Trois ans et demi après leur dernier (et premier) passage dans la capitale, les Américains d’Alesana revenaient fouler les pavés d’une ville qui ne les avait pas dignement accueilli la première fois. Mais tabula rasa du passé, les pionniers du emocore viennent de sortir leur cinquième album et sont bien décidés d’en découdre avec le public parisien toujours particulier. Pour l’occasion, ils sont accompagnés des Anglais de Loveless et de trois groupes français : Tahoe, Mind The Thorns et Behind The Tales.
La prestation des Français de BEHIND THE TALES nous passera sous le nez car trop occupés à discuter moto et littérature avec Shawn et Dennis, les deux voix d’Alesana (interview à venir).
Par la suite, c’est donc au tour de MIND THE THORNS de prendre place sur scène. Avec un EP dans la musette sorti plus tôt dans l’année, le groupe écume les scènes parisiennes et l’expérience commence à se faire sentir. Pour une formation aussi jeune, la prestation est globalement carrée et énergique. Le quintette évolue entre un rock alternatif et un post hardcore teinté de légers breakdowns et si sa musique ne révolutionne pas le genre, on ne peut nier que c’est bien exécuté. L’ensemble distille une énergie très positive que le public, relativement parsemé, lui rend très bien. Il n’est jamais évident d’être chanteuse évoluant dans ce registre mais si des progrès restent à faire dans la justesse de certaines lignes, avoir autant d’énergie et garder une qualité de chant aussi bonne que celle-là ce soir, c’est une performance qu’il est utile de noter. En clair, Mind The Thorns a parfaitement rempli son rôle en motivant une salle encore un peu en vacances et ayant donc besoin d’une remise dans le bain en terme de concert.
Les Parisiens de TAHOE investissent la scène du Batofar à leur tour. Habitués des premières parties prestigieuses (Circa Survive, Polar), le groupe fait tranquillement tourner son premier EP “Wonders” sur les scènes de France. Si le set est identique à celui vu en première partie de Circa Survive, il est toujours surprenant de voir à quel point le groupe transpire un professionnalisme inédit pour une formation aussi jeune. Si Mika au chant doit faire face à certaines difficultés techniques ne facilitant pas sa prestation, le reste de la troupe est un véritable rouleau compresseur. Les parties lourdes comme les plus nuancées sont exécutés à la perfection. Les breaks gardent cette dimension humaine qui rend la musique de Tahoe bien plus riche que celle des formations évoluant dans le même style. S’il nous tarde d’entendre le nouveau matériel des Parisiens, ce soir ils auront rappelé à tout le monde qu’il faudra compter sur eux à l’avenir.
Les Anglais de LOVELESS accompagnent donc Alesana sur l’ensemble de cette tournée européenne. Et si la réputation du combo américain s’est faite en grande partie entre 2006 et 2009, il semble que LoveLess soit un groupe tout droit sorti de la vague ayant émergé dans ces années ! Distillant un rock alternatif ayant baigné un peu trop longtemps dans les premiers albums de My Chemical Romance ou d’AFI, LoveLess offre une prestation uniquement rythmée par les poses constantes de son chanteur. Victimes d’un son plat, le quintette britannique enchaine des chansons assez répétitives sans jamais vraiment capter l’attention de l’audience. Prestation à oublier pour un groupe calquant la recette d’un rock passé d’âge aujourd’hui.
Trente minutes après la fin du set de LoveLess, les lumières s’éteignent et “Praeludium” retentit. ALESANA entre sur scène et balance un “Nervermore”, issu du “Decade EP”, dévastateur. Malgré la piètre qualité de son du Batofar, il n’est pas difficile de constater que les Américains originaires de Raleigh va nous claquer la gueule ce soir. La voix très haut-perchée de Shawn Milke passe merveilleusement bien alors que le scream poussif de Dennis donne presque l’impression qu’il est maîtrisé ! Les musiciens ne sont pas en reste et les trois guitares se répartissent à merveille l’alliance de sons clairs et de sons plus musclés des compositions ambitieuses des derniers albums d’Alesana. La formation introduit les chansons issues de “The Emptiness” par les interludes parlées présentes sur l’album, ce qui a le don d’exciter au possible un auditoire parisien chaud comme la braise. Ca chante, ça danse et on voit une bande surprise d’une telle interaction avec un groupe pourtant rare dans nos contrées. “Oh, How The Mighty Have Fallen” recueille tous les suffrages, l’assemblée hurle les paroles du dernier single en date avant d’enchaîner sur “The Murderer” et sur un “Curse Of The Virgin Canvas” d’anthologie. “The Emptiness” est l’opus le plus représenté ce soir, ce qui montre l’impact de cet essai cinq ans après sa sortie. Dennis s’adresse souvent à la foule, toujours avec beaucoup d’humour et de sympathie, ce qui renforce l’ambiance très chaleureuse. Alesana s’extasie souvent de jouer dans un bateau, mentionnant que c’est sa première fois dans un endroit insolite. En parlant de première fois, Dennis demande au public qui était présent lors de sa première date à Paris et, étonnamment, peu de personne se manifestent (ironie vu la jeunesse des spectateurs). Le groupe termine son set par un “Beyond The Sacred Glass” reprise par tout l’auditoire et file rapidement en coulisses. Le Batofar rappelle généreusement la formation et c’est un Dennis tout en décontraction qui revient nous parler “d’homme à homme”. Toujours aussi drôle, le délirant frontman motive sa troupe à revenir sur scène, qui entamera “Apology” en guise de conclusion finale à un set d’excellente facture. Dennis terminera dans la fosse à slammer, bière à la main, avec le reste du public, symbole d’une soirée passée dans une ambiance hypra conviviale.
Pour l’un des premiers concerts de cette rentrée 2015, Alesana a confirmé son statut d’excellent groupe tant sur CD qu’en live. Devant une audience pas hyper nombreuse mais extrêmement motivée, les Américains ont délivré un set plein de générosité. Mention spéciale à Tahoe pour sa prestation pleine de maîtrise et de puissance également ce soir.
Setlist :
Nevermore
Hand In Hand With The Damned
The Artist
Oh, How The Mighty Have Fallen
The Murderer
Curse Of The Virgin Canvas
Circle VII: Sins Of The Lion
Comedy Of Errors
The Thespian
Beyond The Sacred Glass
Ambrosia
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Apology