L’un des groupes emblématiques de la scène nu jazz fait son grand retour cette année. Comblant un vide discographique de douze années avec leur quatrième album “To Believe”, sorti il y a tout juste quelques jours, les Anglais en ont profité pour entamer une tournée européenne qui faisait un heureux détour par le Casino De Paris.
Entre les deux sets électro de l’Américain PBDY, on retrouve sur scène un autre nom tout aussi énigmatique qui intéressera davantage le public.
Le duo français UTO, accompagné en concert par un percussionniste, joue dans un registre entièrement électronique, passant sans arrêt d’un trip hop musclé à de la dream pop plus sombre que d’ordinaire. Entre de lourdes rythmiques et des passages relativement apaisés sur lesquels se greffe la voix habitée de la chanteuse, parfois détournée par les machines, les contrastes musicaux sont de mise et le groupe assure une première partie prenante.
Il était temps que les membres de THE CINEMATIC ORCHESTRA reprennent sérieusement du service. Le projet “To Believe” a commencé à voir publiquement le jour il y a déjà trois ans, avec la sortie d’un titre éponyme superbe et prometteur en featuring avec le chanteur américain Moses Sumney. C’est précisément par un extrait de ce nouvel album, “Lessons”, que les Londoniens ouvrent leur set. L’un après l’autre, les instruments s’accrochent au rythme de la batterie saccadé et entêtant.
On remarque que la troupe de six musiciens est ce soir en formation réduite par rapport à ses derniers passages parisiens de 2015 et 2016, où une section de cordes apportait encore plus de relief, mais cela n’altèrera en rien la qualité du concert. Sans transition, “Man With The Movie Camera” est accueillie par de nombreux cris et applaudissements du public, comme le seront systématiquement les trop peu nombreux extraits des trois premiers albums. Brillant tout autant que l’impeccable saxophoniste Tom Chant, Luke Flowers n’en finit pas de déployer son jeu redoutablement fluide et précis derrière les fûts.
Depuis la droite de la scène, Jason Swinscoe lance les morceaux, signale aux autres quand arrêter les boucles et s’occupe de la communication – restreinte – avec l’audience, en bon chef d’orchestre. C’est lui aussi qui introduit la chanteuse principale de la soirée, Frida Touray. La voix de la jeune femme se prête très bien à l’interprétation de parties de chants qui ne sont à l’origine pas les siennes, ainsi de “Wait For Now / Leave The World”, autre extrait du dernier disque dans une veine plus douce et contemplative.
Prenant le temps de se développer dans la longueur, invitant à la rêverie, la musique de The Cinematic Orchestra offre peu de moments de véritable éclat. Tout se joue dans les ambiances et les couleurs que renvoient les longues plages instrumentales, comme dans ce retour aux tout débuts du groupe avec “Channel 1 Suite”. Mais les chansons comportent également leur lot de beauté, et on le constate encore lorsque le guitariste et collaborateur de longue date du collectif, Grey Reverend, se place ensuite sur les devants de la scène pour chanter et jouer l’envoûtante “Zero One / This Fantasy”.
La virtuosité des musiciens nous en met à nouveau plein les oreilles et les yeux avec l’instrumental “Flite”, génialement haletant, issu de “Every Day”. Tom Chant se lance dans son traditionnel solo de saxophone dont Swinscoe s’empare pour construire la transition qui mène à “Familiar Ground”, l’unique extrait de “Ma Fleur” joué ce soir. Passé la longue montée en puissance qu’est “A Promise”, le moment est déjà venu de suivre le protocole des fins de concert. Le rappel est malheureusement limité au strict minimum avec un titre, même si “All That You Give” pose le point final idéal de la soirée.
The Cinematic Orchestra se fait bien trop rare sur les scènes françaises et est porteur d’une solide réputation en live. Mais même si on regrette seulement une setlist trop courte pour couvrir au mieux l’ensemble des vingt années de carrière du groupe, les Londoniens sont arrivés les bras pleins de promesses et les ont tenues haut la main.
2 commentaires
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Ah ben raté, vous êtes partis trop vite, il y a eu un deuxième rappel !
Oups… En effet, ils ont joué Ode to the Big Sea !