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Jack White – No Name

Il est rarement plus agaçant qu’une personne aimant Oasis et qui se trouvait à Rock En Seine en 2009. Parce que si on commence à poser les vraies questions : où étiez-vous quand vous avez appris la séparation de The White Stripes en 2011 ? Si la batteuse sous-estimée Meg White manque cruellement à nos oreilles, Jack White ne cesse de nous régaler en tant que musicien et producteur.

Hello operator

Cela fait plusieurs semaines que la rumeur court. La clientèle de Third Man Records à Nashville s’est vue offrir avec ses achats un mystérieux vinyle le 19 juillet dernier. Pochette blanche, No Name peut se distinguer en police bleue sur l’étiquette du disque. Couleur depuis 2012 de la carrière solo du guitariste chanteur, le bruit de couloir s’est intensifié pour être confirmé hier. Une communication soudaine qui n’est pas sans rappeler Radiohead et la sortie de In Rainbows (2007). Cependant, le leader charismatique privilégie l’indépendance à l’innovation.

Même si le disque est présent sur toutes les plateformes de streaming depuis ce vendredi 2 août minuit, les fameuses premières copies se retrouvent déjà sur Discogs pour des milliers d’euros. Pas la peine de regarder sur le site de la Fnac, vous ne trouverez un exemplaire en vinyle que chez certains disquaires. Les réservations ne sont pas d’usage pour cette référence. Demain, il sera déjà trop tard. Oubliez les jeux de piste de Taylor Swift, c’est une opération marketing de guérilla. Pour le dernier album de celui qui a participé à redorer les lettres de noblesse du blues et du garage rock, cela reste intriguant.

Raw power

Montée progressive parsemée de slide sur sa six cordes pour un riff blues et une série de riffs bien épais, “Old Scratch Blues” accroche. Le premier morceau pose directement les bases tout en répondant à lui seul à une autre question. Est-ce un retour aux sources ? Si on en juge par le solo énervé, le changement de tempo, la voix, et surtout le son, oui. De là à ressortir de son étui sa guitare Ress-O-Glass Airline et la brancher à une pédale Electro-Harmonix Big Muff Pi, il n’y a qu’un pas. Le jeune prodige du vintage et du système D résonne à travers nos enceintes de nouveau. Pas le Jack en costume qui peut se perdre en expérimentation depuis douze ans, mais celui en T-shirt qui écoute The Stooges sur son auto-radio.

Car ce que nous retrouvons sur ce disque, c’est l’insolence. Revisiter la culture blues avec talent et une certaine forme d’arrogance, c’est l’essence de la musique du sale gosse de Détroit. Un titre comme “It’s Rough On Rats (If You’re Asking)” brille par sa simplicité et une dose d’humour pince-sans-rire. Un rythme qui traverse les jambes pour finir sa course le long de la colonne vertébrale. On danse, et on savoure.

Dead live & The sacred ground

L’ensemble est produit sur une progression d’accords et une sonorité plus grande que nature. Un rythme haletant qui ne propose que de rares pauses, comme avec “Underground” qui ne peut nous empêcher de taper du pied. Treize titres qui font mouche en un peu moins de trois quarts d’heure. Même en tant que parolier, Jack White revient à son amour des paroles cryptiques, et aussi frontalement bibliques. Tout ça pour une écoute qui ne nécessite pas d’être religieuse. Le sermon déchaîné de “Archbishop Harold Holmes” à l’appui.

En effet, ce n’est pas la terre sainte mais clairement un terrain connu. Adepte des formules décalées comme “Tonight (Was A Long Time Ago)” et du sens du spectacle avec le charisme d’un prédicateur possédé, nul doute que chaque nouvelle chanson va déchaîner les passions en live. Bref, chassez le naturel, il revient sous forme d’un album. Pas question de trébucher sur les mêmes gammes pentatoniques, elles sont domptées depuis longtemps. John Anthony Gillis de son nom complet sait toujours faire du neuf avec du vieux. Mais si la composition reste décomplexée, le maestro se met toujours au défi. C’est peut-être son secret pour ne pas dénaturer son œuvre.

My 7th son only breaks his favorite toys

No Name est un album bleu qui flirte avec le rouge et le blanc d’antan. Vu que Jack White n’a heureusement pas que trois couleurs à sa palette, il demeure un des musiciens les plus intéressants de sa génération. Surtout quand il délivre la surprise de l’année 2024. On peut même dire qu’il balance l’épuré.

Informations

Label : Third Man Records
Date de sortie : 02/08/2024
Site web : jackwhiteiii.com

Notre sélection

  • Old Scratch Blues
  • It’s Rough On Rats (If You’re Asking)
  • Missionary

Note RUL

 4,5/5

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