S’il fallait résumer Letlive., les comparatifs à d’autres groupes seraient de légion tant la formation semble être un puit sans fond à influence. De Glassjaw, en passant par Rage Against The Machine, le quatuor de Los Angeles a été présenté comme les dignes héritiers de représentants musicaux alliant folie dans leurs compositions et engagement social certain. La bande de Jason Butler propose depuis 2011 (on ne comptera pas le tout premier album pas franchement écoutable) un post hardcore racé, influencé par diverses sources. Ils reviennent cette année avec “If I’m The Devil…”, troisième effort studio estampillé Epitaph Records, avec une grosse envie d’ouvrir la bouche pour ne pas dire que des banalités.
Dès “Good Mourning, America”, premier single lâché par Letlive., on avait compris que le groupe n’avait pas envie d’abandonner le caractère social et politique de sa musique. Avec des textes percutants, évoquant les violences policières envers la communauté afro-américaine survenues ces dernières années, les Californiens rentrent dans le tas avec un son moins violent qu’avant mais toujours aussi catchy avec ces choeurs féminins hyper urbains pour ouvrir la chanson. Dans la même veine, “Nü Romantics” propose le même Letlive. hyper catchy et pop qui fait parfaitement le lien avec les disques précédents, amorçant tout de même un changement majeur dans la violence des compositions. Car, comme déclaré maintes et maintes fois en interview, le combo a mis plus d’un an à composer cet album, naviguant entre les conflits artistiques qui créaient des désaccords entre les membres. Et la conséquence néfaste de ce processus est que l’ensemble est moins spontané que ses grands frères, ce qui pourra en rebuter certains. Ceux qui aimaient le Letlive. qui partait dans tous les sens auront moins de matière sur laquelle jumper dans cet essai.
Ces critiques passées, “If I’m The Devil…” n’est pas du tout un mauvais effort pour autant. Car si la formation a perdu en spontanéité, elle a surtout gagné en maturité et en qualité de songwriting. Letlive. a toujours été un groupe capable de rendre catchy n’importe quelle chanson, mais le nombre de morceaux réellement aboutis n’était pas aussi élevé. C’est désormais chose faite. Rien que l’ouverture de ces onze pistes, “I’ve Learned To Love Myself”, retraçant l’enfance chaotique de Butler suit une progression à foutre des frissons à n’importe quel mosheur de base. Les instruments s’ajoutant petit à petit, à mesure que l’intensité du chant se densifie jusqu’au paroxysme total et l’entrée des cordes. Une merveille. Il en est de même pour “Foreign Cab Rides” qui prend le rôle de la ballade de l’opus avec une efficacité monstre et un refrain qui prend aux tripes. Le mix de l’album est volontairement axé sur la voix de Butler qui ne crie que très peu (“Another Offensive Song” fait office d’exception et est un hommage brillant à Rage Against The Machine) et a vraiment progressé dans son approche des mélodies. Le résultat est assez bluffant sur la très sombre “If I’m The Devil…” ainsi que sur l’hispanisante “A Weak Ago”.
En bref, Letlive. sort un album abouti. Si le résultat est moins percutant que ce à quoi le groupe de Los Angeles nous avait habitué jusqu’à aujourd’hui, les chansons progressent pour prendre un tournant légèrement plus pop permettant à cet ensemble de ne pas générer de frustrations, si ce n’est celle qui nous pousse à regretter un morceau plus incendiaire comme le quatuor savait le faire si bien. Mais nul doute que ces chansons qu’on peut trouver trop sage sur CD, deviennent complètement folle en live, la véritable force de ce groupe décidément en marge du reste.
Informations
Label : Epitaph Records
Date de sortie : 10/06/2016
Site web : www.thisisletlive.com
Notre sélection
- I’ve Learned To Love Myself
- Good Mourning, America
- If I’m The Devil…
Note RUL
4/5