Groupe acclamé pour sa qualité scénique, Royal Republic a su rallier à lui de nombreux partisans lors de prestations enlevées. Une réputation de bête de scène qu’il partage avec Skip The Use, invité de luxe des Suédois ce soir. Venus à Paris nous présenter leur dernier album, LoveCop (2024), les natifs de Malmö remporteront-ils tous les suffrages ?
Skip The Use
“Je sais ce que vous vous dites : mais qu’est-ce qu’ils font là, ceux-là ?“. Effectivement, les mots de Mat Bastard font écho à notre belle surprise initiale. Alors que nous avons généralement affaire à des groupes peu référencés en ouverture, la production a mis les petits plats dans les grands en invitant SKIP THE USE. Fidèles à leurs habitudes, les Nordistes n’ont qu’un objectif en tête : communiquer leur énergie. Et à la vue du début du concert, ce n’est effectivement pas de trop ! Arrivant sur “People In The Shadow”, le banger ne génère pas le mouvement escompté. Pas de quoi décourager son leader, qui va alors dérouler une mécanique dont il maîtrise tous les rouages. Premièrement, réchauffer les cordes vocales en challengeant chaque côté de l’audience (“Damn Cool”, “Cup Of Coffee”). Deuxièmement, séparer la foule en deux pour lancer un “mur de câlin“. Une belle façon de rassembler les plus téméraires au cœur de la fosse.
Mais pas question de laisser quiconque de côté. Ainsi, c’est TOUTE la salle qui sera déportée à gauche, puis à droite, dans une joyeuse cohue. Et pour embarquer le tout, la formation nous a préparé une version très rock de “J’t’Emmène Au Vent”, qui achève de mettre le feu. Besoin de reprendre son souffle ? L’accalmie prend alors la forme d’un clapping géant sur le célèbre “Ghost”. Enfin, pas question de se quitter sans finir “comme des connards“. Et alors que les connaisseurs s’apprêtent à célébrer la “Bastard Song”, Mat décide de les rejoindre, se transformant en épicentre d’un circle pit géant. Un moment toujours aussi jubilatoire, point d’orgue d’une mission une nouvelle fois accomplie. Cerise sur le gâteau, le groupe nous confie être actuellement en studio pour préparer son nouvel album. Avec le retrait imminent de leurs potes de Shaka Ponk, voilà une belle nouvelle pour la scène rock française.
Royal Republic
Bénéficiant de ce superbe lancement, ROYAL REPUBLIC arrive face à une assemblée chauffée à blanc. La fosse est d’ores et déjà sur ressorts au lancement de la doublette “My House” / “Lovecop”. Les fans de LoveCop ne sont pas dépaysés, puisqu’ils retrouvent la même entame que sur cet album. Ce dernier est largement représenté, avec pas moins de huit titres joués ce soir. Arborant une guitare lumineuse et des tenues assorties, les Suédois ont longtemps été comparés à leurs compatriotes de The Hives. Pourtant, ils ont peu à peu délaissé cette étiquette, en s’éloignant du rock survolté des débuts pour une ambiance plus dansante. Cela se reflète d’ailleurs sur la setlist, où de nombreux classiques en font les frais. “Underwear”, “Everybody Wants To Be An Astronaut”, ou encore “Make Love Not War” sont ainsi victimes de ce changement de régime. Même l’acclamé Weekend Man (2016) est amputé de certains morceaux emblématiques. Il peut néanmoins compter sur “Getting Along” et “Baby” pour faire monter l’ambiance au stade suivant.
L’auditoire vibre à l’unisson et se donne à cœur joie de contredire le thème du régressif “Stop Movin'”. Dans la fosse, pas une seconde de répit n’est accordée. Aussi remuant que les pogos, Adam Grahn se montre particulièrement drôle tout au long du set. Il nous confie ainsi être désespéré d’être dans un groupe sans la moindre histoire… alors qu’il cherche désespérément à obtenir l’avertissement “parental advisory” sur sa pochette ! C’est dans cette perspective qu’il affirme avoir écrit le morceau suivant. S’ensuit alors l’interprétation théâtrale du loufoque (mais heavy) “Freakshow , dans lequel le frontman évoque le fait de “te manger vivant au coucher du soleil“. Toutefois, le réel tremblement n’est pas à chercher du côté de l’effroi, mais plutôt au niveau du sol, à l’occasion d’un “Full Steam Sex Machine” faisant jumper La Villette.
I wouldn’t stop movin’ if I could stop movin’
Déterminée à ne pas laisser retomber l’ambiance, la formation s’emploie à diversifier les formats. À mi-parcours, tous les musiciens rejoignent ainsi l’avant-scène pour revisiter deux titres en version acoustico-bucolique. À l’instar du grand renouvellement de setlist, cette session iconique n’intègre plus “Addictive”. Néanmoins, cela donne l’occasion au public de montrer au groupe qu’il sait donner de la voix sur les récents “Wow! Wow! Wow!” et “Boomerang”. Mention spéciale au second guitariste, transformé pour l’occasion en joueur de kazoo, puis d’harmonica. Nous quittons ensuite cette sympathique ambiance champêtre pour voyager vers l’Hollywood des années 50, le temps du classieux “Electra” et ses faux airs de film noir.
Cette parenthèse passée, Adam décide qu’il est temps de se rapprocher de son public. C’est armé de son micro (et d’une petite plateforme) qu’il fend la foule pour chercher un partenaire. Son choix se porte alors sur une jeune femme, qu’il équipe d’une percussion. Le Zénith leur adresse un beau soutien tandis qu’ils interprètent dos à dos la dynamique “Ain’t Got Time”. Comment reprendre le fil après ce moment suspendu ? En dégainant “Fireman & Dancer” et le classique “Tommy-Gun”, qui met la salle sens dessus dessous.
Masters of Puppets
Décidément infatigable, le quatuor expédie très vite le rappel pour revenir à la vibe 80’s qui caractérise son dernier album. Le gentiment kitsch “Lazerlove” sera le dernier moment d’accalmie, avant une reprise survitaminée de “Battery”. “Si vous n’aimez pas la chanson, ne nous blâmez pas, blâmez Metallica !” prévient, rieur, Adam. Le jeu de lumières est somptueux et appuie parfaitement le déferlement de frappes et de riffs. Les “ohohoho” sont de rigueur, tant en fosse que côté gradins. Pourtant, ce sont d’autres onomatopées qui ont la charge de mettre un point final à la prestation. Alors que le public a commencé à l’entamer, c’est en effet un “RATA-TATA” scandé à pleins poumons qui fait vibrer les murs. Un gimmick qui se poursuivra bien après la fin du morceau, semblant toucher en plein cœur le groupe.
“Après toutes ces années à faire de la musique, la seule raison de notre présence, c’est vous“. Le plaisir est palpable dans les gestes et discours des musiciens, qui improvisent même des pas de danse et un karaoké sur la musique de sortie. Royal Republic aura donc réussi son pari, rassemblant initiés et débutants autour d’un moment de vivre-ensemble cher à Skip The Use. Royal, tout simplement.