Débutons cette année 2014 en compagnie de Klaus Meine, que RUL a eu l’honneur de rencontrer, le mois dernier, à Paris, afin de parler de leur dernière sortie -très réussie- leur “MTV Unplugged”, enregistré à Athènes.
Bonjour Klaus, comment vas-tu ?
Klaus Meine (chant) : Je vais bien, merci.
Vous venez de sortir “Scorpions – MTV Unplugged : Live in Athens” en Europe, mais pas encore en Amérique du Nord, tout d’abord, satisfait du résultat ?
K : Oui énormément; ce projet est arrivé de façon inattendue en tout début d’année, l’offre pour faire un “MTV Unplugged”, nous en avions parlé dans les années 80, cependant nous étions fin prêts maintenant. C’est un honneur, même si MTV n’est plus ce qu’il était auparavant, la marque “MTV Unplugged” est très forte et de qualité; donc c’était un grand privilège de pouvoir faire partie de cette grande famille d’artistes, par conséquent, il fallait rendre l’événement spécial et c’est ce que nous avons essayé de faire.
Vous aviez eu l’opportunité par le passé, du coup pourquoi avoir attendu si longtemps ?
K : Nous n’avons pas tant attendu que cela, à vrai dire tout n’était pas parfait dans les 80’s, de plus ce format était très jeune, très récent et nous étions en train de parcourir le monde entier. Donc cela n’a pas pu se faire et ils ne nous ont jamais redemandé entre temps. Cette offre fut donc une véritable surprise. C’était quelque chose que l’on voulait tous faire, écrire une nouvelle page de notre histoire, c’est fantastique !
Comment et pourquoi avoir choisi Athènes ?
K : Car nous avons beaucoup de die-hard fans en Grèce depuis tant d’années, on pourrait également dire la même chose de la France et de tant d’endroits dans le monde. Or nous étions à la recherche d’un lieu spécial, en plein air avec la garantie de laisser son parapluie chez soi. Lorsque nous avons joué en septembre donc, l’endroit n’avait pas de toit et c’était la première fois, dans l’histoire du “MTV Unplugged”, que cela se déroulait à ciel ouvert, c’était incroyable ! De plus, nous avons joué tant de concerts en Grèce que les fans n’arrêtaient pas de demander “Scorpions, allez, pourquoi vous ne faites jamais de DVD de ces excellents concerts que vous faites par chez nous ?“, l’heure était donc venue de le faire.
Quelles furent les plus grandes difficultés autour de ce set acoustique ? Combien de temps avez-vous travaillé les arrangements ? Car il y a également des violons, claviers, accordéons etc.
K : En premier lieu, nous avons eu une chouette équipe venant de nos producteurs suédois : Martin Hansen et Michael Nord Andersson, accompagnés de deux autres musiciens également. Il y avait donc un ensemble de musiciens et Matthias est allé à Stockholm; on travaillait entre la Suède et Hanovre, donc nous avons fait une liste de chansons, débutant les arrangements puis eux sont revenus et nous avons choisi celles que nous aimions, écartant celles qui nous satisfaisaient pas, il y avait fort à faire avec tout cela puis en parallèle, j’ai essayé de monter un show, une setlist idéale. Ensuite, au lieu d’utiliser un quartet à cordes, on nous a recommandé d’utiliser un octet pour rendre l’ensemble plus riche et plus puissant encore; il y avait tellement d’instruments qu’on les a appelé “L’Armée Des Couteaux Suisses“. Nous cherchions des titres jamais joués en live également, on ne voulait pas axer le set sur nos hits; si cela n’en tenait qu’à nous, nous ne les aurions même pas joué. Nous voulions un set suffisamment puissant pour se passer des classiques. Nous sommes retournés dans les années 70, 80 et nous savions que les grecques aimaient nos tous premiers albums. La part émotionnelle était très importante pour répondre à la question “où va-t-on ?“. Nous savions très bien que ce serait rempli d’émotion en Grèce et c’est ce que tu recherches lorsque tu fais un concert comme ceux-ci, surtout lorsque ce ne sont pas des gros concerts où les guitares hurlent et la scène s’illumine. C’était un concert de deux heures et demi où tu essayes de toucher le public avec la musique seulement, il fallait donc trouver les bons morceaux. Nous avons fait trois sessions à partir de février jusqu’à juin/juillet puis nous avons enregistré un album sans vraiment le faire, juste s’enregistrer pour s’écouter et travailler les nouvelles versions.
Il y avait également quelques invités, comment sont-ils arrivés sur ce “MTV Unplugged” ?
K : A propos des invités; MTV ne demande pas seulement que les artistes soient assis, que l’audience soit assise, mais demande aussi des invités. A vrai dire, pour un show comme celui-là, nous ne voulions pas de guests mais MTV en voulait. Les noms qui nous venaient en tête étaient plus du domaine du hard et du heavy comme Lemmy, Richie Sambora, Slash, Doro etc. mais MTV, à Berlin, nous a donné une liste d’artistes dont, pour la plupart, nous ne connaissions pas l’existence, c’était plus un trip “allez, embarquons des artistes allemands” et finalement, nous avons bien aimé l’idée de s’accompagner de jeunes talents allemands, leur donnant une chance de se produire et de se faire remarquer à l’international.
Quels types d’émotion voulais-tu procurer aux fans ? On a eu la chair de poule sur chaque morceau. Est-ce là la véritable force des sessions acoustiques ? Est-ce la meilleure façon d’exprimer ses sentiments ?
K : Il y a quelque chose dans notre musique qui se partage mieux au travers des versions acoustiques. Avec toutes ces chansons, il y certainement une raison pour “Send Me An Angel”, “Holiday”; jusque-là, nous avons toujours consacré quelques minutes de nos concerts à des versions acoustiques, cela démontre également la qualité de la composition, où tu n’as besoin que d’une guitare et d’une voix. Si tu as une bonne et forte composition, alors elle touchera les gens puissamment, c’est pourquoi je joue “Follow Your Heart” tout seul, sans les autres, sur scène.
Est-ce que James a du se calmer derrière son kit ? Au vue de la différence d’intensité du show et sachant qu’il aime bien, d’habitude, s’exprimer sur scène.
K : Oui James a du se mettre un peu plus en retrait, puis Peter, le claviériste, est un showman et un excellent musicien; ensemble ils ont mis à profit quelques bons trucs; alors que James a pour habitude d’être en mode “rock n’roll forever”, donc c’était un peu différent pour lui de se mettre à cette musique mais ce fut un challenge pour tout le monde, autour du set et les arrangements, on y est tous passé.
Penses-tu que le “MTV Unplugged” dans son ensemble est quelque chose à faire pour tout groupe ayant l’opportunité de le faire ?
K : Je ne sais pas si tous les groupes peuvent le faire, je ne suis pas certain que trente ans auparavant, lorsque que nous en parlions, je ne sais pas si nous étions si bons pour le faire, nous grandissions en tant que musiciens, artistes et je pense qu’il faut de l’expérience et avoir le bon catalogue de chansons pour le faire, les bonnes chansons. Il doit bien y avoir une raison pour laquelle AC/DC ne l’a jamais fait. (rires) Mais nous sommes un groupe mélodique, dans la tradition des groupes comme Queen, par exemple, on y fonce et on apprécie cela.
Il y aura également quelques concerts en Allemagne l’année prochaine, y aura-t-il d’autres shows dans cette configuration ?
K : Des promoteurs allemands sont venus à Athènes et ont vu le show de leur vie et on dit qu’ils allaient amener ce spectacle en Allemagne; nous avons donné notre accord pour quelques dates et bien évidemment, actuellement, un promoteur français est ici aussi et nous discutons d’un concert à Paris peut-être, peut-être plus, je ne sais pas. C’est beaucoup de monde, beaucoup de musiciens, ce n’est pas un concert que tu peux jouer cinq fois dans la semaine, dans des endroits différents à chaque fois. Donc il faut qu’on trouve la meilleure configuration possible et d’avoir la possibilité de jouer ici en France, ça sera super. Nous ne voulons pas reprendre comme avant avec une nouvelle tournée (encore) etc. ce n’est pas l’objectif; si le projet est concluant, il y aura sans doute d’autres dates. Nous savons que nos fans français sont très nombreux et toujours aussi fidèles.
Il y a des shows en Espagne et au Portugal aussi, donc quels sont vos futurs projets ? Un nouvel album avec des chansons jamais dévoilées et ensuite ? Tout le monde se demande si vous allez tourner à nouveau.
K : Nous allons faire quelques shows encore car nous avons remarqué, à la fin de la dernière tournée mondiale, qu’après plus de deux cent concerts, nous n’étions pas allés dans certaines parties du monde. Nous n’avons pas joué en Grande-Bretagne, au Japon, en Espagne depuis longtemps et le concert à Madrid fut complet très rapidement, une seconde date s’est donc ajoutée. Puis nous voulons aller chez les anglais, ça fait un bail alors qu’on a joué plus de quatorze fois en France, donc ils nous disent “en fait vous ne nous aimez plus, c’est bien ça”. Il y a donc quelques pays sur la liste puis nous irons en studio pour terminer les prises que nous avions débuté en 2011.
A propos des concerts en Espagne, la première partie est Steel Panther. Tu en as entendu parler ? Et leur musique ?
K : J’en ai entendu parler oui, même si je ne les connais pas très bien, mais j’en ai bien entendu, ça c’est certain.
Quel est le secret d’une si grande carrière ? As-tu des conseils à donner aux jeunes groupes ?
K : Crois en toi et suis ton cœur; c’est tout ce que je peux dire. Si tu es le jeune chanteur d’un groupe bordelais par exemple et que tu dis “je veux voyager dans le monde entier et jouer ma musique”, les gens vont en rire, c’est ce qu’il nous est arrivé puis nous avons dit que le seul le ciel était la limite. Mon conseil serait : fais juste ton truc et crois en toi, trouve ton ADN artistique et suis tes désirs.
Comme tu le sais, beaucoup de jeunes groupes de rock citent Scorpions comme une majeure influence. Qu’as-tu écouté récemment ? De cette nouvelle génération.
K : Tu ne vas pas me croire mais récemment, j’ai écouté cette jeune artiste française qui se nomme Zaz. Je l’aime beaucoup, certaines de ses chansons sont plutôt cool. Bien évidemment, je ne parle pas français mais j’aime également les artistes de la belle époque comme Edith Piaf, la chaleur de sa musique est magnifique. Zaz a parfois un peu de ça d’ailleurs. Ça serait génial, si nous jouions ici, de dire “mesdames et messieurs, je vous propose d’accueillir Mr Johnny Hallyday” ce serait tellement cool !
Y-a-t-il quelque chose que tu n’as pas accompli dans ta carrière ? Metallica a joué en Antarctique hier, est-ce que ce type de challenge t’intéresse ?
K : Nous avons tous ce rêve fou d’emmener notre musique là où les gens ne penseraient même pas ! Nous avons fait des concerts de la Sibérie à l’Amazonie. Metallica joue en Antarctique, donc nous devrons jouer au Pôle Nord. (rires)
Finalement, nous sommes “RockUrLife”, avec un U et il n’y a pas de lien avec le livre de Rudolf, donc qu’est-ce qui rocks ta life Klaus ?
K : Qu’est ce qui rocks ma life ? Je pense que c’est toujours la musique. Parfois je me remémore, lorsque nous étions enfants, inspirés par les Beatles, les Who, les Rolling Stones, c’était tellement fort, et quand j’y pense cela me prenait intensément, l’inspiration et la passion. Nous savons bien évidemment que la fin est proche. Mais regarde les Stones ! Jagger vient d’avoir soixante-dix ans et je pensais qu’il allait arrêter, et que ce serait alors plus simple pour nous, mais ils ont joué d’énormes concerts à Londres; comment les arrêter ? Nous sommes tous des pionniers et avec ces groupes, Ozzy avec Black Sabbath, jouant des stades plein, ils en profitent et sont heureux; à cet âge, personne ne sait jusqu’à quand nous irons car personne ne s’est encore arrêté. Les Stones sont loin devant, et nous, j’ai soixante-cinq ans maintenant, et au-devant de la scène, je vois des jeunes crier, chanter, pleurer et je me dis “ils viennent nous voir ?“ difficile d’y croire. Mais d’où viennent-ils ces jeunes ? C’est fantastique, c’est magnifique de voir notre musique traverser les générations et de toucher de nouvelles générations.
Site web : the-scorpions.com
