Chroniques

Haken – Visions

Après “Aquarius”, premier album salué par la critique mais passé quelque peu inaperçu auprès du grand public, les anglais d’Haken reviennent à la charge à peine plus d’un an plus tard avec pour objectif de surpasser leur premier effort. Mission impossible ?

Comment faire mieux que “Aquarius” ? La question a bien dû traverser quelques têtes… Le concept album aquatique propose une histoire forte, beaucoup de variété – tant dans les emprunts stylistiques qu’au niveau des émotions qu’il procure – et une maîtrise technique que ne renieraient pas les plus grands groupes du metal progressif. Sans parler de perfection, il est aussi difficile de parler de défauts. Pour “Visions”, la seule solution est donc de repousser les limites et de développer encore plus les points forts du groupe.

Heureusement, on aime le challenge, chez Haken. Dans un style où la dominante est toujours le metal progressif, “Visions” nous dévoile une approche encore un peu plus émancipée, peut-être plus riche en riffs lourds que sur “Aquarius”, mais aussi par moment plus jazzy, puis plus groovy, plus théâtrale… Bref, plus. Mais à aucun moment cette surenchère ne se fait au détriment des mélodies (superbes), l’ensemble reste toujours très naturel, frais, spontané. Si les idées sont partout, elles sont délivrées avec aplomb et maestria, sans esbroufe. L’atmosphère développée par Haken est toujours très profonde, et riche en caractère. La mélancolie, le doute, le mystère, le rêve sont dépeints de manière quasiment palpable à travers chaque note, et ce son limpide fait bien plus qu’inviter au voyage. Dès “Premonition”, ouverture instrumentale de l’album, c’est bien la musique qui guide l’auditeur, avant de l’aspirer définitivement avec l’intensivement progressif “Nocturnal Conspiracy”, où on remarque par ailleurs un Ross Jennings en pleine forme. L’ambiance et les breaks monstrueux de “Insomnia”, “Portals”, “Shapeshifter” ou “Deathless” ne font par la suite que renforcer l’étreinte, et racontent l’histoire tout autant que les paroles. Le plus discret “Mind’s Eye” pourrait paraître moins utile, mais sa position centrale lui permet de servir au mieux la construction de l’album – et sur ce point également, Haken brille. L’humeur très changeante du disque lui permet de ne souffrir d’aucun temps mort, et le fait que les pistes plus courtes soient regroupées au centre de l’album n’y est pas pour rien. Cette construction très dynamique permet de profiter tout autant d’un “Portals” qui ne tient pas en place au milieu de l’album que d’un “Deathless” doux et mélancolique juste avant les 22 minutes de l’épique “Visions” qui conclut l’opus.

Mission accomplie ? Contre toute attente, Haken parvient à hausser son niveau de jeu sur tous les terrains, en nous livrant un (nouveau) joyau taillé à part égale à coup de guitares mordantes, de clavier, de basse, de batterie et de chant. Un concept album très progressif, brillamment construit et mature, dont l’histoire est vivante, et qui ne tombe pas dans la complexité bien qu’il se montre extrêmement riche. De quoi forger la légende d’Haken dans le metal progressif ? Oh oui. Haken n’est plus un espoir, mais bien un cadre du genre en puissance, et “Visions” est probablement la meilleure offrande que le petit monde du progressif nous ait amené cette année, tout comme “Aquarius” l’était l’an dernier. 

Informations

Label : Sensory Records
Date de sortie : 25/10/2011
Site web : www.hakenmusic.com

Notre sélection

  • Portals
  • Shapeshifter
  • Visions

Note RUL

5/5