Reports

MUSILAC 2014 – Jour 1 (11/07/14)

Musilac. Le nom ne vous parle sûrement pas autant qu’un Main Square, un Rock En Seine ou des Eurockéennes. Et pourtant, bien installé depuis des années à Aix-Les-Bains, Savoie, le festival a de biens jolis arguments pour convaincre : des conditions d’accueil impeccables, des artistes de qualité, un public prêt à la découverte. Un must qui propose, entre pointures internationales et artistes francophones, un plateau plus qu’intéressant !

La pluie, qui est tombée à verses depuis dimanche dernier, avec orages de rigueur, a décidé de laisser souffler le festival Musilac en ce premier jour. En effet, celle-ci s’arrête juste avant le premier concert. Toutefois, les festivaliers auront intérêt à être bien chaussés pour garder les pieds au sec dans la pelouse détrempée ! La veille, la soirée d’ouverture, la Before aura quand même dû être annulée pour cause de météo trop défavorable.

 

 

BESS (Scène Pression Live) – En ce début de vendredi, journée affichant complet, le public est encore très clairsemé quand les Perpignanais de bESS ont l’ingrate tâche d’ouvrir les hostilités, emmené par le très chaleureux Guillaume Fanchon. Avec son pop rock d’influence anglaise – bESS pour british ESSence – plutôt agréable, leurs sourires, un contact indéniable avec le public, le groupe offre une belle entrée en matière. Détail amusant, la formation jouera un morceau en s’accompagnant avec un smartphone comme piano.

 

 

GDERWS (Scène Pression Live)- Gderws continue l’exploration musilakienne de la scène française dans la moiteur savoyarde. La musique, plus nostalgique et mélancolique, s’accorde avec le ciel chargé. Le public reste toujours timide, encore peu nombreux. La pop électro des nordistes – coldwave aurait-on dit il y a quelques temps – ne suscite pas une grande effervescence et son relatif calme contraste avec le groupe précédent. Mais Musilac est terre de contrastes comme vous pourrez le constater tout au long de ces trois jours.

 

 

JAMAICA (Scène Pression Live) – Dernier set du jour sur la scène Pression Live, Jamaïca nous ramène sur des terres plus rock et délivre une prestation plus enlevée que le public présent apprécie. Antoine Hilaire, au chant, rappelle qu’il s’agit du second passage à Musilac, met un peu de pression aux aixois en parlant de Lyon et de meilleur public, et chauffe les spectateurs en demandant “Vous êtes là pour Motörhead ? Vous êtes là pour Shaka Ponk ? Pour -M- ?”. La ferveur monte avec les noms et à l’applaudimètre -M- obtient la première place. “Nous, on est là pour Jamaïca”, continue Antoine, avec humour, sans oublier de remercier le public. C’est avec cette dernière prestation convaincante que nous pouvons nous tourner vers les deux scènes principales pour la suite des festivités.

 

 

Ces trois shows ont donc eu lieu sur la scène Pression Live installée directement à gauche à l’entrée du site. Justement, arrêtons-nous un instant pour parler un peu de ce site et de Musilac. Le festival existe depuis 2002 et se tient dans la ville d’Aix-les-Bains, dans un cadre vraiment très agréable : aux bords du Lac du Bourget. Il a vu passer de grands noms de la scène française (Noir Désir, Bernard Lavilliers, Indochine, etc) et des pointures internationales (Muse, The Cure, Patti Smith, ZZ Top, etc). 2014 verra Placebo, Mötorhead, Vanessa Paradis, -M-, Stromae entre autres. Toujours du lourd, conviendrez-vous. Le site est une grande pelouse qui longe le lac et ses montagnes, offrant un panorama très agréable. Des restaurants de toute sorte permettent de se restaurer avec des plats indiens, corses, du sud-ouest, argentins ou encore des hamburgers américains. La variété est donc là. Un petit espace avec quelques tables permet de s’asseoir ou de faire une pause sous les arbres. Quelques boutiques vendent des T-shirts, des tongs, des lunettes de soleil ou des chapeaux. Pas sûr qu’elles vendent beaucoup sur cette édition ! Ajoutez une boutique de tatouages éphémères et vous aurez un bon aperçu de ce que vous pouvez consommer. Des toilettes et des points d’eau assurent le confort de tous. Pour vous messieurs, de vrais urinoirs, pas ces trèfles en plastique que l’on peut voir parfois. Dernier point, non des moindres, vous avez été 80 000 festivaliers (on parle de musilakiens et de musilakiennes) à fouler l’herbe verte du site. Belle audience tout de même !

 

 

FRANCOIS AND THE ATLAS MOUNTAINS (Scène Montagne) – La scène Montagne accueille une étrange formation : François & The Atlas Mountains que certains auront pu voir récemment en live sur une célèbre chaîne cryptée. Avec leur look gentillet, un rien démodé, leur pop acidulée, le premier contact est déroutant. La prestation a un petit côté raide, retenue -le trac ?- et les chorégraphies sont assez curieuses. Sur scène quelques instruments de percussion indiquent une influence orientale/africaine. D’ailleurs le public sera invité à danser des épaules sur un de leurs titres qui vient d’Ethiopie. Et finalement, Frànçois And The Atlas Mountains vous emmène dans son univers avec des titres comme “La Vérité”, leurs danses – bassiste et chanteur se lâcheront dans un duo endiablé. Il y a effectivement de la pop mais saupoudrée d’une patte originale. Et c’est sur un gros final instrumental qui voit chacun des musiciens se donner enfin à fond que le groupe termine une prestation appréciée par l’assemblée.

 

 

KAISER CHIEFS (Scène Lac) – Changement de scène – Musilac propose deux scènes principales, la scène lac et la scène Montagne, sur lesquelles les prestations alterneront – et changement d’ambiance avec l’arrivée des Kaiser Chiefs. Plus de pop ni de prestation timide, Ricky Wilson attaque direct, faisant chanter immédiatement la foule. L’homme ne tient pas en place et mène la barque, les autres musiciens restant en retrait, hormis le clavier Nick Baines qui ira devant la scène pour faire applaudir le public. Ricky descend dès les premiers morceaux dans le pit pour être au contact des fans, court jusqu’au bout de l’autre scène pour faire vibrer et hurler les festivaliers, monte sur les structures et s’échappe de la scène pour monter sur une plateforme réservée au public où il trouvera une bouteille de champagne dont il boira de grandes rasades. De quoi donner le tournis à la sécurité. Mais quelle prestation ! “Coming Home” calmera les esprits après un début tonitruant et des titres comme “Ruby” ou “I Predict A Riot” remporteront un beau succès auprès du public, tout comme la prestation des anglais, premier concert à secouer Musilac d’un esprit totalement rock n’roll !

 

 

LONDON GRAMMAR (Scène Montagne) – Comme dit précédemment, Musilac est terre de contrastes, ce qu’illustre l’arrivée de London Grammar qui offre une pause introspective entre deux déferlantes de gros son. La prestation est plus que reposante. Statique, froide comme la blondeur de Hannah Reid (chant). Les rares sourires qui apparaissent sur les visages des musiciens ne suffisent pas à ramener le soleil sur Aix. Dans un cadre plus intimiste, les compositions, principalement du premier album “If You Wait” s’apprécierait peut-être plus. Toutefois, l’audience reste mobilisée et montre un intérêt certain pour la musique des anglais.

 

 

 

MOTORHEAD (Scène Lac) – Côté scène Lac, des “Lemmy ! Lemmy !” et autres “Motörhead ! Motörhead !” se font entendre. Les fans sont là. Et Lemmy aussi après les annulations de concert des derniers mois. L’homme accuse quand même le coup. Il est amaigri et ses récents problèmes de santé ont indéniablement laissé des traces. “Stay Clean”, “Over The Top”, “Rock It”, les morceaux s’enchaînent dans une formule archi connue, mais archi efficace. Le son est correct et les musilakiens en prennent plein les tympans. Sans en faire trop, Motörhead convainc par la qualité de ses titres et sa puissance de feu. Une incursion dans le petit dernier avec “Lost Women Blues”, un “Going To Brazil” qui sent bon le rock n’roll, un solo de Mikkey Dee (batterie) sur “Doctor Rock” et les classiques “Ace Of Spades” et “Overkill”, le trio ne change pas une formule qui marche depuis des années. En termes de communication, peu de mots, Phil qui remercie le public, Lemmy qui introduit les autres membres du groupe car “it may be your first time with Motörhead” ou qui demande au public s’il aime le rock’n’roll avant d’entamer “Going To Brazil”. De l’archi classique là aussi. Les plus attentifs auront remarqué l’autocollant No One Is Innocent sur une des guitares de Phil. Joli clin d’œil à la bande de Kémar qui a eu l’occasion d’ouvrir pour Motörhead par le passé. Côté coulisses, on peut voir le groupe descendre de scène et monter directement dans une berline qui les sort du festival. Ne vous inquiétez pas, les fans ne vous oublieront pas !

 

 

-M- (Scène Montagne) – Les trios se suivent et ne se ressemblent pas même si indéniablement, nous restons dans le power trio. Après un message sur les intermittents, -M-, accompagné de Brad Thomas Ackley à la “basstar”, cet instrument tout à la fois guitare et synthé, et de Lawrence Clais à la batterie, débarque et enflamme l’esplanade du lac. Le spectacle est total, les ingrédients de la réussite tous présents : le visuel des looks, des instruments et des lumières, une attitude très rock n’roll que l’on voit dans des solos qu’AC/DC ne renierait pas, une communication forte avec le public que Matthieu Chedid sollicitera dès le début de son concert, une énergie débordante, un charisme énorme et surtout, au-delà de la musique et des titres joués, il y a un plaisir évident. Et ce plaisir, ce bonheur, transpirent, se sentent dans chacun des pores des trois musiciens présents. Et se communiquent à la foule qui adhère et adore. Il faut dire, quel sens du spectacle ! Comment ne pas apprécier une telle prestation ? Les festivaliers mangent dans la main du chanteur qui se laissera porter par l’assemblée sur “Je Dis Aime”. Même Lawrence participe au spectacle en faisant quelques pas de danse avec Brad sur un air hip hop. Cet aspect-là participe aussi au succès du show. Tout le monde est impliqué, il ne s’agit pas uniquement de -M- accompagné de deux musiciens mais bien d’un groupe, avec un leader certes, qui offre un spectacle de groupe. Première grosse claque du festival assurément.

 

 

SHAKA PONK (Scène Lac) – Shaka Ponk amène son joyeux bordel à Musilac. Un problème de son au démarrage n’entame en rien la déferlante d’énergie qui sort de scène dans tous les sens pour atterrir dans une audience ravie qui réagit fort. Emmené par ses deux fers de lance, Frah et Samaha Sam, les Shaka Ponk rappellent qu’il ne s’agit pas de leur premier passage sur ce festival. La scène est élaborée, avec de gros cubes blancs, un écran en fond qui diffuse des images (de singe évidemment !) et un impact visuel travaillé et plutôt réussi. Même si la prestation a un côté chaotique, brouillon qui peut nuire un peu à la lecture, la forme semble revenue côté formation (ndlr : une prestation à Solidays en demi-teinte). Mandris donne dans du headbanguing qui ne déparerait pas au Hellfest et Samaha Sam va haranguer le public sur l’autre scène. Que dire de Frah qui, en fin de concert, monte quelques cubes les uns sur les autres, et saute directement dans la foule du sommet de cette pile ! Il arrivera même à tenir debout sur la foule. Belles images ! 00h20, la pluie revient. Frah essaie de faire asseoir la foule, lui promettant qu’ainsi la pluie s’arrêtera, comme dans un rite magique. Et effectivement, la pluie s’arrêtera ! Un peu magicien le Frah. A moins que Goz n’ait quelques pouvoirs mystérieux ! La bataille de batterie entre Ion et des versions yétisantes de Goz est aussi un moment fort de ce spectacle qui aura vraiment plu aux festivaliers qui se sont déplacés en masse; le site est blindé. Après -M-, Shaka Ponk aura montré que les artistes français ont vraiment de quoi enflammer les foules. Pour un premier jour, nos yeux et nos oreilles auront été largement servi. Et ce n’est pas fini.

 

 

FAUVE (Scène Montagne) – Fauve entre en scène dans des éclairages minimalistes, sans aucun photographe autorisé, avec un peu trop de basse mais une belle énergie. Le collectif assure sur scène, mouille sa chemise – et pas seulement à cause du retour de la pluie. “Haut Les Cœurs”, “Cock Music Smart Music”, des titres qui font mouche. La prestation est soutenue, menée tambour battant par Quentin au chant ou plutôt aux mots, aux spoken word si l’on veut la jouer anglo-saxonne. A noter sa performance qui permet de comprendre ce qu’il dit ! Pas évident en conditions live d’articuler distinctement. Tant mieux. D’autant que les paroles sont simples et intelligentes. Peut-être là, la clef du succès de mots qui parlent à tous, offrent quelque chose de nouveau. En fond de scène des images embellissent une prestation que l’assemblée apprécie.

 

 

MACEO PARKER s’occupera ensuite des plus courageux festivaliers pour une fin de journée qui revoit la scène Pression Live pour une dernière fois cette nuit.

Le premier jour se termine, ayant offert son lot d’émotions et d’énergie avec un premier constat : la diversité et la qualité étaient de mise sur scène avec un public que l’éclectisme n’a absolument pas refroidi, bien au contraire. Belle preuve que les chapelles n’ont pas tant de réalité.

Jour 1Jour 2Jour 3

Anthony Bé
Fondateur - Rédacteur en chef du webzine RockUrLife