Après six ans d’absence, l’ancien batteur des Beatles est de retour sur le devant de la scène, là où on ne l’attendait pas. Look Up fait écho à l’album de reprises Beaucoup Of Blues (1970), dont le titre insidieux ne fait pas honneur au genre vraiment représenté : la country music. Malheureusement boudé par le public à sa sortie, il est également le fruit d’une rencontre avec un spécialiste du genre. Peter Drake il y a cinquante ans, T-Bone Burnett aujourd’hui, une chose est sûre : Ringo Starr a le chic pour savoir s’entourer.
Mon Ringo pour un cheval
Et c’est la batterie qui nous invite dans cette entrée en matière. “Breathless” et son tempo entraînant nous font taper instantanément du pied. Ringo Starr n’a pas perdu de sa voix aux tonalités pop bubblegum. Cette dernière se fond parfaitement avec les riffs de guitares acoustiques de Billy Strings. Premier guest de l’album, le jeune guitariste fait honneur à son propre surnom en étant un artiste de choix pour cette tranche d’americana. Pour un premier disque post-COVID, ce dernier est placé sous le signe de la collaboration.
Car vient ensuite le titre éponyme. Plus posé, la guitare steel apparaît sur ce morceau comme le lien entre Ringo et la chanteuse Molly Tuttle. Elle aussi est une enfant des années 90 que nous retrouverons au fil de l’ensemble. Ses talents de chanteuse seront surtout reconnus sur le titre “Can You Hear Me Call”. Du groupe Larkin Poe en passant par Lucius et Alison Krauss, c’est une vraie chorale au service de l’octogénaire, qui n’avait pas encore idée qu’il allait renouer avec ses premiers amours il y a encore quelques années. Mais la providence a un nom : T-Bone Burnett.
O’Beatle, where art thou?
Le producteur et guitariste compose neuf des onze titres de Look Up et pose les arrangements de sa six-cordes. Ayant collaboré avec bien des artistes comme les Cranberries, ou encore les frères Coen avec la bande-son de O’Brother, Where Art Thou? (2000) et celle de Inside Llewyn Davis (2013), il est la personne vers qui se tourner pour trouver l’authenticité d’un genre auquel beaucoup se sont essayés, mais que peu ont réussi à dompter. Certes, le western a toujours été dans la peau de Ringo, depuis son sobriquet. Richard Starkey est devenu son alter ego grâce au film de John Ford, Stagecoach (1939), un long-métrage où John Wayne interpréta un de ses rares rôles de hors-la-loi, le Ringo Kid. Mais la patte de T-Bone Burnett est ici essentielle pour réussir les différentes ambiances que le disque propose.
Au-delà de la production impeccable, ce sont avant tout les thèmes familiers à Ringo Starr qui nous accrochent. Qu’il chante sur l’amour, l’amitié, le présent, ou le passé, nous sommes comblés. Avec une mélodie d’harmonica sans faille et des paroles bien senties, une chanson en apparence très commune comme “Never Let Me Go” se transforme en miel pour nos oreilles. Diversité et simplicité forment toujours un duo gagnant. La prise de risque est aussi au rendez-vous avec “Rosetta” et sa guitare qu’on pourrait croire empruntée au parrain du grunge, Neil Young. Flirter avec ce genre de saturations, pas mal pour un disque de cette trempe.
L’avis, l’amour, les vaches
Là où Ringo explorait Nashville durant les 70’s, il se laisse ici porter avec une confiance aveugle par son producteur. Ce dernier, malgré une carrière impressionnante, commet pourtant l’erreur de reléguer les talents actuels de la country music à un arrière-plan trop effacé. L’instrumentation est atténuée pour ne pas éclipser le batteur aux doigts en V. Une intention qui fonctionne, mais pas sur l’intégralité de l’album. Tous les morceaux ne se valent pas, et la voix de Starr ne se prête pas à tous les registres.
Bien que Look Up encapsule avec brio la nostalgie et l’expérience acquise de l’ancien Beatle, il est surtout l’œuvre de son producteur. Est-ce une occasion manquée de permettre à cette association de s’épanouir ? Si Ringo Starr n’est pas en retrait, il y avait matière à laisser libre cours aux idées des nombreuses personnes ayant collaboré à ce disque. Et même si c’est loin d’être l’album le plus mémorable de sa discographie, il n’en reste pas moins agréable à écouter. Sa carrière solo n’est pas aussi mémorable que celle de Paul, John, et surtout George. Mais il reste le premier Beatle à avoir fait un caméo chez Les Simpson.
Informations
Label : Universal Music
Date de sortie : 10/01/2025
Site web : www.ringostarr.com/#
Notre sélection
- Breathless
- Time Is On My Hands
- You Want Some
Note RUL
3/5