Architects – Lost Forever // Lost Together

Après la dérive mainstream particulièrement mélodique et épurée du quatrième album “The Here And Now” (2011), le groupe metalcore fondé en 2004 semble s’être repris dans la sortie de son septième essai “Lost Forever // Lost Together” le 11 mars dernier sur Epitaph Records, produit par Fredrick Nordström (In Flames, Bring Me The Horizon).

L’opus s’introduit sur quelques notes de guitares à la texture rock n’roll mélodique sombre et bascule soudainement dans une rythmique effrénée, “Gravedigger” est le fer de lance de l’ensemble; le chant de Sam Carter répond à des épellations punk hardcore délectables, couplé à un chant clair qui apparait par touches discrètes dans ce premier morceau. Le quatuor de Brighton refait le choix pour cette nouvelle galette de thématiques abordant religion, jeunesse perdue et système asservissant. Elle suit un agencement metalcore logique dans ses compositions en intercalant break-down, double pédale, passages de chant et moments épiques de guitares, pour un résultat qui fonctionne. “Naysayer”, “Gravedigger” et “The Devil Is Near” sont des morceaux bien charpentés; “The Devil Is Near” se déclare titre de l’effort, avec ses élans de chœur et son énergie. Cette piste est faite pour la performance live, sa composition ménage collages sonores et bridges bien menés auxquels s’ajoute une ligne mélodique à travers des envolées aiguës de guitares, pour se rompre brusquement dans sa finale, avant de laisser place à une majestueuse intégration de violons et cordes. “Broken Cross” débute dans une nébuleuse synthétisée pour se précipiter dans une atmosphère plus brutale formée de double pédale à foison et d’un growl amer. Les anglais s’autorisent aussi leur digression électro avec l’instrumental “Red Hypergiant” qui nous embarque dans son atmosphère lunaire. Des bons morceaux qui sont malheureusement pour la majeure partie d’entre eux trop entravés pas un chant clair souvent trop implorant et larmoyant. “C.A.N.C.E.R” en est l’illustration avec ses moshparts puissants et ses guitares cisaillantes qui nous poussent dans l’urgence, pour être finalement entravé par un passage de chant clair crié, trop vibrant d’émotion, qui amène une légèreté dissonante dans un morceau où l’aspect brut l’emportait de façon appréciable. Comme un véritable cancer, cet effet regrettable se déploie dans le reste de l’essai. C’est le cas de “Colony Collapse” qui est ainsi délesté de toute virilité, tout comme “Dead Man Talking” qui s’enveloppe d’un growl plus grave couplé au chant de Carter, lui donnant des dimensions spectrales et glaciales, mais se range au final parmi les titres à la composition classique et sans saveur, avec son chant clair classique et pop. Même chose pour “Castle In The Air” où le groupe, plus que de l’effleurer, tombe complètement dedans, ainsi que “Youth Is Wasted On The Youth” qui est aussi happé dans ce chant inopportun, après une apparence de spoken word, même s’il parvient à se rattraper en dernière issue par une rythmique lente mais massive. “The Distant Blue” ne déroge pas aux sonorités de l’album, faisant feu d’un metalcore plutôt classique mais particulièrement imposant dans son corps instrumental avec des guitares tourmentées et une batterie stricte, conduites par un growl écorchant. Le morceau prend véritablement sa fonction de clôture en amorçant la fin de l’opus dès la moitié du titre; un fond spatial qui se voit constellé de quelques notes de guitares et d’une ligne de basse, mais rapidement recouvert par un beat et un chant clair qui ferment l’album sur un bémol regrettable.

“Lost Forever // Lost Together” n’est pas un mauvais disque, Architects aiguise petit à petit son style, sans pour autant signer une évolution flagrante. Ce nouvel opus s’intègre sans encombre dans la discographie du groupe, mais, pris tout seul, demeure quelque peu inerte. La formation est actuellement en pleine tournée européenne et notre capitale en marquera la fin le 16 avril à La Maroquinerie.