Mac DeMarco – This Old Dog

En à peine cinq ans, Mac DeMarco est parvenu à s’imposer sans même le chercher comme le bonhomme le plus cool de la galaxie indé. Du personnage déconnant à ses albums remplis de petits hymnes incarnant l’idée même de chill, c’est un état de fait qu’on peut détester mais sûrement pas contester. Avec son troisième disque (cinquième pour ceux qui comptabilisent les mini “Rock And Roll Night Clubs” et “Another One”), le Canadien se montre toujours aussi détendu en apparence, mais le temps a creusé une petite place pour l’introspection.

A 27 ans, Mac DeMarco accuse son premier coup de vieux. Prises de recul, constats sur la vie et son propre passé, il ne semble plus nous adresser à chaque morceau son sourire et ses jolies dents du bonheur. “Oh no, looks like I’m seeing more of my old man in me”, constate-t-il dès le titre introductif, posant les bases d’un album marqué par une inhabituelle majorité de compositions où pointe une forme certaine de mélancolie. Cette dernière atteint son maximum dans la conclusion de l’ensemble, avec le plus long morceau de toute la discographie du doux rêveur, “Moonlight On The River”, et son final cacophonique, qui s’éteint au profit d’un duo touchant entre Mac et un synthé rétro, “Watching Him Fade Away”. Mais attention, “This Old Dog” n’en est pas pour autant une bande-son pour personnes désabusées en quête de bourdon supplémentaire. Le songwriter cultive toujours aussi bien ses influences, plongeant dans l’ancien (micro solos à la Steely Dan sur la positive “A Wolf Who Wears Sheeps Clothes”), et se référant au récent (“On The Level”, qui ne va pas sans rappeler le Tame Impala de “Currents”).

Musicalement, Mac DeMarco fait encore et toujours du Mac DeMarco, mais “This Old Dog” n’est pas pour autant un “2” ou un “Salad Days” bis. L’apport discret de nouveauté dans la gamme instrumentale est pleinement bienvenu, comme cet harmonica sur “A Wolf Who Wears Sheeps Clothes”, ou encore le piano qui fait taire les guitares sur les refrains de “One More Love Song”. Ce qui frappe le plus reste cependant la mise en retrait des courts et efficaces riffs de guitare si caractéristiques de l’artiste. Ceux-ci apparaissent par petites touches (“Still Beating”), mais de manière générale, l’électricité est coupée au profit des guitares acoustiques, porteuses d’une ambiance mi-sereine mi-mélancolique qui est bel et bien celle de l’opus.

Avec “This Old Dog”, Mac DeMarco poursuit tranquillement son chemin dans la direction déjà prise dès ses débuts, en y intégrant une dose de maturité. Certains lâcheront l’affaire en blâmant le Canadien de se complaire dans un style mou et balisé, d’autres y verront une nouvelle preuve de son génie pépère et moderne. Il y a un peu de vrai dans ces deux extrêmes, tant Mac fait partie de ces artistes qui passent leur carrière à polir leur son au point de le rendre unique et réellement personnel, sans chercher à explorer de nouveaux territoires musicaux. Quoiqu’il en soit, question affinage de l’œuvre Mac DeMarco, ce nouvel essai est une vraie réussite.