Mat Bastard – LOOV

Alors que ses anciens acolytes de Skip The Use se réunissent au sein du projet The NoFace, Mat Bastard, chanteur et figure emblématique de l’ancienne formation, choisit une route plus solitaire. Sept mois après avoir officiellement annoncé la fin du groupe, celui qui a évolué toute sa vie aux côtés de bandmates a désormais son propre nom placardé sur l’artwork d’un premier album solo, “LOOV”. Enregistré entre la France et sa Californie d’adoption, ce premier essai, aussi éclectique que fédérateur, est un melting-pot vibrant d’influences diverses.

Particulièrement attendu par les fans, pris de court par l’arrêt soudain de leur groupe favori, ce nouveau projet avait commencé par déstabiliser à la sortie d’un premier single pop, “More Than Friends”, en featuring avec les Lillois d’A-Vox. Et si l’ancien punk s’était entièrement converti à la pop ? Ça serait mal le connaître.

Dès le premier morceau, “Wild”, Mat Bastard balaye cette supposition à grands coups de riffs incendiaires et de refrains endiablés. Survolté comme toujours, l’ancien leader fait appel à ses vieux démons déchaînés sur “Stay Close To Me” et son intro à la The Offspring ou encore sur l’excellent “Rosemary”, explosif à souhait. Leur efficacité, l’ultra énergétique frontman l’a déjà démontrée lors de la release party de “LOOV” à La Maroquinerie, qui avait repris à pleins poumons les morceaux, alors que tout le monde les entendait pour la première fois.

Efficacité semble d’ailleurs être le mot d’ordre de l’album. Que ce soit pop, rock, électro ou funk, on retrouve cette patte irrésistible qui a fait de Skip The Use l’un des groupes majeurs du rock français. Le dansant “Shift The Control” aurait d’ailleurs sans problème pu figurer sur un disque de la formation. Toujours dans cette veine rassembleuse, “LOOV” regorge de morceaux aux refrains massifs et fédérateurs, à l’image de “Girls”, mais surtout de “Honestly” et “Tamachute”, deux des plus belles réussites. Tandis que le pop rock de la première piste se teinte de reggae, la seconde empreinte à l’électro avant de partir dans un rock poignant. La voix de Mat, successivement aiguë et délicate et sombre et déchirante, est particulièrement mise en valeur. Si cette formule fonctionne particulièrement bien, c’est moins le cas pour celle du fade out en fin de morceau, utilisée quatre fois sur l’ensemble.

Désormais seul aux commandes, Mat Bastard ne se contente pas de faire du Skip The Use et expérimente. Avec le hip hop et le reggae sur “Grave Of The Broken Dreams”, mais aussi dans des styles plus inattendus. Résultat, le surprenant “Shout” et sa mélodie pop, vite rattrapée par un riff sombre, qui vire metal prog sur la fin avant de finir couronné par dix secondes de punk fracassant. Mais s’il y a une chose qui ne change pas, c’est le message général, rassembleur. Véritable roller coaster d’émotions, l’opus file entre pistes insouciantes et morceaux plus politisés. La veille de la sortie de l’effort, le musicien postait sur sa page Facebook : “Je peux juste pas rester comme un con et regarder le monde tourner n’importe comment sans rien dire”.

Effectivement, le chanteur semble en avoir, des choses à dire. Dans la plus pure tradition punk, “Vivre Mieux” est aussi décapant qu’incisif. Seul piste entièrement en français, elle aborde notamment les violences policières et le féminisme. Le flow rageur de Mat Bastard n’est interrompu que par un extrait d’un discours de Nixon, planant sur le morceau. Dans un registre moins enragé, “Dark Light” et “Stand As One” sont des plaidoyers pour le vivre-ensemble, la tolérance et l’unité du peuple. S’il s’agit d’ailleurs d’un projet solo, l’essai dégage une forte vibe collective.

Qu’elle se décline sous des sonorités pop, rock, punk, metal, reggae ou tout autre genre que Mat Bastard ait souhaité tenter, sa musique véhicule toujours le même message : l’unité. Du fan hardcore de ses débuts qui ne jure que par Carving à ceux qui l’ont découvert sur Virgin Radio avec “Ghost”, tout le monde devrait trouver chaussure à son pied dans cette déferlante de mélodies contagieuses et éclectiques qu’est “LOOV”.