Quand les américains ont annoncé leur reformation exceptionnelle pour une série de concerts destinés à célébrer les dix ans de leur opus “What It Is To Burn”, nous n’osions pas nous faire trop d’espoirs quant à les voir faire un crochet par l’Hexagone. Pourtant, le quintette post hardcore nous a fait l’heureuse surprise de nous donner rendez-vous au Trabendo en cette fin mars, promettant de jouer le dit album dans son intégralité et avec le line up (presque) originel. Inutile de dire que les fans étaient au rendez-vous.
La soirée s’annonçait chargée, avec pas moins de trois groupes alignés en ouverture des californiens, à commencer par le quintette français FALLASTER, dont le second album “Disclosing” est récemment sorti dans les bacs. Il est tout juste 19h30 lorsque les cinq garçons prennent place chacun à leur tour au son du morceau introductif “As Long As Senses Last”, parfait pour faire doucement monter la pression en invitant le spectateur dans l’univers post hardcore inspiré de la formation. Le groupe enchaîne alors logiquement avec “Say Goodbye”, un des titres les plus efficaces de l’opus, sur lequel la bande menée par Anthony commence à se déchainer. Tous les morceaux joués ce soir sont tirés de “Disclosing”, et c’est une vraie bonne surprise de constater que le combo a su préserver en live l’ambiance si particulière qu’il a pris soin de créer sur l’album, alternant morceaux agressifs (“Hear Me!”), accrocheurs (“There Is No Sound”, “In The Long Run”) et instants suspendus (“Breathing”, “What We Are Here For”) sans se démonter face à un public encore épars et visiblement peu familier de la musique du quintette lyonnais. Sur scène, tous donnent de leur personne, s’agitent avec conviction, l’atmosphère musicale instaurée par Fallaster étant bien soutenue par les jeux de lumières, et le son, plutôt correct, malgré des voix trop légèrement réglées, et donc régulièrement recouvertes par les instruments, notamment dans les aigus. C’est un peu dommage, car les performances vocales d’Anthony et Aurélien sont tout à fait honorables en live, de ce que l’on peut en juger. C’est sur le lourd “Living For You” que la formation nous quitte à 20h, sans avoir oublié auparavant de remercier le public et salué les autres groupes de la soirée.
C’est maintenant à BRANSON HOLLIS, autre jeune quintette français en plein essor, de s’emparer de la scène. Bien que la formation évolue dans le même style que ses prédécesseurs, le son qu’elle déploie est comparativement plus brutal et direct, tout en restant relativement accessible grâce à des refrains porteurs tels que celui de “Maunder’s Tale”, véritable claque en live. Ce qui surprend peut-être le plus quand on découvre le groupe dans ces conditions, c’est de constater qu’il n’y a pas vraiment de figure centrale, guitaristes et bassiste se répartissant les voix/screams dans la plus grande symbiose. Quant au clavier, il s’agit sans conteste d’un véritable atout pour le quintette, lui permettant d’appuyer les ambiances ainsi que la puissance de ses morceaux. En revanche, si tous font preuve d’une énergie imparable, on a l’impression que celle-ci peine quelque peu à se projeter au-delà des premiers rangs du public, sans doute, encore une fois, parce que la majorité de celui-ci découvre seulement la bande. Toutefois, on ne pourra que conseiller aux membres de Branson Hollis de se montrer un peu plus communicants, car il est dommage de n’en voir qu’un s’adresser au public, les autres se montrant inconsciemment plus distants vis-à-vis de l’audience. Côté setlist, les français nous font profiter de sept morceaux, presque tous tirés du premier album “The Unexpected Way Of Things”, nous donnant un avant-goût très prometteur de ce dernier. Le public remercié, c’est sur le détonant “Albina Press” que la formation nous laisse, après 35 minutes de jeu.
A 21h, nous voyons prendre place les cinq membres de l’ensemble anglais MALLORY KNOX, qui impose immédiatement avec l’énergisant “Wake Up” son rock efficace, dans la lignée de leurs compatriotes de Deaf Havana. Le message passe plutôt bien, puisque l’on peut voir le public, désormais plus compact, enfin se réveiller pour commencer à s’agiter et répondre avec enthousiasme aux interventions du charismatique frontman Mikey Chapman, dont la voix en live vaut à elle seule le détour tant elle est irréprochable, de même que celle du bassiste Sam Douglas, intervenant en renfort. Le succès est au rendez-vous pour les britanniques, qui n’ont aucun mal à obtenir d’une foule qui ne les connait pas qu’elle reprenne en chœur ses “ohoho” sur le morceau “Death Rattle”. Faisant preuve d’une très belle énergie, le quintette, dont c’est la première date d’une série en commun avec Finch, s’impose comme LA belle découverte de la soirée. Parmi les sept morceaux que nous offrent ce soir la formation, la plupart sont issus de l’album “Signals” sorti en début d’année, mais les lads vont également piocher dans leur premier EP “Pilot” avec les puissants “Resuscitate” et “Oceans”. Mais c’est sur “Lighthouse” que le groupe nous dit au revoir après une demi-heure, non sans avoir remercié le public français de son accueil chaleureux.
L’ambiance dans la salle étant montée d’un cran, la foule est maintenant prête pour accueillir les headliners de ce soir, les tants attendus FINCH. Le groupe nous fait patienter jusqu’à 22h, lorsque les lumières s’éteignent et que l’introduction de “New Beginnings” commence à se faire entendre, se prolongeant sur plusieurs minutes avant que les post hardcoreux n’apparaissent finalement sur scène sous un déluge d’applaudissements. On peut dire que les cinq complices savent soigner leur entrée ! Très vite, malgré les remarques que chacun peut se faire sur les transformations physiques des membres du groupe depuis la fameuse sortie de “What It Is To Burn”, on peut se rendre compte que le lien qui unit les fans au groupe n’a, lui, pas changé le moins du monde. Loin de les avoir oublié, l’audience se montre immédiatement en phase avec les californiens, comme s’ils n’étaient jamais vraiment partis, la foule s’agitant frénétiquement en reprenant par cœur les paroles de chacun des titres de l’album, déroulé dans l’ordre, comme promis. Plus qu’une commémoration, on serait presque tentés de parler de messe tant certains frôlent la transe, la salle se transformant au gré des circle pits et autres mouvements de crowdsurfing, notamment lorsque c’est le frontman Nate Barcalow himself qui se jette dans le public, ou bien son camarade de toujours Randy Strohmeyer (guitare), toujours aussi déjanté. Entre les morceaux, c’est surtout ce dernier qui prend la parole, que ce soit pour baragouiner quelques mots en français ou plaisanter avec le public sur sa petite prise de poids. Derek Doherty étant le seul membre d’origine à n’avoir pas rempilé pour l’occasion, c’est Daniel Wonacott qui est à la basse, s’agitant avec autant de vigueur que ses confrères. Sil est difficile de choisir des moments forts en particulier dans la performance des californiens, on pourra quand même mentionner le grand chaos qu’est l’interprétation de “Project Mayhem”, dans laquelle la formation s’amuse notamment à glisser des bouts du “Du Hast” de Rammstein, que Nate hurle avec la même rage qu’il y a quelques années. Le cathartique “Ender” vient marquer la fin de l’expérience, du moins de sa première partie, puisqu’après avoir quitté la scène, laissant la bande-son de la fin du morceau prendre le relai, les cinq feront leur retour pour deux morceaux de plus, mais pas avant avoir fait monter la pression pendant de longues minutes. Acclamés, ils reprennent enfin possession de la scène pour nous interpréter “Worms Of The Earth”, et bien sur “What It Is To Burn”, ultime moment de défoulement pour tous avant de devoir dire à nouveau adieu à Finch aux alentours de 23h10.
Il ne fallait pas manquer cette occasion peut-être unique de revoir Finch sur scène, dix ans après l’excellent “What It Is To Burn”, toujours aussi percutant en live. Vu l’énergie vibrante et l’envie apparente dont a fait preuve la formation ce soir, on ne peut s’empêcher d’espérer qu’elle considérera une réunion à plus long terme. Il paraitrait que l’idée a été abordée… reste plus qu’à prier.
Setlist :
New Beginnings
Letters To You
Post Script
Grey Matter
Perfection Through Silence
Awake
Without You Here
Stay With Me
Project Mayhem
Untitled
Three Simple Words
Ender
—-
Worms Of The Earth
What It Is To Burn
Crédit photos : Serge Tenani & Jennifer Wagner