Après la rêverie atmosphérique de Somnia (2022), le trio irlandais post rock God Is An Astronaut était de retour en 2024 dans un style plus conforme à sa palette sonore : Embers renoue avec le dynamisme habituel de la formation en proposant un univers de sonorités et d’émotions coloré.
Retour aux bases
Si Ghost Tapes #10 (2021) mettait à l’honneur la facette la plus frontalement rock du groupe et que Somnia (2022) se présentait au contraire comme une berceuse onirique, c’est bien dans l’alternance entre ces deux imaginaires créatifs que les disques de God Is An Astronaut trouvent leur élégance : des morceaux comme “Fragile” (All Is Violent, All Is Bright, 2005), “Vetus Memoria” (Helios / Erebus, 2015) ou “Mortal Coil” (Epitaph, 2018) symbolisent toute la richesse sonore élevant l’écoute de leurs albums respectifs.
Embers propose plusieurs passages caractéristiques de cette habileté dans le contraste : dans “Apparition”, l’ouverture, une explosion métallique et saturée répond aux sonorités lumineuses de la guitare introductive. “Odyssey” et “Oscillation” reprennent le même schéma avec un riff efficace et impérieux de mi-chanson, rappelant les aventures les plus rock d’un Pure Reason Revolution. A la complexité de certains arrangements, God Is An Astronaut sait répondre avec l’accessibilité d’un climax plus simplement rock. A ce titre, comment ne pas évoquer de suite le riff menaçant et redoutablement addictif de “Embers” ? Après s’être superposé sans crier gare à des nappes synthétiques et texturées, il ouvre la voie à un enchevêtrement de passages où guitares et synthés, plus saturés les uns que les autres, se répondent de leur liberté tandis que le trottement tranquille de la basse permet au morceau de retomber sur ses pattes. Le tout se clôture par une batterie qui ne tient plus en place et se munit désormais du premier rôle, soutenue tour à tour par des cordes frottées et des guitares.
Fidèle à ses inspirations post rock, le groupe privilégie un univers sonore dans lequel la batterie joue le rôle de chef d’orchestre au milieu des guitares texturées pour dicter la cadence et le registre d’intensité, parfois rejointe par des riffs plus frontalement heavy.
En pleine odysée
Les variations d’intensité ne sont pas uniquement instrumentales : les couleurs et les ambiances se répondent pour former un disque oxymorique, alternant entre des tonalités lumineuses et des ambiances plus chaotiques.
Si les premières minutes se déroulent dans une ambiance plutôt chaleureuse, un son de guitare grinçant et orientalisant récurrent confère aux trois chansons d’ouverture une allure mystique. “Heart Of Roots” tranche avec celles-ci en se munissant d’une introduction épurée et en joignant à sa guitare basse un piano cristallin semblable à la percée d’un rayon de soleil d’entre les nuages. Là où la première moitié de l’ensemble assume une intensité plutôt ouverte, “Embers” impose une atmosphère menaçante et ombrageuse à laquelle “Realms”, en featuring avec le violoniste Jo Quail (aussi présent sur la très atmosphérique “Prism”), répond de son calme mélancolique et cinématique. God Is An Astronaut nous surprend une dernière fois avec “Hourglass” en préférant à une fin en apothéose un salut tout en délicatesse, porté par un piano d’une immense douceur.
L’album donne la sensation d’assister au récit musical d’une épopée, lui conférant une dimension cinématique et dramatique que God Is An Astronaut parvient à maîtriser sans prétention. Une nouvelle fois, sans tomber dans un intellectualisme migraineux, ses compositions compensent largement l’absence de voix par des arrangements d’une grande finesse et des progressions dotées d’une charge émotionnelle certaine.
Informations
Label : Napalm Records
Date de sortie : 06/09/2024
Site web : www.facebook.com/godiaa
Notre sélection
- Embers
- Heart Of Roots
- Hourglass
Note RUL
4/5