ChroniquesSlideshow

Måneskin – RUSH!

Dans une époque où percer en France avec un groupe de rock relève du parcours du combattant, Måneskin fait office de belle exception. Portés par sa victoire à l’Eurovision 2021, la reprise du tube “Beggin'” leur offrira dans la foulée l’accès aux ondes et salles du monde entier. Notre pays ne déroge pas à la règle, puisque la formation donnera un concert à l’Accor Arena ! L’occasion de présenter son premier album post-Eurovision, RUSH!

Beggin, Beggin Ouch

On comprend rapidement pourquoi le groupe n’a pas souhaité donner de suite directe à son Teatro d’Ira Vol.1 (2021). Témoin de son internationalisation, le quatuor chante désormais l’essentiel de ses compositions en anglais. Et il faut croire que ce changement les a rendu prolifique, le tracklisting comportant pas moins de dix-sept titres.

Naturellement, cette longueur implique quelques morceaux anecdotiques (“OWN MY MIND”, “Il DONNO DE LA VITA”). Mais plus que la qualité, c’est la répartition qui pose question. RUSH! donne ainsi l’impression d’un manque de réflexion globale quant à l’ordre des chansons. Les rares titres en italien sont regroupés en fin de disque, quand les singles dévoilés en amont de sa sortie n’apparaissent qu’en clôture d’album. La première écoute a donc de quoi déboussoler l’auditeur, confronté à une succession de titres plutôt décousus.

Many skins

Pour autant, doit-on s’arrêter à ce problème de forme ? Certainement pas, tant ce troisième album fourmille de bonnes idées ! Alors que le quatuor a été étiqueté (un peu facilement) “glam rock” du fait de son exubérance, il se distingue par sa capacité à synthétiser de nombreuses influences. “Nous ne sommes pas punk, nous ne sommes pas pop, nous sommes juste des fous de musique“, assène le quartette sur “KOOL KIDS”.

Force est de constater que la bascule vers la langue de Shakespeare n’a pas altéré la capacité des Italiens à délivrer des bangers rock imparables (“BABY SAID”, “DON’T WANNA SLEEP”, “READ YOUR DIARY”). Le fédérateur “FEEL” tire particulièrement son épingle du jeu, au point de se présenter comme un potentiel hymne rock capable d’enflammer les stades. “SUPERMODEL” est quant à lui un single moins surprenant mais toujours efficace, qu’on préféra à la redondante “MAMMAMIA”.

Torna A Casa

Après avoir montré sa capacité à fournir de superbes ballades sur ses précédentes livraisons (“VENT’ANNI”, “TORNA A CASA”), Måneskin brille une fois de plus dans cet exercice. Bien qu’en anglais, “TIMEZONE”, “THE LONELIEST” et la poignante “IF NOT FOR YOU” sont bel et bien imprégnées de la fibre italienne qui fait le charme de la formation.

Et sa langue natale justement ? Alors que l’on ne l’attendait plus, elle débarque sous forme de tornade sonore, du douzième au quinzième morceau. Guidée par un Thomas Raggi en très grande forme à la guitare, “MARK CHAPMAN” (chanson au nom de l’assassin de John Lennon) fait pleinement ressentir l’influence de Franz Ferdinand. Le chanteur Damiano David n’est pas en reste, et démontre toute sa verve sur “LA FINE”. De manière générale, le frontman ne manie pas la langue de bois, et n’hésite pas à s’éloigner de sa zone de confort.

De l’audace à tous les étages

Après avoir collaboré avec Iggy Pop, les Italiens s’offrent les services du légendaire guitariste de Rage Against The Machine, Tom Morello, venu poser ses effets sur la sympathique “GOSSIP”. Si certain peuvent être surpris de voir se confronter ces deux univers, ce n’est rien à coté de ce qui va suivre.

A ce stade de la chronique, les amateurs de post-punk sont invités à s’assoir confortablement, et à se mouiller la nuque avant d’écouter “KOOL KIDS”. Ce morceau, enregistré volontairement en état d’ébriété, voit le groupe imiter purement et simplement… IDLES (oui, oui !). Les puristes crieront à l’hérésie, mais force est de constater que le groupe assure avec un certain talent. Restant dans le domaine du WTF, “BLA BLA BLA” est le fruit de l’union improbable entre un Philippe Katerine rock et une version trash du “abcdefu” de Gayle. Ce règlement de compte en bonne et due forme est typiquement le genre de morceau qui commence par rebuter, avant de finir par s’immiscer dans votre subconscient pour devenir totalement addictif.

Alors que le groupe déclarait regretter la faible quantité de titres que comportait son disque précédent, c’est peu dire qu’il se rattrape avec cette livraison. Si tout n’est pas parfait, Måneskin parvient tout de même à livrer une douzaine de morceaux de très bonne qualité. Le passage aux compositions majoritairement anglaises se fait finalement sans douleur, et confirme que la formation n’a pas usurpé sa place dans le paysage musical mondial.

Informations

Label : Sony Music / RCA Records
Date de sortie : 20/01/2023
Site web : maneskin.com

Notre sélection

  • FEEL
  • IF NOT FOR YOU
  • MARK CHAPMAN

Note RUL

 4/5

Ecouter l’album