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Poppy – Negative Spaces

Si ce vendredi 15 novembre, la sphère rock avait les oreilles rivées sur le nouvel album de Linkin Park, From Zero ne constitue pas la seule sortie metal de la journée. Dans la continuité d’une année riche en collaborations fructueuses (Bad Omens, Knocked Loose), Negative Spaces, sixième disque de la talentueuse Poppy, confirme son retour à des sonorités plus heavy, relativement délaissées depuis le brillant I Disagree (2020).

I Disagree 2.0 ?

Si Poppy.Computer (2017) et surtout Am I A Girl? (2018) sèment les premières graines de l’histoire d’amour entre Poppy et le rock, I Disagree en est une consécration aussi surprenante que réussie, mélangeant candeur pop et agressivité metal dans un style unique. Flux (2021) arpente des sentiers plus punky, tandis que Zig (2023) se réapproprie les sonorités synth pop des débuts. Les récentes collaborations avec Bad Omens (“V.A.N.”) et surtout Knocked Loose (“Suffocate”, qui lui a valu une nomination aux Grammy Awards de la meilleure prestation metal), semblaient indiquer une orientation artistique plus hardcore pour l’album à paraître, proche des expérimentations de I Disagree.

Cette hypothèse est en partie vérifiée : Negative Spaces est effectivement son disque le plus heavy depuis 2020. Peut-être même le plus heavy tout court, puisqu’au-delà des instrumentations déjantées, Poppy se livre à des parties entièrement screamées, correspondant aux moments les plus radicaux de l’ensemble : le breakdown de “have you had enough?”, à la Knocked Loose, qui annonce la couleur pour la suite; les ponts de “the cost of giving up” et de “nothing”; ou encore les couplets agités et ultra-rapides de “they’re all around us’, qui se disputent la palme du passage le plus heavy avec le sprint chaotique qu’est “the center’s falling out”.

Mais le style de metal sollicité est assez différent de celui investi par I Disagree : si ce dernier explorait des inspirations heavy et neo metal, Negative Spaces emprunte davantage au metalcore. Les riffs, peu gourmands en notes, sont noyés dans un brouillard instrumental où la batterie dicte son jeu et multiplie les variations de tempo : le halftime est gage de lourdeur dans “have you had enough?”, “push go”, “the center’s falling out”, “negative spaces”, ou encore “new way out”. Les parties de lead ou de solo se font plus rares que sur I Disagree. La contribution à l’écriture et à la production de Jordan Fish se fait ressentir sur quelques morceaux, dont les arrangements rappellent des sonorités à la Bring Me The Horizon (“the cost of giving up”, “vital”, “surviving on defiance”).

Heavy, mais pas que

La radicalité de certaines pistes aurait pu faire oublier ses contreparties plus tranquilles. Or, ces dernières sont aussi réussies que les premières, parfois encore plus, et viennent apporter du relief et du contraste à un disque dont la variété des sonorités se fait de plus en plus évidente à chaque écoute.

En effet, Poppy ne puise pas uniquement dans l’univers sonore de I Disagree. Particulièrement, l’excellente “negative spaces” impose une ambiance complètement différente, avec son esprit 2000’s tenant autant au riff qu’à la mélodie vocale. L’ampleur du son lui permet de se positionner comme un des morceaux les plus lourds de l’ensemble, sans cocher la case scream et double pédale, et propose un des meilleurs halftimes de l’album. Ses sonorités plus alt rock évoquent celles de Flux. Les refrains pop et catchy s’enchaînent sur “vital”, “nothing”, “new way out”, tandis qu’une atmosphère plus mélancolique se fait ressentir sur les jolies “surviving on defiance” et “halo”.

Poppy laisse aussi s’exprimer son goût pour les croisements rock et électro sur “push go”, “nothing” et “surviving on defiance”. De son côté, la survitaminée “crystallized” abandonne complètement la saturation pour un rendu synth pop délectable, porté par une mélodie aux claviers et un refrain hyper efficace, comme un clin d’œil réussi à sa facette la plus pop. Quoique détonnant dans la tonalité générale, “crystallized” fait l’effet d’un bonbon dont on ne pourrait plus se passer.

Produire un album capable de compter parmi ses titres des sprints hardcore irrévérencieux, des mélodies vocales hymniques et des arrangements d’électro pop sans donner l’impression d’une compilation est un défi audacieux; mais qui de mieux que l’imprévisible Poppy pour le relever ? Au fil des ans, la chanteuse s’est construit une discographie aussi variée que qualitative, à laquelle Negative Spaces est une nouvelle contribution de taille.

Informations

Label : Sumerian Records
Date de sortie : 15/11/2024
Site web : impoppy.com

Notre sélection

  • negative spaces
  • have you had enough?
  • crystallized

Note RUL

 3,5/5

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