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Opeth – The Last Will And Testament

Cinq ans après In Cauda Venenum (2019), Opeth revient avec The Last Will And Testament, un quatorzième album studio qui explore les profondeurs d’un drame familial. L’occasion rêvée pour Mikael Åkerfeldt de réintroduire ses growls emblématiques, sans se départir pour autant des influences progressives des récents disques.

From Netflix to metal

Inspiré par les intrigues de la série Succession, ce concept album nous plonge dans les années 1920. La lecture du testament d’un patriarche y fait ressurgir des secrets enfouis, menaçant de fracturer une famille entière. Porté par la plume de Mikael Åkerfeldt et les textes de Klara Rönnqvist Fors (The Heard, ex-Crucified Barbara), l’ensemble s’articule comme une pièce de théâtre musicale. Chaque titre incarne un paragraphe de ce testament, telle une partition interprétée par Opeth, sous le regard impuissant des membres de la famille, témoins de leur destin qui se joue.

Le retour d’un cri

Musicalement, The Last Will And Testament marque un retour vers des territoires familiers tout en conservant l’approche progressive explorée depuis une décennie. Premier morceau dévoilé en août dernier, “§1” est une introduction introspective, où les mots de Mirjam Åkerfeldt, fille de Mikael, donnent vie à une innocence sacrifiée. Cette sérénité initiale est rapidement brisée par une montée en puissance où les growls de Mikael et les riffs saccadés refont surface. Une grande première depuis Heritage (2011) ! D’un titre à l’autre, le maître à penser d’Opeth revêt autant de registres vocaux que de visages pour incarner les différents membres de cette tragédie. La richesse de son spectre vocal et sa capacité à passer du clair au growl est clairement un des points forts de l’album.

Invités de marque

Opeth parvient à conjuguer ses aspirations progressives avec une relecture de son héritage extrême, sans sombrer dans la redondance. Fredrik Åkesson s’impose comme un narrateur instrumental : ses solos percent chaque titre avec une intensité remarquable. Côté arrangements et cordes, Dave Stewart fait une fois de plus un travail remarquable et tisse des ambiances uniques. Parmi les collaborations marquantes, Joey Tempest (Europe) apporte une présence vocale supplémentaire sur “§2”, tandis que Ian Anderson (Jethro Tull) nous gratifie de jolies mélodies à la flûte sur “§4”. On se croirait plongé dans un épisode de Twin Peaks. Loin d’être anecdotiques, ces prestigieux invités enrichissent la palette sonore tout en contribuant à l’ambiance narrative.

Densité pathologique

L’un des atouts majeurs de ce quatorzième disque réside dans son équilibre. Les riffs de guitare sophistiqués laissent place à des claviers plus aériens, les accords complexes aux arpèges acoustiques. Opeth offre suffisamment de respirations à l’auditeur pour qu’il ait envie d’y revenir. Mais peut-être qu’à force de vouloir tout dire et tout faire, des morceaux comme “§5” ou le final “A Story Never Told” s’étirent un peu trop en longueur. L’ensemble n’échappe pas non plus à un certain maniérisme dans certaines envolées progressives. Comprenez par-là : le risque de surcharger les ambiances n’est jamais loin, et la frontière entre le digeste et l’indigeste est souvent très fine.

Testament sonore

Avec The Last Will And Testament, Opeth livre une œuvre dense et ambitieuse, qui mêle introspection et grandiloquence. Ce concept album, où le death metal fusionne avec une sophistication progressive, se savoure comme une tragédie musicale à plusieurs niveaux de lecture. Tragédie musicale… ou testament sonore qui pose une pierre angulaire de plus à l’impressionnante discographie des Suédois.

Informations

Label : Reigning Phoenix Music
Date de sortie : 22/11/2024
Site web : www.opeth.com

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Note RUL

 4/5

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