Chroniques

Screaming Females – All At Once

Porté par une guitariste d’un mètre cinquante au chant bien trempé, Screaming Females brandit l’étendard du rock indépendant depuis plus de treize ans. Ce trio originaire du New Jersey fait preuve d’une régularité musicale depuis sa signature avec le label Don Giovanni Records. “All At Once”, septième opus du groupe, confirme le talent de la formation à être à la hauteur de ses pairs, de Dinosaur Jr aux Breeders.

Fi des préliminaires avec “Glass House”,  les riffs enchaînent l’auditeur tandis que Marissa Paternoster impose sa voix sur les fermes lignes de basse de King Mike, qui ne boude pas son plaisir avec son fidèle compagnon de section rythmique, Jarrett Dougherty. Avec sa Fender, cette jeune femme ne cesse de faire preuve d’audace et de virtuosité pour ne pas se cantonner à être un groupe de punk underground de plus au palmarès des groupes émergents au milieu des années 2000. Le changement de structure s’opère aisément et nous offre un démarrage sur les chapeaux de roues avec le duo basse/batterie sur “Black Moon”.

L’onde de choc nous submerge jusqu’à ce que le calme avant la prochaine tempête se fasse ressentir avec des morceaux comme “Dirt” et “Deeply”. Petite nouveauté, un morceau se paie le luxe d’être en deux parties, même si cela n’engage à rien de conceptuel. Ici, il n’est pas question de jouer de mystères où il serait possible de coller une étiquette art contemporain. Le tout est honnête avec ses mélodies ravageuses (“My Body”) et ses charmantes accalmies “(Drop By Drop”).

“Rose Mountain” (2015) est un disque coup de poing où les dix titres s’enchaînent avec le plus de cohérence et d’efficacité possible. Poursuivre dans cette lignée ou changer de direction, de façon subtile ou radicale, sont les deux options qui s’offrent à ces musiciens qui façonnent leur identité depuis des années. Screaming Females conserve un esprit enragé tout en tendant les bras vers une évolution où le tempo se permet de ralentir un peu pour aérer les compositions et partir à la conquête de nouveaux horizons. Libre à certains de traduire cela comme une baisse d’intensité là où nous sommes également plus aptes à la retrouver ailleurs que dans une avalanche de distorsion. La petite femme à la grosse voix n’a jamais eu besoin d’être sur la pointe des pieds et de crier très fort pour maîtriser le domaine dans lequel elle évolue.

La force de l’album réside dans cet état d’esprit, conscient du chemin parcouru et de celui que le trio continue à parcourir. Matt Bayles, connu pour être le claviériste de Minus The Bear et pour son travail de production avec Mastodon, succède avec brio à Steve Albini. Déjouant les pièges de reproduire le dernier effort studio, il aiguille le groupe vers une direction plus pop mais tout aussi puissante. En plus du nom du disque, les quinze titres ainsi semblent parfaitement résumer ce qu’a accompli la bande de Marissa Paternoster jusqu’à présent.

Depuis “Baby Teeth” (2006), Screaming Females n’a cessé de travailler sans relâche et de faire preuve de passion pour arriver à un résultat pareil. “All At Once” est un essai à faire tourner sur la platine sans modération, séduisant les amateurs du genre comme les plus fins connaisseurs. De la musique accessible avec néanmoins sa part de secrets, n’y voyez aucune malice.

Informations

Label : Don Giovanni Records
Date de sortie : 23/02/2018
Site web : screamingfemales.com

Notre sélection

  • Dirt
  • My Body
  • Step Outside

Note RUL

4/5

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