Après les troublantes sonorités kawaii metal de I Disagree (2020), la déconcertante Poppy revient avec Flux. Ce quatrième album studio confirme l’univers bipolaire d’un O.C.N.I. (Objet Chantant Non Identifié) qui gagne malgré tout en maîtrise dans l’usage de l’ambivalence des genres.
Ne vous fiez pas à son visage d’ange. D’abord phénomène absurde de l’Internet avec ses vidéos virales aussi perchées qu’inquiétantes, c’est presque naturellement que Poppy cherche dans la musique une autre forme d’expression. Grâce au mélange des genres et aux twists caractéristiques de ses dernières œuvres, la folie de Poppy semble s’adoucir et s’équilibrer sur Flux, son terrain stabilisé d’expérimentation et d’expression artistique.
Un style non-genre
Chaque sortie de Poppy est étrangement vécue comme une source d’appréhension. Travaillant ses disques comme des œuvres contemporaines, l’artiste américaine est capable du pire (Music To Scream To, enchaînement de sons électroniques conceptuels) comme du meilleur. Poppy prend notamment ses marques en musique en 2017 avec Poppy.Computer. Les sonorités y sont pop kawaii, sucrées à en faire mal aux dents, et les paroles à prendre au trente-sixième degrés avant de pouvoir envisager leur portée critique.
A l’inverse de son dernier album I Disagree, visuellement et musicalement très tranché dans la noirceur, Flux reprend des couleurs (pastel) à travers un univers kawaïo-inquiétant. Le décalage esthétique du clip de “Flux” en est le parfait exemple : les sonorités sont sombres et électriques, les riffs metal sont toujours présents mais moins agressifs, tandis qu’à l’écran de petites créatures animées volettent autour de montages à paillettes aux couleurs trop mignonnes. Poppy déstabilise encore et toujours, naviguant d’un genre à l’autre, mais fait preuve d’une folie plus légère, comme sous traitement.
Bipolarité stabilisée
Pour ce deuxième album à dominante metal, la douceur vocale de Poppy semble avoir trouvé un terrain d’équilibre avec l’instru puissante finement produite de Flux. La place est désormais laissée à des titres pop punk (“Lessen The Damage”) parfois même plutôt radiophoniques (“Her”), voire quelques ballades, synthétique et aérienne comme “As Strange As It Seems” ou plus équivoque comme sur l’outro “Never Find My Place” et ses dernières notes metalleuses explosives.
Depuis toujours assumée, l’ambiguïté musicale de Poppy propose ici un juste niveau de noirceur presque parfaitement concilié à quelques notes de pop délicate. Sur “So Mean”, le refrain entêtant aux accents girly contraste harmonieusement avec ses couplets plus sombres à peine audibles tandis que “On The Level” équilibre à merveille son instru pop rock et les explosions metal soudaines des cordes.
“I know that I will be fine if I never find my place“, comme elle le chante en outro et au risque de ne jamais trouver sa place dans l’une des cases de l’industrie musicale, Poppy assume sa bipolarité artistique. Avec plus de finesse et son génie artistique si personnel, l’ambivalence assumée et puissante de Flux installe durablement Poppy et son univers dans la case musicale qu’elle n’a pas fini de se créer.
Informations
Label : Sumerian Records
Date de sortie : 24/09/2021
Site web : www.impoppy.com
Notre sélection
- On The Level
- Flux
- Lessen The Damage
Note RUL
3,5/5