Hangman’s Chair – Saddiction

Avec Saddiction, Hangman’s Chair poursuit l’exploration entamée avec A Loner (2022) et livre le deuxième volet d’une trilogie qui s’annonce aussi immersive que tourmentée. Ce septième album affine encore davantage l’équilibre entre lourdeur écrasante et envolées atmosphériques, confirmant la capacité du groupe à transcender les frontières du doom rock et du shoegaze.

Des morceaux plus éthérés

Toujours ancrée dans un doom rock aux teintes shoegaze et post metal, la musique du groupe s’enrichit ici de nouvelles nuances, oscillant entre lourdeur écrasante et envolées planantes. Dès les premières notes de “To Know The Night”, une tension hypnotique s’installe. Le morceau démarre de manière puissante avant de s’arrêter net. Cette construction du morceau illustre bien le savoir-faire du groupe, qui joue sur l’attente et l’émotion pour mieux nous happer. Le riff principal, massif et pesant, se dissout dans un refrain aérien où la voix de Cédric Toufouti se fait plus éthérée. La respiration fait place à un sentiment d’urgence jouissif. A l’inverse, “The Worst Is Yet To Come” ne laisse jamais partir son intensité. Comme si l’espoir cherchait une place pour apparaitre sans jamais trouver une manière de percer.

Les Parisiens livrent un disque concept où la tristesse devient une dépendance. Le titre apparaît comme une évidence avec cette contraction de sadness et addiction. Les paroles de Saddiction prolongent les obsessions et souffrances du groupe. Parfaite incarnation de l’esprit torturé en proie à des pulsions et des insomnies ravageuses, “2 AM THOUGHTS” frappe fort. Morceau écrit en collaboration avec DOOL, il retranscrit avec justesse les nuances de cet état. “In Disguise” interpelle par sa longue intro qui plante un décor très urbain. La douceur de la voix amène une touche de mélancolie qui lutte pour trouver un rai de lumière. Tout au long de l’ensemble cet espoir semble combattre une spirale aspirante. mais parviendra t-il à prendre le dessus ? Le morceau de clôture, “Healed?” vient poser cette question qui reste sans réponse.

Une dimension visuelle toujours plus soignée

Musicalement, le groupe poursuit sa mue en intégrant davantage d’éléments shoegaze à son socle doom rock. Les guitares, toujours lourdes et saturées, s’habillent désormais d’un voile plus atmosphérique. L’utilisation d’une basse 6 cordes vient accentuer l’impact des passages les plus pesants. Cela donne une profondeur abyssale aux morceaux les plus sombres. L’utilisation de ce nouvel instrument a poussé Cédric Toufouti a changé la tonalité habituelle de ses lignes de chant. Il en ressort une voix plus poignante et plus fragile. Sur “Neglect”, l’un des titres les plus marquants de l’album, le contraste entre les arpèges lumineux et les passages plus lourds est amplifié une voix habitée. La musique du groupe possède cette capacité à transporter l’auditeur dans un monde froid et bitumé.

L’identité d’Hangman’s Chair passe aussi par son impact visuel. Le quatuor a confié la réalisation du clip de “Kowloon Lights” à Dehn Sora. L’artiste est bien connu pour son esthétique obscure et onirique. L’utilisation de la 3D apporte un regard inédit. Il retranscrit cette ville si dense aux lumières intense, avec une vision macro pour aller ensuite s’intéresser à des individus qui la peuple. Un lieu où l’espoir semble avoir déserté les rues, laissant les habitant en proie à leurs addictions et dépendance. Cette attention portée aux atmosphères confirme que Saddiction n’est pas qu’un disque, mais un véritable projet artistique global. La musique, les paroles et l’image s’entrelacent au profit d’une réflexion introspective poignante.

Avec Saddiction, Hangman’s Chair livre un travail encore plus abouti sur les textures et les émotions.