chaque jour, surpris car je pense “oh je ne pensais pas cela ou je ne m’attendais pas à ceci“ ; donc je pense que l’inattendu de la vie me rock totalement.
C’est dans la boite
J : Merci !
Ndlr : Après avoir rapidement discuter avec James LaBrie, ce dernier nous a confié que la prochaine tournée européenne serait “An Evening With Dream Theater”, à savoir un set de trois heures de concert ! N’attendez donc pas pour acheter vos places pour leur concert exceptionnel, vendredi 31 janvier 2014, au Zénith De Paris !
Site web : dreamtheater.net