Thomas Howard Memorial – In Lake

Ils ne sont pas originaires de l’Ouest américain mais bien de l’Ouest de la France. De Bretagne plus particulièrement. Les quatre membres de Thomas Howard Memorial menés par la voix du chanteur Yann Ollivier, auteur, guitariste (également batteur de The Craftmen Club), ont emprunté l’un des pseudonymes du célèbre hors-la-loi Jesse James, Thomas Howard. Le groupe sort son premier album, “In Lake”. Du rock progressif et atmosphérique qui prend forme autour d’un projet qui dépasse les limites du simple disque.

Sur le papier, des titres de chansons comme “Murder For Fun”, “Rupture”, “Bad Things” ou encore “Eradicated Song” ne respirent pas l’optimisme. Mais sous ces morceaux, se cache une ambiance intrigante qui révèle des compositions et des orchestrations très riches. L’ouverture à ce monde se fait avec “Murder For Fun”, une entrée en matière planante, mystique de plus de six minutes. Un morceau qui alterne rythmes entraînants, pauses aériennes et nous plonge directement dans l’univers atmosphérique du quatuor. Sur cet opus, on retrouve des effets mystérieux et une instrumentalisation lente qui donne un côté sombre comme sur “Round & Round”. Dans la même veine, “Rupture”, débute avec un son plus électronique à la Kraftwerk, des airs post-apocalyptiques avant de remettre l’accent sur les guitares et devenir plus rock et toujours ombrageux. Des ambiances de monde en fin de vie. Thomas Howard Memorial nous transporte dans sa vision de l’humanité ou en tout cas dans sa bande-sonore. On retrouve un rock un peu plus lourd sur “Bad Things”, une composition entraînante avec une batterie plus présente avant d’enchaîner sur l’éponyme “In Lake”. Ce titre épuré s’inscrit dans un tempo lent, à la rythmique simple surmontée d’une voix haut-perchée qui va tirer un peu plus dans les aigus.

“In Lake” ne donne pas seulement son nom à l’ensemble. C’est un projet tout entier qui prend forme autour de ce lac. L’année dernière, après avoir terminé l’enregistrement de ce premier essai, les musiciens partent le réenregistrer en intégralité, en live et sans public au fond du Lac de Guerlédan en Bretagne, exceptionnellement asséché pendant quelques mois. Un événement qui ne s’était pas produit depuis trente ans et qui ne reproduira pas avant cinquante ans au moins. La session a été filmée en une nuit par le réalisateur Nicolas Charles et sera disponible en intégralité sur internet. Thomas Howard Memorial ne s’en cache pas, cette prestation est un hommage revendiqué au “Live At Pompeii” de Pink Floyd dont on reconnaît bien les inspirations du combo. Cette prestation est un support de plus pour se perdre dans l’univers de THM.

Un monde mis en avant sur ce premier album avec des variations sur neuf pistes qui durent entre quatre et plus de six minutes. Une manière de faire audacieuse que l’on retrouve dans des chansons comme “Boston” et son introduction instrumentale de près de deux minutes sur fond d’orgue. La voix du chanteur Yann Ollivier se mue en fonction des ambiances. Rugueuse sur certains morceaux, elle monte aussi dans les aigus mais s’accorde toujours parfaitement avec la teinte des chansons. Ces écarts maîtrisés, on les retrouve notamment sur “Alive”, un morceau au départ lancinant avec quelques notes de piano qui s’étire et qui explose. Une chanson très forte qui laisse sa marque après écoute. “In Lake” se termine comme un cérémonial avec “Six Feet Under”. Ici, les paroles semblent sortir tout droit de notre tête et confirme le côté atmosphérique de cet effort studio avant de conclure sur quelques notes qui rappellent les sons d’une messe.

Dès le début du disque, on a l’impression d’être tombé dans une rêverie post-apocalyptique où le groupe prend le temps de nous décrire sa vision fantasmagorique du monde. Thomas Howard Memorial prend un risque avec ces sonorités car si on écoute “In Lake” en étant distrait, on risque de passer complètement à côté des compositions. On retient tout de même un opus audacieux, intrigant et qui, si on se laisse le temps de l’écouter, nous emportera dans son monde sombre, planant et mystérieux.