Sous l’immense verrière de la Grande Halle De La Villette, les damnés du tatouage sont réunis pour ce deuxième jour autour de l’événement désormais mythique et tant attendu “Mondial Du Tatouage”. Cette convention a su placer la capitale dans la réunion incontournable des tatoueurs/tatoués. Elle a encore battue son plein en ralliant plus de 339 tatoueurs venus des quatre coins de la planète.
C’est Tin-Tin alias l’alchimiste baroudeur, qui en est la pièce maîtresse de ce voyage indélébile. Le maître de cérémonie a également ouvert les portes de son temple à un jury d’exception, composé de trois tatoueurs légendaires : Filip Leu, Luke Atkinson et Bill Salmon. Pendant ces trois jours se déroulera un concours pour déterminer le meilleur tatouage réaliste, meilleures pièces de grandes et petites dimensions, “Black & Grey” et s’encrer avec le “Best Of Day & Show”, qui attribue le premier, second et le troisième prix pour le meilleur tatouage de la convention.
En ce qui concerne le samedi 7 mars, il est 15h et le concours du jour commence, le public se rassemble en masse devant la scène pour admirer les œuvres sur peau, le tout animé par Pascal Tourain, comédien et humoriste, qui n’hésite pas à amuser la galerie et charmer le pôle féminin. Le meilleur tatouage “Large Couleur” est décerné à Hori Hui de Taiwan, le second à Sailor Bit de Suisse, pour finir avec Raphaël Tiraf, de France. Toutes les récompenses sont orchestrées par la talentueuse Simone El Rana, ainsi que d’autres partenaires tels que Vinyl Factory, Dear Muësli, Musée Du Quai Branly et plein d’autres. Le premier concours est terminé, petite entracte avant le prochain, l’occasion d’aller chiner et découvrir les univers de ces artistes aux mains d’argent. L’on traverse les continents, on croise des regards et des mondes où le tatouage est le moyen ultime d’expression. Plus qu’une passion, c’est une religion où les âmes ne se connectent qu’à travers l’encre qui coule. On parcourt la carte du globe en passant par le style “primitif”, qui fait référence au tatouage maori et polynésiens. Le tatouage “old school” avec ses contradictions par ses forts ombrages noirs et ses couleurs vives sur une base rock n’roll. Le tatouage “celtique”, équivalant au genre plus connu : “tribal”. Le style “asiatique” où s’inscrit des codes, une histoire, une identité et une culture. Un univers aussi fort qu’immuable et intemporel.
Les aiguilles affichent rapidement 17h, il est déjà temps de se rapprocher du podium pour le Round 2 avec pour thème “Le Meilleur Tatouage Noir & Gris”. Un défilé d’illustres inconnus s’amorce sous l’œil avisé du jury ainsi que Tin-Tin, qui discrètement n’hésite pas à donner son avis. On balance entre le monde marin et ses tourments à celui de Tim Burton et ses figures mécaniques. Suite à une délibération difficile, le jury a fini par trancher et le premier prix est attribué à Julien Te Mana de France, le deuxième à Marco Manzo, et s’achève avec Mathias Bugo et son univers tribal. Le défilé et le verdict achevés, il nous reste peu de temps avant le “Best Of Day”. Juste un moment pour savourer la 8.6 Bavaria hollandaise, l’un des principaux partenaires du Mondial Du Tatouage. Particulièrement l’édition limitée “Démesurément Tattoo”, qui est, rappelons-le, le breuvage essentiel de la convention. Dernière gorgée avalée et l’heure du “Best Of Day” sonne. Après la multitude de tatouages représentés, le prix du meilleur tatouage pour le second jour, revient à Fat Manu de “Street Art Family” de Tours. C’est avec son portrait de Jacques Brel accompagné d’un jeux de mots entremêlant deux titres de cet artiste indétrônable, “Les Bourgeois” et “Le Port d’Amsterdam”, que l’artiste remporte le prix à l’unanimité et c’est avec humour que l’artiste Fat Manu regagne son stand avec son prix de croix.
Il nous reste 2h avant le DJ set de Jennifer Cardini, connue pour son univers new wave avant-gardiste mêlé de rock indie. Nous repartons pour un second tour de stand et de se concentrer sur les finitions des tatoueurs sur leurs tatoués. Nos yeux se rivent sur les détails et les manipulations méticuleuses des artistes.
Le stand le plus surprenant de cet art ancestral est celui de la Malaisie avec Ernesto Kalum et Robinson Unau de Borneo Headhunters Tattoo. Ces magiciens d’encre, manient leurs marteaux et aiguilles avec dextérité, concentration, sagesse et philosophie.
21h15, JENNIFER CARDINI est en marche avec une musique et des sons hypnotiques, ce qui attisent la curiosité des loups et les ramènent devant la scène. Sachez que Madame Cardini se voudra imperturbable. Son premier morceau mélange des voix sourdes et des sons très aigus. L’atelier du lâcher prise est prêt à distiller les corps et les âmes bien fatigués. Les beats sourds font références à Austra et Kraftwerk. Les montées de plus en plus intenses, percent la nuit pour balancer un kick gorgé de transe. La mélomane s’affaire à ses platines pour imbiber cette foule dans les flots d’encre tumultueux. Elle maîtrise à la perfection le genre électronique underground et offre un set de quatre heures pour enivrer les mordus de cette communion mondiale. Ses rythmes sont exotiques et la ligne de basse lourde, décolle nos cages thoraciques. Elle se fait guide d’un voyage au cœur d’un Pérou psychédélique. L’audience quitte définitivement les stands pour rejoindre les vibrations made In Cardini. Dans ses essences tribales, Depeche Mode y fait une brève apparition dans une subtilité déconcertante.
La nuit s’annonce chamanique et planante. Que vos rêves soient mouvants et encrés de couleurs, car il reste encore une troisième et dernière journée à passer au Mondial Du Tatouage.