Japanese Breakfast – For Melancholy Brunettes (and sad women)

Après l’éblouissant et singulier Jubilee (2021), Michelle Zauner sous l’alias de Japanese Breakfast, fait son grand retour avec son second album, For Melancholy Brunettes (& sad women). Ce nouveau disque marque une rupture audacieuse avec la pop enjouée qui a fait sa renommée, nous entraînant dans un univers mélancolique plus désenchanté que jamais.

Retour aux sources

Loin des cuivres enivrants et des rythmes entraînants de son prédécesseur, on laisse place à une guitare plus douce et des arrangements cordés qui évoquent un univers plus introspectif. For Melancholy Brunettes (& sad women) s’affirme comme le Yin de Jubilee, son Yang lumineux. Ce changement de cap s’explique en grande partie par la collaboration avec le producteur et guitariste Blake Mills (Bob Dylan, Fiona Apples, Perfume Genius). On ressent cette nouvelle direction avec notamment “Picture Window” soutenu par une guitare délicate et un fond de banjo, qui nous plonge dans un univers à la fois frais et nostalgique. Le morceau “Men In Bars”, en featuring avec l’acteur et chanteur de country Jeff Bridges, confirme ce virage vers des sonorités folk country, où la voix unique de Michelle se déploie avec une intensité renouvelée. Les ballades intimistes (“Mega Circuit”, “Little Girl”, “Leda”) révèlent délicatement son abandon de la pop pour la guitare acoustique et s’avère séduisant.

Fade out ou l’inachevé

Ce tournant délaissant la pop pour un retour à la guitare sèche est une réussite, c’est dans la production que l’album laisse entrevoir des réserves. Les morceaux ne dépassent quasiment pas les quatre minutes, à l’exception de “Honey Water”, qui rappelle avec brio le meilleur de Japanese Breakfast. Le morceau d’ouverture, “Here Is Someone”, est indéniablement poétique et teinté d’une certaine mélancolie, on se laisse volontiers porter ces claviers et flutes éthérées prêts à suivre Japanese Breakfast dans sa nouvelle épopée musicale. Malheureusement, son fade out laisse en suspens, comme si une promesse n’était pas tout à fait tenue. “Orlando In Love” partage cette même sensation d’évanescence, avec une dream pop délicate portée par des violons et des chœurs qui s’éclipsent trop rapidement, en seulement 2 minutes 25. “Winter In LA” qui resplendit aussi par sa mélodie et ses cordes en fond mais elle aussi se heurte à cette frustration lorsque les percussions s’accentuent tandis que le fade out nous pousse indéniablement vers la fin. 

For Melancholy Brunettes (& sad women) est un album qui, tout en s’éloignant des rivages ensoleillés de la pop de Jubilee, nous invite à explorer des profondeurs émotionnelles insoupçonnées. Un retour aux sources et à la guitare pour Japanese Breakfast mais qui laisse aussi un léger sentiment d’inachevé, comme une promesse encore à réaliser.