Plus rien n’arrête Dustin Kensrue. Alors que le musicien vient de sortir son cinquième album solo et premier album live, “Thoughts That Float On A Different Blood”, il y a peine deux mois, ce dernier a remis Thrice sur pied qui revient en douceur avec “To Be Everywhere Is To Be Nowhere”. Le Thrice 2016 est-il si énigmatique que ça ? Oui et non.
Thrice est l’un de ces groupes que les années ont vu considérablement changer. D’abord post hardcore, puis plus électronique pour finalement se complexifier et même sortir des concepts albums, le quatuor n’a eu de cesse de faire évoluer sa recette. Qu’attendre pour ce grand retour ?
Les deux titres révélés “Blood On The Sand” et “Black Honey” laissaient présager un retour très radiophonique, dans la pure veine des formations de rock alternatif qui fonctionnent : une sorte de stoner léger dont le point culminant éclate toujours lors d’un refrain accrocheur où le chanteur s’écorche les tissus vocaux, des couplets qui ne sont là que pour faire monter la sauce etc. Dustin Kensrue et sa bande n’échappent pas à la règle et s’inscrivent, au premier abord, dans une sphère musicale dangereusement conventionnelle.
Mais Thrice a été malin. Car si ces deux morceaux sont indéniablement ceux qui obtiendront le plus de succès – et, corollaire de ça, lui permettront de faire un comeback remarqué – ils sont aussi ceux qui finalement représentent le moins ce “To Be Everywhere Is To Be Nowhere”. Car Thrice réserve encore quelques surprises : des montées moins attendues sur “The Long Defeat”, des ambiances dichotomiques sur la non moins tubesque “Hurricane” dont les mélodies et la lourdeur ne sont jamais loin d’un Deftones, le côté solaire en plus. Les Californiens évitent miraculeusement chaque écueil de ce rock alternatif à succès qu’on en a marre d’entendre, tout en le jouant.
Le combo se joue des clichés de ce rock alternatif qu’il mêle étroitement à son passé et son présent, brandissant le tout haut et fort sous les oreilles de son public. En effet, que ce soit l’introduction de “Whistleblower” dont les trente premières secondes font étrangement échos aux débuts des Américains ou la clôture “Salt And Shadow” – ballade aux relents pop folk qui rappelle ce que Dustin a fait de mieux en solo – Thrice navigue dans des eaux qu’il connait bien et dans lesquelles il a pris le temps d’apprendre à nager. Dur mais pas trop (“Wake Up”), mélodique mais pas que, et toujours accrocheur, jamais le propos ne s’égare, jamais Thrice n’est menacé de se noyer, tout en restant pourtant “on the edge” de l’être.
Minutieux, presque astucieux, beau et proposant plus de relief que les premières écoutes ne laissent le présager, “To Be Everywhere Is To Be Nowhere” aurait été une réussite totale si le nom Thrice n’était pas marqué sur la pochette. Il manque à l’ensemble une légère dose d’expérimentations et si ce mot a été jusque-là absent de la chronique, c’est bel et bien parce qu’il n’y en a aucune trace, ce qui impacte sur la durée de vie de l’ensemble. Hors, l’expérimentation, c’est bel et bien ce qui avait permis à la reconversion de Thrice d’être elle, une réussite totale. Cette nouvelle offrande, un peu sage, reste néanmoins une belle remise sur pied.
Informations
Label : Vagrant Records
Date de sortie : 27/05/2016
Site web : thrice.net
Notre sélection
- Hurricane
- Black Honey
- Salt And Shadow
Note RUL
4/5