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Last Train – Original Motion Picture Soundtrack

Il faut croire qu’ils ne se reposent jamais. Un tout petit peu plus de deux ans après sa dernière sortie et sa dernière tournée, Last Train revient sur le devant de la scène avec un projet ambitieux, orchestral, de toute beauté.

La dernière sortie du groupe était le majestueux et épique “How Did We Get There?”, morceau fleuve de dix-huit minutes, progressif, rythmé, émouvant… Et beaucoup d’autres adjectifs dithyrambiques. Le single augurait du bon dans la direction que pouvait prendre Last Train sur son prochain projet, notamment par la participation de l’Orchestre Symphonique de Mulhouse. Que le futur du quatuor soit orchestral ou pas, rien qu’imaginer où les Alsaciens pourraient aller est excitant.

Lorsque l’annonce de ce Original Motion Picture Soundtrack a été faite, avec encore une fois la participation de l’orchestre mulhousien, les idées les plus folles ont traversé l’esprit. Aura-t-on droit à un album à la Muse, avec des titres tantôt rock tantôt orchestraux ? Une tournée ? Peut-être plus tard. Sur ce troisième album (ou bien peut-on parler d’interlude dans sa discographie ?), Last Train prend un vrai contre-pied de ce à quoi l’on pouvait s’attendre.

Jeu de piste orchestral

Le concept de Original Motion Picture Soundtrack (OMPS pour les intimes) a quelque chose, justement… D’original. Le disque prend la forme d’un jeu de piste pour l’auditeur. Une sorte de chasse aux références à différents morceaux du quatuor. D’abord projet presque récréatif de Jean-Noël Scherrer, OMPS prend des morceaux de Last Train pour les dépiauter, les disséquer et les arranger à la sauce orchestrale. Et inclut dans le même temps, ça et là, des bouts de nouvelles compositions spécialement imaginées pour l’ensemble.

Les titres des morceaux sont souvent limpides (“Golden Songs” devient “Golden Years”, “Tired Since 1994” devient “1994”, etc.), ce qui aide à identifier certaines références. D’autres sont dissimulées dans les morceaux et il n’est pas aisé de reconnaître du tac au tac des motifs. C’est aussi cela qui rend l’écoute plus ludique : on cherche, on compare, histoire de savoir déceler les références. Parfois même, des motifs apparaissent dans un morceau qui n’a à priori rien à voir. Le refrain de “I Only Bet On Myself” sur “We Finally Did Get There”, par exemple.

Rock-estre

L’album s’écarte du rock “à la papa” auquel nous étions habitués de la part des Alsaciens. Même avec ce côté cinématique et ses différentes sections, “How Did We Get There?” avait encore un pied dans le genre. Sur ce troisième disque, le rock et le groupe viennent se mettre en retrait pour laisser briller l’orchestre. Ce n’est pas toujours le cas, cependant. Quand ce ne sont pas les sonorités électroniques présentes sur “Hate & Loathing”, ce sont bien les instruments rock qui font leur apparition. Et parfois, c’est la voix de Jean-Noël qui s’immisce dans tout cela, le temps de reprendre quelques lignes de ses propres morceaux, comme sur “Heroin”.

Pour le reste, le véritable acteur de cet album est l’Orchestre Symphonique de Mulhouse. Les arrangements sont impressionnants de justesse. Les moments calmes sont d’une beauté émouvante, les moments de tension jouent parfaitement leur rôle, etc. Les envolées de cordes sont, bien sûr, exceptionnelles. La qualité du travail d’arrangement et d’interprétation donne même, lorsque le lâcher-prise est de mise, l’impression d’écouter une œuvre symphonique des plus grands compositeurs. La fin de “We Finally Did Get There” en particulier. Un pur régal. À tel point que le seul bémol est de regretter que l’équipe de Cernay n’ait pas plus lâché les chevaux. Mais c’est aussi là la force du disque, car les moments de calme avant la tempête sont tout aussi délicieux.

Exit Music (For A Film That Doesn’t Exist)

Décrit comme la bande-son “d’un film qui n’existe pas“, Original Motion Picture Soundtrack fait justement regretter l’absence de ce film. Certes, il y a le documentaire qui retrace l’élaboration de ce disque, mais ce n’est pas tout à fait la même chose, même si la réalisation et le montage rendent ces morceaux encore plus vivants. Le travail d’arrangement et d’orchestration opéré à la fois par le duo Jean-Noël Scherrer/Rémi Gettliffe et par Fabien Cali et Victor Jacob donne le même niveau d’excitation, d’implication que lorsqu’on regarde un film ou que l’on en écoute la bande-son.

Il est assez difficile de prédire quel avenir et quel héritage aura un album. Pour celui-ci, il y a comme une évidence. C’est celui qui va encore solidifier la position de Last Train comme perle du rock français, même si OMPS est un peu à part. C’est un grand disque qui montre que le groupe n’a pas peur de prendre des risques et surtout s’en sort avec brio. Autrement dit, c’est d’ores et déjà un classique.

Vers la sortie (et au-delà ?)

En guise de bonus, le groupe nous offre tout de même un morceau qui tranche avec le reste de cet album. “Way Out (Bonus Track, OMPS Version)”. Encore une adaptation d’un titre faisant déjà partie du catalogue de Last Train, et un de ses plus connus de surcroît. La partie instrumentale ainsi que le chant de Jean-Noël sont revus pour proposer une lecture paradoxalement plus lascive et un brin sinistre. Autant dire tout de suite que ce n’est pas une direction qui déplairait, au contraire.

Puis vient l’explosion finale, tous amplis hurlants, qui remet un peu les idées en place : oui, Last Train est toujours un groupe de rock, et la suite ne devrait pas décevoir à ce niveau-là.

Informations

Label : Last Train Productions / Modulor
Date de sortie : 17/05/2024
Site web : www.lasttrain.fr

Notre sélection

  • We Finally Did Get There
  • Pursuit
  • Hate & Loathing

Note RUL

 4,5/5

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Corentin Vilsalmon
J'aime la musique, j'aime écrire, pourquoi ne pas allier les deux ?