Impossible d’échapper à l’effervescence de la campagne promotionnelle orchestrée par Halsey, où elle s’est mise dans la peau, un à un, de tous les héros qu’elle incarne sur les réseaux sociaux. Cher, Kate Bush, Dolly Parton, Amy Lee, David Bowie et la célèbre Britney Spears, mise en lumière dans le clip de “Lucky”, ont provoqué un véritable buzz. Avec cette stratégie audacieuse, Halsey signe son grand retour avec son cinquième album, The Great Impersonator, un disque conceptuel qui se présente comme une ode vibrante à ses icônes musicales, tout en révélant une profondeur insoupçonnée.
Une tapisserie sonore ambitieuse
Ce projet ambitieux, composé de dix-huit morceaux, nous plonge dans un univers où chaque chanson est un hommage vivant à une personnalité artistique que la chanteuse “personnifie” (d’où le titre). On ressent l’empreinte de PJ Harvey dans “Dog Years” et l’esprit de Stevie Nicks dans “Panic Attack”. Certaines références sont plus explicites que d’autres; dans “I Believe In Magic”, Halsey modifie subtilement sa diction, évoquant ainsi l’essence de Dolly Parton, même si le style musical ne la rapproche pas directement de la reine de la country. Ce concept, initialement intimidant, se révèle être une célébration de l’héritage artistique, permettant à Halsey de livrer ce qui semble être son album le plus personnel à ce jour.
Un duel de concepts
Décrire The Great Impersonator en quelques mots s’avère être un défi, tant il s’agit de deux disques conceptuels en un, chacun s’opposant à l’autre. D’un côté, nous avons l’hommage aux idoles de Halsey, et de l’autre, un thème central alimentant l’ensemble : l’angoisse brute et palpable. La tonalité sombre de l’album aborde des sujets graves, les épreuves accumulées par la chanteuse au fil des années insufflant une émotion forte, une véritable collection de vulnérabilité. Halsey n’évoque pas seulement son alter ego artistique, mais nous présente Ashley Frangipane, qui tente de se dissimuler derrière ces icônes. Certains morceaux comme “Lonely Is The Muse”, d’une puissance confessionnelle saisissante, laissent supposer qu’après avoir écrit certaines des chansons les plus intimes de sa carrière, Halsey a décidé d’apporter une touche plus ludique à cette superposition musicale, équilibrant ainsi le cœur brisé avec des instants de légèreté.
Une réflexion personnelle éblouissante
Dès les premières notes, l’album nous enveloppe dans une douceur poignante. “Only Living Girl In LA” révèle une Halsey à la fois vulnérable et délicate, portée par une mélodie planante et des paroles d’une intensité désarmante. La production, à la fois époustouflante et nostalgique, nous invite à un voyage expérimental. Le voyage est long, et aux styles bien différents, l’écoute de The Great Impersonator peut s’avérer laborieuse et dissipée, mais le tout reste une œuvre complète. La reprise du titre “Letter To God”, déclinée sur trois années différentes, incarne à elle seule un concept profondément personnel. Produite aux sons des années correspondantes, celle de 1983 est enregistrée en live, concept populaire à cette époque, tandis que celle de 1974 est en son feutré, comme sur les vieux enregistreurs. Toutes les trois versions traitent de l’évolution de Halsey dans sa vie et sont produites avec le même refrain. Un “Please God” évolutif sur sa maladie commence par “I’ve gotta be sick” et se conclut par “You’ve gotta be sick“. Des morceaux lourds et poignants qui se perdent dans la masse mais portent toute la souffrance et le génie de Halsey.
The Great Impersonator se dresse ainsi comme une œuvre longue mais complexe et riche, où Halsey navigue habilement entre l’hommage à ses héros et l’exploration de ses propres démons. Cet album ne se contente pas d’être un simple projet conceptuel : c’est un voyage à travers sa vie et ses tourments, qui demande plusieurs longues réécoutes des dix-huit morceaux. C’est aussi une véritable odyssée musicale, un miroir de ses luttes intérieures et un témoignage de sa résilience. Halsey réussit à fusionner le ludique et le tragique, offrant à l’auditeur une expérience sonore à la fois cathartique et inoubliable.
Informations
Label : Columbia Records
Date de sortie : 25/10/2024
Site web : www.halseymusicstore.eu
Notre sélection
- Arsonist
- Only Living Girl In LA
- Ego
Note RUL
4/5