L’inclassable Gautier Serre ouvre de nouveau les portes de son univers breakcore électro baroque. Véritable ovni de la scène metal française, l’artiste ne se pose aucune limite pour explorer ses envies créatrices.
Un baroque hors norme
Dès le premier titre de l’album “Downgrade Desert”, les influences orientales se font très présentes. Renforcées par l’utilisation d’instruments traditionnels, elles apportent un charme envoûtant et servent de fil rouge.
“Nervous Waltz” s’ouvre sur des parties classiques très inspirées de Lully, adossées à des chœurs cérémonieux. Tout est ensuite cassé par des riffs death metal avant de repartir sur une partie chantée et arabisante, tout en tension. Le retour des riffs bien lourds ne préparent pas à une fin de titre en mode 8 bits. Un parti pris pas forcément heureux sur un morceau pourtant très maîtrisé.
Incongru est peut-être le terme le plus pertinent pour un morceau comme “Musette Maximum”. De la musette avec une batterie de death, il fallait y penser. Un interlude improbable, qui calme le jeu après le death de “Parpaing” et le chant de George “Corpsegrinder” Fisher de Cannibal Corpse. Un titre assez classique, perturbé par des inserts de musique 8 bits.
Igorrr déploie également son sens très personnel de l’humour avec le détonant “Kung-Fu Chèvre”. Véritable délire musical, l’artiste intègre musique traditionnelle, beats débridés, vociférations et bêlements de chèvre pour un résultat indescriptible.
Un album ambitieux mais inégal
“Spirituality And Distortion” présente des morceaux relativement courts et expérimentaux comme “Very Noise” ou “Musette Maximum”. D’autres titres affichent une ambition plus marquée. C’est le cas de “Himalaya Massive Ritual”. Les instruments tibétains sont bien exploités. Le travail sur les chants est remarquable, il soutient une forme de recherche de spiritualité. L’ambiance grave de la fin n’offre pas de résolution.
“Paranoid Bulldozer Italiano” révèle un florilège d’éléments indus. Le growl et l’ambiance malaisante à souhait contrastent avec les passages baroques qui mêlent clavecin et chant lyrique. Le résultat est singulier et terriblement efficace. Conséquence de sa place dans le disque, “Barocco Satani” apparaît comme une composition qui repose sur des formules classiques, sans prise de risque.
D’autres titres comme “Lost In Introspection” peinent à accrocher l’oreille. “Camel Dancefloor” mêle bien metal et oriental, sans pour autant parvenir à être saisissant.
Un univers enrichi de collaborations multiples
“Spirituality And Distortion” rassemble divers musiciens tels que le violoniste Timba Harris, le bassiste Mike Leon (Soulfly, ex-Havok), le pianiste Matt Lebofsky ou encore Mehdi Haddab à l’oud. Ce dernier est un élément phare de “Spirituality And Distortion”, la délicatesse de son jeu vient sublimer les influences orientales.
Au niveau du chant, “Kung-Fu Chèvre” marque le retour de Pierre Lacasa et Jasmine Barra, qui avaient déjà collaboré sur “Vegetable Soup” et “Cheval” sur “Savage Sinusoid” (2017). Laure Le Prunenec et Laurent Lunoir continuent leur éclatant travail avec Igorrr. La participation la plus délicieusement inattendue reste celle de George Fisher.
Igorrr continue d’explorer les chemins du possible dans son univers baroque et expérimental. A la croisée des genres, il livre un album singulier qui ne manquera pas de diviser les adeptes de musique extrême !
Informations
Label : Metal Blade Records
Date de sortie : 27/03/2020
Site web : igorrr.com
Notre sélection
- Himalaya Massive Ritual
- Paranoid Bulldozer Italiano
- Nervous Waltz
Note RUL
4/5