Le quartette de violoncellistes et batteur finlandais opère un retour aux sources avec “Cell-0”. Un concept album instrumental construit autour de l’idée de la cellule originelle dont nous parle Mikko Sirén.
Ce nouvel album semble être le résultat d’un processus de “retour aux sources” pour le groupe. Peux-tu nous en dire un peu plus ?
Mikko Sirén (batterie) : Nous devons revenir un peu arrière pour retrouver le point de départ de cette idée. En 2015, nous avons sorti “Shadowmaker”, c’était le quatrième album d’affilée avec des chanteurs. Cela faisait dix ans que nous tournions avec des chanteurs et nous avons réalisé que c’était le vingtième anniversaire de notre premier album “Plays Metallica By Four Cellos”. Nous avons donc décidé de faire une sorte de célébration et de jouer une vingtaine de concerts.
Ici en France, vous avez joué au Grand Rex, puis au Hellfest.
Mikko : Oui ! Nous pensions jouer vingt concerts, mais lorsque nous avons annoncé les dates, nous avons rencontré une énorme demande. Les gens voulaient voir le spectacle et nous avons fini par jouer deux-cent cinquante concerts. Quand on a joué ces concerts, c’était un peu comme revenir sur les racines mêmes d’Apocalyptica. Nous avons pu constater que les gens étaient impatients de nous voir jouer les choses avec lesquelles nous avons commencé. Plus nous sentions la réaction des gens, plus nous sentions que nous devions en faire plus. Cela a lancé la conversation sur la composition d’un album instrumental. Pour remercier nos fans pour le soutien qu’ils nous apportent. Plus nous y pensions, plus cela nous semblait idéal. Nous avions besoin que la tournée se termine pour avoir le temps libre nécessaire à l’écriture de l’album.
Nous avons commencé à écrire ces morceaux de metal progressif, instrumentaux. Nous voulions utiliser les instruments de toutes les manières possibles. Nous voulions mettre l’accent sur toutes leurs fonctionnalités. C’était le point d’origine artistique.
Les changements de rythmes, d’ambiance et d’humeurs sont particulièrement présents dans “Cell-0″. Cela semble refléter une autre façon de transmettre les émotions et la complexité des sujets sous-jacents. Vous avez choisi de faire un album concept. Peux-tu expliquer les thèmes qui le sous-tendent ?
Mikko : “Cell-zéro”, c’est comme ça que ça se dit. C’est une particule fabriquée. Tout l’album parle des particules et de la façon dont elles grossissent et se combinent pour devenir des entités. Comment elles se rencontrent et se séparent à nouveau. “Cell-0” est comme la particule de Dieu. Une particule que vous ne pouvez pas définir. Si vous prenez des cellules pour les mettre les unes à côté des autres, vous pouvez créer des formes. Vous pouvez créer quelque chose, mais cela ne crée pas la vie. La musique est créée à partir de minuscules particules. Rythmes, notes, pauses, vous les assemblez et c’est presque une chanson, mais ce qui manque, c’est l’âme de la chanson. Quelque chose qui met l’émotion dans l’image.
Une autre chose est que ces particules font vraiment partie de la pochette de l’album. La couverture représente un violoncelle en train d’exploser. Il met en évidence toutes les petites choses qui le constitue. Les êtres humains sont vraiment doués pour fabriquer de petites choses, comme les micro-puces. Nous avons maîtrisé cette compétence, mais en même temps, nous utilisons encore plus d’énergie, plus d’argent pour séparer les choses. Nous investissons plus dans les industries pétrolières que dans les industries médicales. Nous créons des guerres plutôt que de soigner les personnes qui meurent de faim. C’est de cette manière que nous séparons toutes les particules. Ces thèmes, qu’il s’agisse de l’environnement ou de la politique, sont ce dont nous avons discuté lors de notre tournée. L’empathie et le respect de la nature et des animaux sont des choses que les humains ont perdues au cours de ces années. Nous devons les récupérer si nous voulons continuer.
Le monde évolue maintenant dans une direction négative. Nous n’aurions pas pu le prédire il y a dix ans. Personne ne pouvait voir à quelle vitesse tout pourrait changer. Comme nous sommes un groupe instrumental, nous n’avons pas de paroles, nous ne pouvons transmettre des messages que par le biais de notre musique, de nos albums et de nos titres de chansons. C’est tout ce que nous donnons et le reste c’est aux autres de l’écrire. Il n’y a pas d’histoire, il y a des idées.
Chacun est donc libre de construire l’histoire qu’il perçoit lorsqu’il écoute votre musique. Une autre manière de transmettre vos messages consiste à utiliser les illustrations de l’album que tu as mentionnées précédemment.
Mikko : Peut-être plus que jamais auparavant nous voulions que l’album soit comme une entité. Tout est connecté. Dans le livret, chaque morceau correspond à une peinture. Il y a en a neuf. C’est vraiment joli et cela fait partie du monde de “Cell-0”. Nous sommes en train de créer l’expérience live de l’album et nous utiliserons tout ce matériel.
Par exemple, pour la chanson “En Route To Mayhem”, quel genre d’illustration avez-vous ?
Mikko : J’essaie juste de penser et je ne me souviens plus. (rires) L’idée de la chanson est comme la chanson, divisée en deux parties. Le début est tentant, presque comme une danse semi-érotique. Il s’agit de trouver quelle est ta position et de découvrir celle de l’autre. Cela mène à ce chaos, qui est le résultat d’un mauvais choix de chemin. C’est une force qui est là pour nettoyer, mais elle est tellement puissante qu’elle balaie tout sur son passage.
Des titres comme “Rise” constitué d’un mot peuvent amener à de nombreuses idées. Quelle est la première idée qui te vient à l’esprit pour ce morceau ?
Mikko : Quand j’ai entendu ce morceau pour la première fois, j’ai dit à Eicca : “c’est lumineux, c’est de l’espoir, c’est une promesse, tout ira bien”. C’est le morceau le plus positif de tout l’album. J’étais ravi parce que normalement, Eicca ne compose pas de tels morceaux. C’est frais et il a su se renouveler en tant que compositeur. C’est ma chanson préférée du disque. Mais le titre est “Rise”. Peu importe la manière dont on vous a mis à terre, vous pouvez toujours vous relever. C’est comme ça que je le vois. Mais c’est moi. Tu devrais regarder la vidéo que l’on a faite pour ce titre, c’est comme un film d’art, j’adore.
Vous avez soutenu la campagne Greenpeace à Rock In Rio 2008. Es-tu aussi personnellement impliqué sur les questions environnementales ?
Mikko : Je suis du genre à me battre pour les personnes plus faibles ou en détresse. Je ne suis pas un militant écologiste, je serais un hypocrite en disant ça. Je trouve extrêmement important que les gens se battent et protègent ce qui leur semble précieux. Cette semaine, je regardais “Rattle And Hum” de U2, tourné à la fin des années 80. À l’époque, ils étaient super politiques et ont pris position contre l’IRA, l’Apartheid. La passion qu’ils avaient pour leur cause était une force motrice. Et j’ai pensé : “Où sont les groupes qui ont quelque chose à dire de nos jours ?” Kendrick Lamar a quelque chose à dire tout comme quelques autres artistes afro-américains. Il y a une certaine apathie générale, les gens ne se battent plus pour rien. Cela me vient à l’esprit car tous les albums de U2 se terminent par “rejoignez Greenpeace, rejoignez Amnesty International”.
Je pense que ce serait injuste si, en tant que groupe, nous n’essayions pas de rendre les choses un peu meilleures. Greenpeace a une façon de faire les choses un peu extrême. Mais ils se battent contre des entreprises encore plus extrêmes. Je soutiens ce qu’ils font, ils ont fait un travail très précieux.
Vous dites que vous êtes contre la guerre et la violence, mais vous venez de faire un duo avec Sabaton. D’une certaine manière, on peut voir ce groupe comme faisant l’apologie des grandes guerres. C’est presque une façon de romancer la guerre.
Mikko : J’ai beaucoup réfléchi à ça. Je n’ai rien vu qui romance vraiment la guerre. Ils ont choisi de chanter sur ce sujet. Ils chantent des histoires dans ce domaine. Pour moi, il était important qu’ils n’aient rien à voir avec la guerre. L’ambiance générale dans le public est d’ailleurs super positive.
Parlez-nous un peu plus du duo et de la manière dont vous avez travaillé ensemble.
Mikko : C’était génial. Leur bassiste est venu voir notre spectacle à Madrid. Il a eu cette idée de travailler ensemble. Il trouve ennuyeux la manière dont les groupes conçoivent leurs tournées ensemble. Il recherchait une manière de faire un peu plus inclusive. Amaranthe commence le spectacle, Eicca vient jouer avec eux, puis Elize joue avec nous, puis nous jouons avec Sabaton. Tout est lié.
Nous avons fait ensemble le titre “Angels Calling”, fait une reprise de “Fields Of Verdun” et il y a d’autres projets communs à venir.
Lorsque vous jouez ensemble cela donne un côté grandiose, très théâtral.
Mikko : Absolument, très théâtral. Ils ont déployé beaucoup d’efforts pour créer leur scène.
Et enfin, dernière question : nous sommes “RockUrLife”, donc qu’est-ce qui rock ta life ?
Mikko : Mes amis et ma famille.
Site web : apocalyptica.com