PJ Harvey – The Hope Six Demolition Project

Depuis maintenant plusieurs années, la Britannique PJ Harvey, connue pour ses talents incontestables et sa douce voix, s’émancipe fièrement des messages et mélodies lisses propres au genre pop, au profit de sons incisifs, originaux et de discours politisés. Enregistré au Somerset House de Londres, dans un studio accessible au public à travers l’exposition “Recording In Progress”, “The Hope Six Demolition Project” ne déroge ici pas au nouveau credo de la chanteuse et se présente comme un essai loin d’être aseptisé. Conclusion des différents voyages de la musicienne au Kosovo, en Afghanistan et dans les quartiers pauvres de Washington, ce neuvième album studio tire le portrait d’une situation sociale mondiale désastreuse et critiquable, tout en propulsant la vocaliste au rang de journaliste-reporter.

“The Hope Six Demolition Project” n’est pas un disque à prendre à la légère, malgré les délicats airs de cuivres et de guitares qui peuvent en ressortir. D’ailleurs, c’est même à partir de son propre nom que la révolte se met en place et que l’argumentaire débute. Faisant allusion au plan de redéveloppement immobilier américain HOPE VI, directement lié au premier titre “The Community Of Hope”, le dernier opus de l’Anglaise est là pour dénoncer, à travers un discours engagé sans langue de bois, quitte à se mettre les gouvernements au dos. Une plaidoirie critique et tranchante défendue du début jusqu’à la fin par PJ Harvey et Cie, dévoilant inégalité, incompréhension et constats par l’intermédiaire de touches musicales bien plus enchanteresses et attendrissantes qu’auparavant. Car même si le son et la production de l’instrumentiste semblent s’être adoucis avec le temps au bénéfice de chansons plus alternatives et indie, il n’en reste pas moins que l’agressivité et la hargne du passé s’extériorisent encore aujourd’hui par le biais des paroles claires et accablantes.

Sur le plan musical, “The Hope Six Demolition Project” est dans la continuité de ce que souhaite défendre PJ Harvey : les mélodies ne se ressemblent pas, l’ambiance hors du temps et les instruments se mélangent dans un compromis à la fois intriguant et compréhensible. “The Ministry Of Defence” et “Medicinals” se solidarisent avec une atmosphère pesante, s’apparentant avec le champ lexical de la “guerre”, tandis que d’autres titres comme “A Line In The Sand” ou “Near The Memorials To Vietnam And Lincoln” apportent une touche d’espoir à l’ensemble de par des sonorités plus téméraires. Et même si le message général s’avoue être un regard honnête sur la vie, il n’empêche qu’il se dégage, au même titre qu’un élan de critique, un souffle d’espérance et de prise de conscience, souvent provoqué par le subtil chant de Polly Jean Harvey, de son vrai nom.

Avec “The Hope Six Demolition Project”, PJ Harvey prouve une nouvelle fois son importance dans le paysage musical mais également son rôle dans le monde actuel avec une critique réaliste de la société contemporaine, loin des discours corporatistes corrompus et arrangeants. Du haut de ses onze nouvelles pistes, la Britannique s’affirme comme une artiste engagée, enragée et encore assez inventive pour produire des mélodies indé abouties et variées.