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EVANESCENCE (09/03/21)

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Malgré une période compliquée et quelques problèmes de connexion, RockUrLife eu la chance de pouvoir échanger avec Jen Majura, guitariste d’Evanescence, pour parler du nouvel album “The Bitter Truth” qui sortira le 26 mars prochain. Premier disque depuis dix ans.

Jen Majura (guitare) : Salut ! Désolée du retard : problème de connexion.

Aucun souci. Quand tu veux…

Jen : Allons-y ! Comment vas-tu ?

Bien et toi ? 

Jen : (En français) Je suis bien merci beaucoup ! Mais je ne parle pas français, je suis complètement paumée avec cette langue.

De notre côté on ne parle pas du tout allemand, donc on s’entend sur un échange en anglais !

Jen : À vrai dire je ne parle quasiment plus allemand non plus pour être honnête. Les seules personnes à qui je parle encore allemand sont mes parents et mes élèves de guitare. (rires)

La première question est à propos de la pandémie. C’est une question qu’on a l’habitude de poser ces jours-ci. Comment cette situation a impacté ta vie d’artiste ?

Jen : Imagine que ta vie ne tourne qu’autour des tour bus, des hôtels, des voyages, des aéroports. C’était ma vie les trois dernières années et 2020 a tout changé. Maintenant mon activité consiste à être sur mon canapé et ne quasiment jamais sortir de chez moi. L’anxiété est présente également. Ce changement brutal m’a causé quelques problèmes de santé mentale. A part le groupe, ce qui me manque le plus c’est le contact avec les fans. Je n’ai pas vu Amy et les garçons depuis l’année dernière, en janvier où nous avions commencé à enregistrer les premières parties de “The Bitter Truth”. Je me souviens lorsqu’on s’est quitté à l’aéroport : “bisous bisous, on se voit le mois prochain” et tu connais la suite.

Personne n’aurait pu le prédire. C’est surréaliste de ne plus pouvoir voyager pour aller voir mes amis, mon groupe. Mais le bon côté, si on peut le dire comme cela c’est que l’on est tous concernés, que l’on soit blanc, noir, riche, pauvre, grand, petit. Il y a aussi ce sentiment d’être à la fois beaucoup plus connecté avec les autres et en même temps beaucoup moins. Physiquement je suis très loin d’Amy et des garçons. Ce n’est pas comme ne pas être dans la même ville, il y a un putain d’océan entre nous. C’est assez dur, mais on essaie de garder le contact. On fait beaucoup d’appels “Zoom” où l’on parle de la vie et ce qu’il se passe et c’est bien de pouvoir toujours se connecter.

© Nick Fancher

À propos du nouvel album “The Bitter Truth“…

Jen : Comment cela, quel album ? Non je plaisante, continue. (rires)

L’album s’appelle “The Bitter Truth”, mais de nos jours, ce n’est pas évident de savoir ce qui est vrai ou non. Que signifie cet intitulé ?

Jen : Nous vivons dans un monde où tout se passe en ligne et sur les réseaux sociaux. Tout le monde utilise des filtres et se met en scène montrant une vie parfaite, une attitude parfaite, un maquillage parfait… Je pense que le titre de l’album et la puissance des morceaux qui le compose signifient qu’il faut affronter ces “vérités amères”. Admettre que de temps en temps tout ne soit pas parfait ou magnifique et que tu puisses avoir des problèmes ou porter des cicatrices. Tout ce qui fait qui tu es. Et les gens ont tendance à oublier que c’est cela qui nous rend humains et vrais. Être vulnérable et tous ces aspects qui te forgent montrent qui tu es et je suis convaincu que nous devons affronter la réalité pour avancer. Je ne veux pas rentrer dans la politique, mais il se passe tellement de choses ces temps-ci. Et je pense que nous pouvons guérir en tant qu’espèce et en tant que société, mais avant il faut affronter notre propre réalité et c’est littéralement ce que je pense du titre de l’album.

C’est marrant que tu parles de politique, car l’album est assez porté sur le côté activiste et la responsabilisation. Certaines personnes disent que la différence entre un chanteur et un artiste est ce sur quoi ils chantent. Si tu ne défends pas une cause tu n’es pas un artiste, tu es juste un chanteur (ndlr : YUNGBLUD à RockUrLife). Que penses-tu de cette vision ? Et considères-tu “The Bitter Truth” comme de l’activisme ?

Jen : Je n’y crois pas du tout. Les musiciens ne doivent pas obligatoirement avoir une opinion politique pour être appelés “artiste”. C’est une bonne question ! (rires) Je crois que ce qui définit un artiste est sa capacité à mettre en images des émotions, des rêves directement dans le cœur et l’âme de la personne qui écoute. L’art existe sous tellement de formes et être politiquement engagé ne qualifie pas quelqu’un comme artiste ou non. “The Bitter Truth” a définitivement un message fort. Comme tu l’as dit, l’album est “responsabilisant” et “stimulant”. Il est aussi inspirant avec ce qu’on vient de traverser et qui se poursuit. Mais je suis convaincu que c’est le bon moment de sortir un album qui dit que ta voix à de l’importance et toi en tant qu’humain en a aussi. Il est important de se battre pour ses croyances et ce qui est bon. Le message de “The Bitter Truth” est un message puissant de vérité et d’humanité.

Sur des morceaux tels que “Artifact/The Turn” on sent que le style d’Evanescence évolue, mais en même temps vous arrivez à conserver votre identité, malgré les changements de line up et de production. Beaucoup de groupes perdent leur identité avec de tels changements. Comment faites-vous ?

Jen : Je ne pense pas que “perdre son identité” soit un terme approprié quand on parle de personnes, d’un groupe, ou de gens qui travaillent et évoluent ensemble. Tu changes en tant qu’humain et tu peux changer en tant que groupe, surtout en ce qui nous concerne, avec un différent line up. Pour Evanescence, nous avons réussi à produire un album bien plus lourd que ce qu’on pouvait imaginer. Quand Amy est venue avec ses idées pour nous demander notre avis, cela sonnait très “électro”. Mais au fur et à mesure que l’on travaillait dessus, notamment avec les lignes de basse de Tim, on a fait évoluer chaque idée sur quelque chose de puissant et de heavy. Et personnellement j’adore cela ! En travaillant à partir de sons très synthétiques nous nous sommes poussés à aller vers un côté beaucoup plus rock. Donc il y a définitivement un retour aux racines, mais rempli de nouveaux éléments pour que cet album sonne moderne et dans l’air du temps. En même temps il est cohérent avec le message qu’il porte. Il y a beaucoup plus de guitares que ce que je pensais, ce qui est magnifique. (rires)

C’est l’un des meilleurs albums de l’année et du groupe. Mais justement, cela fait dix ans qu’Evanescence n’a pas sorti de nouvel album. L’attente et la pression doivent être grandes ! Les fans risquent d’être un poil exigeants. Comment le sens-tu ? Quels sont les premiers retours ?

Jen : La réaction pour chaque single a été phénoménale. Les fans ont tous été si réceptifs et ont montré tant de passion quand nous avons sorti chaque morceau. Il n’y avait que de l’amour en retour, c’était à couper le souffle et vraiment beau.

En tant qu’artiste, je ne veux pas sortir un album pour sortir un album, tu comprends ce que je veux dire ? C’est la mauvaise manière de faire ce métier à mon avis. Il y a eu un gros break, oui. Mais principalement parce que Amy a cette passion profonde pour le véritable art de la musique et nous partageons la même vision concernant le travail. Nous ne voulons pas sortir un produit pour que les fans le consomment. Il nous faut le bon moment, les bonnes choses à dire et la bonne inspiration. En plus Amy est devenue maman, ce qui est magnifique et je pense qu’elle a eu besoin d’être “Amy” au lieu d’être “Amy Lee d’Evanescence” pendant un moment. Et c’est beau qu’elle ait pris ce temps pour elle et pour cet album. En 2020 alors que rien n’était prévu, je me souviens avoir reçu cet e-mail d’Amy qui disait : “Nous devons le faire !” J’aime cette énergie et je ne peux pas être plus fière de mon groupe et de ces si belles musiques.

Evanescence fait face à une nouvelle génération et à un nouveau public avec cet album. Nous étions adolescents pour la sortie du dernier album et nous sommes devenus aujourd’hui adultes. Penses-tu que les fans “comme nous” seront là quand l’album sortira ?

Jen : Cela va avec ce que tu disais tout à l’heure, je ne pense pas que l’on va perdre des fans, on ne perd rien. Cet album nous fait progresser en tant qu’humain, musicien et groupe. Nous évoluons et cela nous permet d’avancer. Amy a changé, nos vies ont changé. C’est également la première fois que je suis sur un album avec le groupe et évidemment cela amène des changements, mais je ne vois pas cela comme une mauvaise chose. Qui veut avoir la même copie du même album encore et encore ? Surtout dix ans plus tard ! Personne ne veut cela. (rires)

Tu l’as déjà souligné, mais c’est ton premier album avec Evanescence alors que tu es dans le groupe depuis cinq ans maintenant.

Jen : Effrayant n’est-ce pas ? Bientôt six même. (rires)

© Eric Ryan Anderson

Oui ! Mais du coup comment te sens-tu avec cette situation ? Te sens-tu pleinement à ta place dans le groupe ?

Jen : Il faut bien comprendre qu’avant tout Amy, les garçons et moi sommes amis ! On a notre groupe de discussion où l’on s’envoie des memes et d’autres conneries comme cela. J’ai beaucoup trop de respect et de liens d’amitié avec Amy et les garçons pour appeler le groupe “du travail”. C’est véritablement une relation d’amitié et d’amour profond. Et je mentirais si je disais que j’ai adoré rester chez moi sans avoir à travailler. Et pour te donner un exemple concret, je me sens à l’aise à l’idée de pouvoir envoyer moi-même des compositions ou des idées sur lesquelles travailler avec le groupe.

J’aime créer, mais le fait que je n’ai pas pu être en studio avec le groupe depuis plus d’un an a été très difficile et je le vois comme un challenge envers moi-même : voir ce que je suis capable de produire. Je me souviens quand j’ai reçu le fichier de “Better Without You” j’étais chez moi en Allemagne et la chanson était parfaite, je ne voulais pas ajouter la moindre guitare ou changements aux instruments qui auraient été comme la goutte de trop et auraient gâché le morceau alors j’ai juste essayé de chanter ! (rires) Et c’était énorme pour moi, car c’est la première fois dans l’histoire d’Evanescence qu’une autre femme chante aux côtés d’Amy et je ne peux pas être plus fière.

C’est aussi une grande marque de confiance de sa part et du reste du groupe envers toi. Les retours depuis la sortie du single ont été incroyables d’ailleurs.

Jen : Oui, c’était incroyable ! Et je trouve que c’est également l’une des chansons les plus fortes de l’album. J’ai hâte que tout le monde puisse entendre l’intégralité du disque. Je ne veux pas paraître arrogante, mais il sonne putain de bien ! (rires)


Il l’est ! Amy a déclaré que le processus de composition avait été différent de ce qu’elle avait l’habitude de faire. Peux-tu nous en dire plus ? À part l’aspect pandémie évidemment.

Jen : Très honnêtement je ne suis pas la bonne personne pour répondre à cette question. Je ne peux que te parler du début, puisqu’après février j’étais seule chez moi, sur un autre continent. Avec un océan entre nous. (rires) Si je devais faire un vœu surla façon dont je voudrais travailler le premier album auquel je participe, ce ne serait pas : “Hey ! Faisons-le pendant une pandémie”. (rires) Je suis très old school en ce qui concerne l’écriture, j’ai besoin d’être dans une pièce avec les autres membres pour avoir des retours directs. Mais ce n’était pas possible.

Que penses-tu apporter aux autres dans le groupe ?

Jen : C’est une question difficile ! Évidemment chaque personne dans le groupe à ses propres goûts musicaux, ses films préférés, sa vision pour notre musique, et tout cela contribue à créer le “nouveau” Evanescence. Et vraiment c’est difficile de répondre c’est une très bonne question ! (rires) Je dois faire attention maintenant. Je pense que j’arrive à connecter le groupe aux attentes des fans. Je ne vais pas prendre tout le crédit de cela, car Amy est sur les réseaux sociaux et aussi active que moi sur Instagram. Mais lors de la toute première tournée, je postais des stories pour emmener les fans avec nous dans le bus, sur scène, pendant les balances et c’était totalement nouveau pour eux. Et j’espère apporter de bonnes énergies, quelque chose de positif au reste du groupe. J’espère que cela te convient comme réponse.

© Nick Fancher

C’est une très bonne réponse ! Est-ce que tu as déjà un morceau préféré sur l’album ?

Jen : Je déteste cette question. (rires) Je sais que tu dois la poser. C’est comme demander lequel est ton préféré parmi douze enfants !

On voulait te la poser en deux temps. D’abord celle à jouer et une autre pour sa signification. Cela peut être la même si tu veux.

Jen : Mon dieu. Pour la signification, je vais évidemment sur “Broken Pieces Shine” parce que cette chanson me touche personnellement. Quand je me suis penchée sur les paroles je me suis demandée comment je pourrai un jour jouer cette musique en live. Je vais me retrouver devant le public en larmes comme un bébé, car elle me touche profondément. Ensuite, celle que je préfère jouer en live, honnêtement : toutes ! L’humanité traverse un long désert et on veut tous ressortir et jouer chaque morceau même deux fois ! Je suis prête à faire des concerts de trois voir quatre heures maintenant ! (rires) Je veux juste jouer !

Justement : bientôt, on espère retrouver les salles de concert et pour toi partir en tournée. Te prépares-tu déjà pour ce moment ou non avec le reste du groupe, des idées sur la scénographie ?

Jen : Alors, je vais uniquement parler en mon nom, mais j’ai beaucoup trop mangé pendant le confinement, je vais reprendre le sport parce que j’ai pris tellement de poids ! Je sortais uniquement pour faire des courses et rentrais épuisée de cette activité ! (rires)

Mais j’ai encore besoin de quelques mois pour me préparer mentalement à partir en tournée et aussi pour me remettre en forme physiquement pour perdre ce petit ventre. Je n’ai pas beaucoup touché à ma guitare, il va falloir que je travaille un peu cela aussi et je parle pour moi, mais je pense que je n’ai jamais aussi peu joué de la guitare depuis que j’ai six ans. Il n’y avait pas de but, pas de raison et d’envie de jouer cette année et je faisais face à mes problèmes. J’en avais marre de dire à tout le monde à quel point je vais bien alors que c’est une année affreuse, mais je vais apprendre de cette expérience et en sortir plus forte. Il faut définitivement que je me remette en forme. (rires)

Nous ne nous occupons pas du tout de l’aspect matériel sur scène à part nos instruments.

Après ces temps difficiles, que peut-on te souhaiter pour ta carrière d’artiste ?

Jen : Pour l’instant ce serait juste d’être capable de faire ce que nous aimons le plus et avoir la chance de retrouver le contact avec nos fans. Leur donner une expérience plus grande que juste à travers un écran…

© Eric Ryan Anderson

Dernière question : notre média s’appelle “RockUrLife”, qu’est-ce qui rock ta life, Jen ?

Jen : Wow ! Qu’est-ce qui rock ma life ? Tu es venu avec beaucoup de bonnes questions. (rires)

Mon petit budgie Cookie évidemment ! Il rock ma life. Mais je n’ai jamais vraiment pensé à cette question. Je dirais être capable de faire ce que j’aime, c’est-à-dire être musicienne. Est-ce que cela a du sens ? J’essaye de réfléchir en même temps. (rires) Mais oui, être capable de créer, faire de la musique rock ma life ! Je peux aussi te dire que revoir Amy et les garçons va définitivement rocker ma life !

Merci beaucoup pour ton temps. C’était super !

Jen : Merci à toi pour ta patience face à mes problèmes techniques, c’était une superbe conversation !

Aucun souci. Bonne journée !

Jen : Bye !

Site web : evanescence.com