Paganella – Bingo

Paganella est un trio pop rock qui puise ses sources dans les 90’s et trouve son équilibre dans la féminité des harmonies pop et l’énergie virile et électrique d’un rock puissant. En 2007, Paganella enregistre son premier LP “J’ai Pas Vu La Nuit Passer”, à l’époque où le groupe n’était qu’un duo. Marqué par le plaisir et la spontanéité, cet album livre la vérité brute, sans pudeur et sans complexe, d’un combo en voie d’épanouissement. Avec la fraîcheur d’une nouvelle formule qui intègre Jonathan Lamarque à la batterie, le trio a enregistré son deuxième album, “Bingo”, avec Denis Barthe à la réalisation (Noir Désir/The Hyenes).

“Le Goût Du Fiasco” lance l’assaut avec une britpop qui explose tout en retenu, alliant riffs électriques tranchants et une énergie vocale désenchantée proche des cool kids de La Femme, sans oublier un texte excellent, à prendre au second degré. “Bingo” suit cette lancée avec une musicalité proche de l’univers de Zazie, les guitares saturées en plus. Un peu plus grunge, “Comme Une Eponge”, entre bonhomie et alcoolisme, se rétame sur le refrain, en s’embourbant dans une pop rock en baisse de régime. “Misanthropes” commence comme un bon vieux Joy Division, avant de retomber également au refrain. “L’Envie De Disparaître” prend le pas inverse en s’amorçant avec une intro en douceur, mais cette fois, le refrain accroche, par le biais d’une pop aérienne de haute volée, avant de s’enflammer sur des riffs garage. “Artisan Du Corps” se fait plus rock californien, avec une rythmique proche de The Offspring à ses débuts et une guitare surf rock. Le refrain veut encore une fois exploser mais manque de punch et offre un marasme musical, dommage car la parabole sur la prostitution est bien écrite. “Que Ce Soit Classe”, livré tel une suite cachée de “Artisan du Corps” est un réel bijou d’inventivité, la patte Noir Désir est bien présente, surfant entre noise rock, indus et pop, Paganella offre ici une intro expérimentale éblouissante par son minimalisme stratosphérique. Maintenant les choses qui fâchent : heureusement que les textes sont de bonne facture, rappelant Axelle Renoir (B.O. du film “Les Jolies Choses”), car sur un tiers de l’album la musique retombe, et les exemples ne sont que trop nombreux. “A L’Ombre Du Frêne”, titre vaporeux et soporifique, proche d’Archimède. “Génie”, dans la même lignée commence à se réveiller au bout de deux minutes par le biais de “AAAHHHHHHH”, mais le refrain, aussi lancinant qu’énervant, vous fera passer à la piste suivante avant de pouvoir en profiter. “B’S’B” se lance dans un medley à cheval entre Brigitte et The Plasticines, au secours ! “Risque Zéro”, dernier titre de l’opus, n’inverse pas cette tendance, la basse et la guitare se lancent des piques toute en douceur, avant de s’autodétruirent mollement à l’arrivée du refrain, et cette fois, même les textes ne sauveront pas Paganella.

“Bingo” est un album bipolaire entre talent et facilité décevante. Entre influence savamment distillée et plume mélancolique brillante, Paganella pèche trop souvent par ses refrains sans saveur et son ambiance morose. Ce qui est triste, car des titres comme “Le Goût Du Fiasco”, “Artisan Du Corps” et “Que Ce Soit Classe” méritent les éloges alors que “Risque Zéro” et “Génie” ne méritent que les oubliettes. Un groupe à suivre et qui se doit à lui-même de meilleurs titres pour son prochain album.