Mardi 24 novembre dernier a eu lieu un concert des plus notables : Scorpions était à l’ex-Palais Omnisports de Bercy, accompagné par Europe en première partie. Un duel au sommet.
Dix jours après les attentats de Paris, la soirée s’annonçait sous tension au vu des multiples fouilles à l’entrée du concert. Pourtant, tout le monde était présent pour une unique raison : se détendre et passer un bon moment, unis dans une même joie. Ainsi, c’est EUROPE qui ouvre le bal, devant une salle qui se remplit au compte-gouttes. L’intitulé de cette tournée, “War Of Kings”, ne pouvait être mieux choisi, bien que les acteurs soient plutôt portés sur la paix. A voir leur énergie débordante, les garçons donnent l’impression d’être restés bloqués dans leur jeunesse : Joey Tempest nous effectue des grands écarts, joue au pole dance avec son micro, saute sur les baffles pour approcher le public et lui tendre sa guitare… Il semble avoir été mis sous blister pendant quarante ans. Malgré le fait que la formation ne soit pas en tête des ventes de 2015, l’assemblée est présente et fidèle depuis des années. Il y a des familles, des sexagénaires aux cheveux grisonnants dans tous les coins de l’arène, qui se dandinent et reprennent les refrains tel que celui de “Carrie”, qui semble figer dans le temps et émeut ceux qui pensaient que leur grade d’adulte les dispenserait d’un cri adolescent à l’entente des premières notes. La bonne humeur du groupe est communicative. Tempest s’amuse même à tendre le micro à l’un des vigiles, ce qui fait rire tout le monde. Montrant ainsi que la joie peut vaincre la terreur, il lance un “Pray for Paris!”, à la fin d’un “The Final Countdown” magistralement repris d’une seule voix par une salle désormais remplie, avant de laisser place au rideau de Scorpions.
SCORPIONS, qui fête son cinquantième anniversaire, est d’humeur festive ce soir. Pourtant, alors que les musiciens entrent sur scène, sur un son d’alarme, c’est en noir qu’ils sont habillés. Seul Klaus Meine (chant) arbore un brassard bleu-blanc-rouge, en signe de solidarité. Le second morceau sera aussi accompagné d’un fond tricolore et de ses premières paroles : “Nous sommes de retour à Paris malgré les événements tragiques. Mais ce soir, nous sommes debout ensemble, nous célébrons la vie, dans un esprit d’espérance et de paix”. Suite à quoi il se met à lancer des baguettes de batterie. Musicalement, ces légendes sont irréprochables, et les années n’entachent pas leur talent, bien au contraire. Considérant ce parcours, justement, le frontman se souvient : “J’ai l’impression qu’hier nous étions encore des gamins rêvant de tournée, et finir en tête d’affiche !”, et constate que la moitié de l’auditoire levé les a déjà vu.
Ce lien particulier entre Scorpions et la France explique facilement l’émotion du groupe par rapport aux récents événements. Lors de “Send Me An Angel”, le nouveau symbole de Paris illustre la phrase “In the land of the morning star”. L’osmose est parfaite. “Wind Of Change” est repris à l’unisson, tandis que la formation saute sur les rebords afin d’accéder au plus près de ses fans, leur faire des sourires, les saluer, leur donner des goodies… Le tout, dans la bonne humeur, à jouer de la guitare au sol ou dans le dos. La vigueur et dévotion sont magnifiques à voir.
Mais la surprise de la soirée surviendra après l’envolée de la batterie, pour le solo de James Kottak : il se sert un verre et crie “Santé !” avant de jouer les notes de “La Marseillaise”, reprise par l’arène entière, debout, la main sur le coeur, l’émotion à son comble. Ce qui vaudra un tonnerre d’applaudissements au batteur, avant qu’il ne saute sur son kit et ôte son T-shirt sur lequel est inscrit “Rock & Roll Forever”, pour dévoiler son tatouage identique. Les autres reviennent : Rudolf Schenker (guitare) a sorti la guitare à fumée, les musiciens se donnent à fond, car “People in France, there’re “No One Like You”!”. Le rappel sera l’occasion de jouer leurs morceaux phares, présentés comme une lettre d’amour aux Français : “Ce soir, nous sommes tous unis pour la paix et l’espoir. “Still Loving You”, Paris !”, “Now it’s time to “Rock You Like A Hurricane”!”. Ces titres sont repris unanimement, et Klaus revêt un drapeau français pris dans la foule. Bien qu’au fil du live, les tenues se soient davantage colorées, montrant que la musique prend le pas sur la morosité, c’est avec les couleurs de la France sur des tenues noires qu’a débuté et fini le show.
Ce soir, les combos ont magnifiquement rendu hommage au pays endeuillé qu’est la France, et ont montré que le rock n’roll n’était pas mort, pas plus que Scorpions. Bien au contraire, le groupe a encore de nombreuses années devant lui, car tant qu’il y aura des coeurs prêts à la joie, il vivra. Tout comme nos valeurs et notre pays. Paris est une fête, l’AccorHotels Arena en a été l’exemple ce 24 novembre. Et nous avons été servis comme des rois.
Setlist :
Going Out With A Bang
Make It Real
The Zoo
Coast To Coast
Top Of The Bill / Steamrock Fever / Speedy’s Coming / Catch Your Train
We Built This House
Delicate Dance
Always Somewhere / Eye Of The Storm / Send Me An Angel
Wind Of Change
Rock ‘n’ Roll Band
Dynamite
In The Line Of Fire
Kottak Attack
Blackout
No One Like You
Big City Nights
—-
Still Loving You
Rock You Like A Hurricane