Ben Harper & Charlie Musselwhite – Get Up!

Ben Harper est de retour avec un douzième album studio, enregistré en Californie en compagnie de Charlie Musselwhite, harmoniciste de légende du blues américain. L’album est en quelque sorte un pèlerinage pour Ben Harper, puisant aussi bien dans le blues, la country et le gospel. Des styles musicaux qui l’ont influencé dès le début de sa carrière et qui l’ont amené à collaborer avec des légendes vivantes, de Taj Mahal à John Lee Hooker. Profondément engagé, “Get Up!” s’inscrit dans la dynamique de ses précédents disques puisque l’on retrouve à ses côtés son groupe Relentless7, qui l’accompagne depuis 2008.

Dès le premier morceau, “Don’t Look Twice”, une atmosphère venue tout droit du détroit du Mississippi claque le conduit auditif. Avec un départ à cheval entre Chris Thomas King & T-Bone Walker, le titre dérive et se laisse emporter, tout en douceur, par le son de l’harmonica. La voix part dans les aiguës et la guitare Dobro joue les descentes harmoniques, le chant du travailleur de 1910 se fait sentir, pas de doute, tous les codes du blues traditionnel sont présents. Le disque suit le rythme (& blues) en passant tantôt par du delta blues, sec et saccadé, sur “I’m In I’m Out And I’m Gone”; tantôt par du blues gospel, tel que “We Can’t End This Way”, où chœurs, harmonica et clappements de mains se marient à la perfection. Rupture oblige, avec “I Don’t Believe A Word You Say” aux sonorités très rock. La voix hurlante de Ben Harper répète la phrase-titre, pendant que l’harmonica de Charlie Musselwhite et la guitare électrique se livrent un duel blues haut en couleurs, englobé par une batterie qui tient la baraque. Ben Harper explose, puis se calme, fidèle aux ballades qui l’ont fait connaître du grand public : “You Find An Other Lover” offre une structure très proche de “Diamonds On The Inside”, et, où l’harmonica amène toute la dimension blues. Ben Harper va chercher au plus profond de sa culture musicale, retourne à l’essence même du blues, mélange les genres et obtient des bijoux musicaux tels que “I Ride At Dawn” et “She Got A Kick”. Un vrai concentré de O’Brother, pour les cinéphiles. Le premier tire son style de groupe évangéliste a cappella comme The Fairfield Four et implose, tout en retenue, dans un délire Bluesgrass dont seul Ralph Stanley avait la recette, jouissif ! Le second associe les styles de Chess Record et Sun Record, à mi-chemin entre Muddy Watters et B.B. King ! L’album se termine parfaitement, avec “All That Mather Now”, comme un réveil en douceur après le songe d’un voyage transcendantal sur la route du blues. Le soleil se lève sur le bayou, la tête embrumée par un trop-plein d’alcool frelaté, le rocking chair attend patiemment sur le porche, la guitare et l’harmonica à ses côtés… On s’y croirait.

Dire que “Get Up!” est un excellent opus de blues serait un euphémisme. Ben Harper et Charlie Musselwhite livrent ici un hommage techniquement et artistiquement irréprochable sur l’histoire du blues. De Albert Collins à Howlin’ Wolf en passant par Robert Johnson, tous les grands noms du blues sont savamment ovationnés, titre après titre, et style après style. Mention spéciale à l’harmonica, toujours juste et qui ne dérive jamais dans une omniprésence agaçante. “Get Up!” est tout simplement une déclaration d’amour au blues : addictive, mélancolique et sincère.