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The Wombats – Oh! The Ocean

Dix-huit ans après l’iconique Proudly Present… A Guide To Love, Loss & Desperation (2007), la fraîcheur de la pop rock unique et amusante de The Wombats est de retour avec un tout nouveau disque, Oh! The Ocean. S’il est impossible de se tromper sur l’identité des compositeurs dès les premières secondes d’écoute, ce sixième album s’éloigne des sentiers battus pour explorer des sonorités plus raffinées, quitte à sacrifier quelques caractéristiques pourtant emblématiques du groupe.

Les wombats de retour

Quand les Wombats débarquent avec leur indie rock léger et déjanté en 2007, un constat commun émerge : Matthew Murphy (voix/guitare/clavier), Tord Øverland Knudsen (basse/clavier) et Dan Haggis (batterie) sont là pour s’amuser. Leur musique s’apprécie au premier comme au second degré : leurs paroles mêlent observations désabusées et esprit carpe diem avec honnêteté et désinvolture.

Dans Oh! The Ocean, on retrouve sans problème le chant typique de Murphy, avec son accent prononcé et ses aventures mélodiques entêtantes. Niveau paroles, on reconnaît sans peine la patte Wombats : une sorte de nihilisme tourné en dérision sur des ambiances dansantes. Le premier titre évocateur nous plonge directement dans l’univers satirique du groupe : “Sorry I’m Late, I Didn’t Want To Come”, chantonne Murphy avant d’ajouter : “It’s not that I hate you I just hate everyone“. L’instrumentation contraste avec les paroles en nous souhaitant la bienvenue en toute tranquillité.

Gravité thématique et légèreté musicale se conjuguent à nouveau sur les sonorités futuristes de “Gut-Punch”, plutôt portée par les synthés : “Will I ever feel awake again? / Did I ever feel awake back then?“. A nouveau, les effets de contraste très Twenty One Pilots prennent un virage morbide sur la lumineuse “I Love America And She Hates Me” : “And I’ll love America ’til the bullet’s in my head“. De quoi nous rappeler que l’esprit chaleureux et insouciant des Wombats sert parfois de trompe l’œil pour évoquer des thèmes plus sombres, qu’ils explorent des questions sociales contemporaines (“Instead we’ve got TikTok models / With all of their slippery morals / It’s gonna be fun until it’s not” sur “Swerve (101)”) ou qu’ils abordent des tourments plus personnels (“The World’s Not Out To Get Me, I Am”, “My Head Is Not My Friend”). Heureusement, l’indolence caractéristique du groupe ne cache pas toujours de signification plus sombre : “Can’t Say No” célèbre ainsi liberté et jeunesse sur un refrain emphatique.   

Innovation sonore, sacrifice identitaire ?

La marque Wombats a beau être redoutablement efficace, certains ont pu reprocher aux Britanniques une trop grande monotonie d’album en album, malgré l’incorporation progressive de sonorités plus synthétiques. Pour ce sixième disque, il ne peut être reproché aux musiciens de ne pas avoir innové : collaborant désormais avec un nouveau producteur, John Congleton, Murphy, Knudsen et Haggis décident de prendre le contrepied de la sortie précédente, Fix Yourself, Not The World (2022), en délaissant les hymnes tubesques pour des expérimentations plus subtiles.

“Kate Moss” est peut-être la chanson la plus symptomatique de cette volonté de changement : avec son arrangement électro et retenu, l’ambiance est plus intimiste, plus nébuleuse, contrastant avec la limpidité musicale habituelle. “Gut-Punch” élargit ce nouvel univers sonore en proposant une pop aux accents futuristes conférant à son refrain pourtant typique des Wombats une toute autre saveur. La fin de “My Head Is Not My Friend” assume une couleur plus mélancolique que d’habitude, appuyée par son excellente mélodie vocale et une montée en intensité sur le pont.

De façon générale, la retenue semble être l’un des maîtres mots de l’ensemble : celui-ci débute et se clôture avec douceur sur des tempos lents, et préfère à l’énergie traditionnelle des refrains très pop des arrangements plus délicats. “I Love America And She Hates Me” et “Blood On The Hospital Floor” (dont le refrain nous rappelle les mélodies de Wallows) proposent bien des grooves dansants, mais “The World’s Not Out To Get Me, I Am” dupe son auditoire en trahissant la promesse d’une plus grande intensité teasée par son début saturé. Les derniers morceaux se complaisent dans la discrétion, sauf la surprenante “Swerve (101)” dont l’atmosphère presque menaçante des couplets tranche avec la luminosité des refrains avec habileté. Nappes grésillantes et accords plaqués au piano complètent ce tableau aux évocations dramatiques.

Si la démarche de renouvellement, réussie, est à saluer, il semble toutefois manquer à l’ensemble les cavalcades sur-vitaminées habituelles. Si le son de The Wombats est quelque peu prévisible, il n’en est pas moins irrésistible : et la quasi-absence du pouvoir de contagion des combinaisons mélodiques et agitées mêlant voix et guitares sur ce nouvel album laisse un petit goût de regret. Oh! The Ocean aurait mérité quelques titres plus franchement fun et débridés pour rivaliser avec des splendeurs passées comme “Kill The Director”, “Schumacher The Champagne”, “Sex And Question Marks”, “Ready For The High”. De façon générale, le disque aurait gagné à proposer plus de variations entre ses morceaux avec des grimpées en intensité au relief plus accentué.

Oh! The Ocean est un album agréable et indubitablement travaillé, permettant à ses auteurs de ne pas s’enfermer dans des sonorités fixes et caricaturales. Quoique lumineux, il rend un hommage plus timide aux capacités d’attraction des Wombats avec une coloration sonore manquant peut-être de la vitalité euphorique et empressée habituelle, rendant leur musique certes clivante, mais aussi irrésistible.

Informations

Label : AWAL Recordings
Date de sortie : 14/02/2025
Site web : thewombats.co.uk

Notre sélection

  • My Head Is Not My Friend
  • Swerve (101)
  • Blood On The Hospital Floor

Note RUL

 3/5

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