C’est devenu une tendance de plus en plus marquée, bien qu’objectivement rarement de bon goût. La doudoune sans manches ? Certes, mais il s’agit ici du fait de découper des œuvres en plusieurs parties. Cette démarche est en effet souvent synonyme d’un manque de tri, laissant à l’auditeur le loisir de piocher dans un ensemble inégal. A Day To Remember tombera-t-il dans cet écueil avec son Big Ole Album Vol. 1 ?
Seum Vol. 1
Pour comprendre cet album, il faut le mettre en perspective avec l’accueil très mitigé de son prédécesseur. Malgré la présence de quelques bangers, (“Permanent” notamment), You’re Welcome (2021) a cristallisé les critiques des fans et de la presse. Ces réactions ont visiblement largement irrité son leader, Jeremy McKinnon, qui a décidé de régler ses comptes. Finie la positivité de YW, les Floridiens sortent les griffes d’entrée avec “Make It Make Sense” (“Tout le monde essaie de me gâcher la fête. Beaucoup de paroles, mais rien à dire. Je ne laisserai pas passer ça, non, pas aujourd’hui“). Le son est lourd, le refrain reste en tête. Ce morceau dispose d’une réplique un peu plus loin, avec “Miracle”. On retrouve avec plaisir ce titre dévoilé en 2022, portant le sceau du son lourd et accrocheur caractéristique du groupe.
Dans ce registre, “Bad Blood” coche lui aussi toutes les cases. Débutant par un son de cloche présageant du meilleur, ce rouleau compresseur achève de nous convaincre de son potentiel live. “Feedback” accélère le tempo pour enfoncer le clou sur cette thématique de revanche, incitant les détracteurs à garder leurs retours négatifs de l’album précédent pour eux. (“If I want you’re feedback, I’ll let you know motherfucker“). La tension retombe avec “All My Friends”, qui sonne comme un hymne aux soirées entre amis. Un vrai clin d’œil à l’époque What Separates Me From You (2010), qu’on imagine sans peine s’insérer en fin de concert.
Quelques innovations bienvenues…
Si la (superbe) pochette compte de très nombreuses références aux influences de cet album, la variété se retrouve également côté production. On retrouve ainsi des collaborateurs de Linkin Park, Knocked Loose ou encore Bring Me The Horizon. Oli Sykes a même contribué directement au disque, envoyant une mélodie qui deviendra le titre “Die For Me”. Bien lui en a pris, car ce morceau emo punk (évoquant clairement le style de l’album amo des Anglais) s’avère ultra efficace.
On pourrait également croire que Boston Manor est à l’origine de l’ovni “Silence”. L’intro nous saisit par son chant aérien, avant de basculer dans un death metal d’une lourdeur façon Gojira. Une initiative aussi surprenante que rafraîchissante ! Difficile après ça d’adhérer au très anecdotique “Closer Than You Think”, tant il semble éculé sur la forme comme sur le fond. On met ici le doigt sur la principale faiblesse de l’ensemble : son manque de personnalité.
…ne masquant pas un manque d’originalité pénalisant
A Day To Remember est en effet l’un des porte-drapeaux de la fusion metalcore/pop punk, ayant contribué à l’avènement d’une kyrielle de groupes se réclamant de leur direction. Dès lors, chaque livraison est jugée à l’aune de cet héritage. Et force est de constater qu’une bonne moitié des titres ne sont pas assez marquants.
On aurait pourtant adoré écrire que le morceau “Lebron” est un “Miami Hit“. Si les fans de NBA salueront la métaphore du morceau (“Ramène un autre dub pour ma ville et cours, comme si on était en 2016 et que j’étais Lebron“), le single se veut tellement accrocheur qu’il en devient générique. La conclusion “Closer Than You Think” donne également la désagréable impression qu’elle aurait pu être écrite par n’importe quelle formation pop punk de ces quinze dernières années.
Côté paroles, la très pop “Flowers” verse dans une mièvrerie assez rebutante (“Pourquoi est-ce si dur de décrocher le téléphone pour dire à quelqu’un qu’on l’aime ?”), laissant place à un pont screamé très peu inspiré. L’expérimentation électronique de “Same Team”, bien qu’imparfaite, a au moins le mérite d’un peu sortir des sentiers battus, pour nous envoyer un refrain enthousiasmant, suivi d’un break dévastateur. On ne peut pas en dire autant de la très musclée “To The Death”, qui ne s’approche jamais de la justesse cathartique de Homesick (2009).
Si cette première partie est loin d’être catastrophique, elle est indéniablement moins marquante qu’espérée. Les membres de A Day To Remember maîtrisent leur sujet, mais ne s’émancipent pas des canons d’un genre auquel ils ont tant apporté. Espérons que son second volet, déjà en cours d’écriture, lui apporte un lustre renouvelé.
Informations
Label : Warner Music
Date de sortie : 21/03/2025
Site web : adtr.com
Notre sélection
- Miracle
- Die For Me
- Bad Blood
Note RUL
3/5