Stick To Your Guns – Keep Planting Flowers

Difficile de ne pas apercevoir une ironie divine entre les incendies ravageant la Californie et la sortie de Keep Planting Flowers par le groupe du même état, Stick To Your Guns. La réalité rattrape encore plus vite la fiction en ce qui concerne les artistes engagés. Un peu moins de trois ans après Spectre (2022), la formation punk hardcore de Orange County vire au rouge en débarquant fraîchement chez SharpTone Records avec ce nouvel album.

A tombeau tout vert

Huitième disque, un changement d’écurie, et la bande de Jesse Barnett n’en démord pas. Et on débute l’écoute par… Le bruit de la terre retournée par des outils de jardinage ? Pourquoi pas ! Du moment qu’un larsen retentit pour faire débouler un accord bien lourd. Pile dans les temps, la session rythmique fait mouche. De par son titre, “We All Die Anyway” arrache un haussement d’épaules et conforte dans le postulat de départ. De par sa musique, il est difficile de garder sa nuque attachée. Adam Galindo, le dernier venu de la formation, tabasse les fûts avec précision. L’alchimie fait son effet, le quintette est prêt à en découdre.

S’il y a un point à applaudir avec cet album, c’est une production beaucoup plus musclée qu’avec les précédents. En outre, rendons au producteur Beau Burchell les honneurs qu’il mérite. Musicien et producteur prolifique depuis la fin des années 90, ce dernier apporte un punch providentiel . Et si vous donnez du corps, l’approche n’en est que plus frontal. Les bases de punk hardcore sont ici distillées avec des influences proches du trap metal. Le deuxième titre, “Spineless”, en est l’exemple le plus probant. Son introduction à base d’un riff strident signé Josh James percuté par la basse musclée d’Andrew Rose est efficace pour illustrer l’urgence écologique abordée.

Cultiver son jardin

Au fur et à mesure que les minutes avancent, une légère lassitude est ressentie. Pour un disque de moins de vingt-cinq minutes, c’est fort de café. Est-ce un défaut d’ordre dans les chansons ou parfois des choix qui appuient sur des mélodies trop similaires ? Car si les transitions sont exemplaires, la musique ne l’est pas toujours. “Severed Forever” a du potentiel, mais finit par laisser indifférent. Chaque morceau n’a pas vocation a être une hymne de fosse. Quant au morceau éponyme, difficile de le prendre au sérieux avec cette exécution. La ballade aux notes claires trahit un excès de bons sentiments fusionnant avec la voix de Jesse Barnett qui semble hors de propos. Mais c’est une prise de risque pour le groupe qui propose quelque chose de différent avec ces deux titres.

Et l’évolution passe également par le fond. Du nihilisme primaire du début, plus grand chose n’en transpire. Bien que les opinions politiques ne soit pas plus nuancées, la façon de l’exprimer l’est quand on prête attention aux paroles. Loin des slogans bruts, les textes de cet album sont plus introspectifs, plus subtils, mais pas moins incisifs. Bien sûr, on retrouve la critique acerbe de l’individualisme qui gangrène notre société. Par contre, l’accent est particulièrement mis sur les potentielles solutions que les mises en lumière des problèmes que tout le monde connaît.

En prendre de la graine

Les années Pure Noise Records derrière eux, Stick To Your Guns démontre qu’il leur reste bien plus d’une balle dans leur barillet. Bien qu’ils sévissent depuis plus de deux décennies, il n’est pas question de se reposer sur ses lauriers. La réputation du groupe est d’ailleurs plus solide en live qu’en studio, malgré de bons disques comme Diamond (2012) et plus récemment Spectre. Une nouvelle ère démarre, et sur les chapeaux de roues !

Avec Keep Planting Flowers, l’artillerie de Stick To Your Guns dépend d’une formule un brin répétitive pour un disque au demeurant cathartique. Sans bouder son plaisir sur la courte durée de ce solide album, l’ensemble est ici trop monochromatique pour marquer de plein fouet son audience. Malgré tout, hors de question de se plaindre d’un travail de bonne facture.