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Vended – Vended

Pour son tant attendu premier album éponyme, Vended est allé droit au but : une brutalité ravageuse et menaçante aux tonalités dramatiques parfaitement maîtrisées, de sorte à produire un résultat radical, mais d’une fluidité remarquable.

Welcome to our show

Dès les premières minutes, Vended nous met en garde : nous sommes dans son univers musical, et nous devons en accepter les règles. “Paint The Skin”, véritable rouleau compresseur aux riffs endiablés, donne le ton pour la grosse trentaine de minutes à suivre : “Vocalizing, traumatizing / Right down to the bone / We will not go quietly / So welcome to our show“. Malgré ses refrains et son pont chantés en clean, qui comptent parmi les rares passages du disque où Griffin Taylor fait honneur à son père en troquant habilement ses growls pour une voix claire et posée, “The Far Side” poursuit la cavalcade. Le rythme marathonien est surtout porté par une batterie infatigable, imposant une vitesse éclair et des breakdowns à foison, permettant des variations de tempo parfaitement placées (“The Far Side”, “Disparager”, “Downfall”).

Les guitares ne sont pas en reste, car en dehors de leur course-poursuite effrénée avec la batterie, elles proposent des riffs certes extrêmes, mais fédérateurs (“Nihilism”, “Where The Honestly Lies”, “The Far Side”), ainsi que quelques progressions accompagnant les lignes mélodiques avec délicatesse (“The Far Side”, “Serenity”, “Am I The Only One”).

Certains morceaux ressemblent à un empilement parfaitement cohérent de différentes sections rythmiques et mélodiques, formant un ensemble excitant et bouillonnant d’intensité. Il faut dire que Vended a un certain talent pour les ponts : celui de “Nihilism” vient immédiatement à l’esprit, avec ses “Shut up, get the fuck inside / Shut the fuck up, get inside” contagieux, mais aussi celui de “Where The Honestly Lies” avec ses breakdowns ultra-lourds, séparés par un solo de guitare inattendu et délectable, le seul du disque. Ainsi, certaines chansons apparaissent déstructurées, envahies par la rage explosive des instruments qui se disputent le premier rôle, maintenant l’intérêt de l’écoute, et mettant en valeur la capacité du groupe à diversifier les canaux d’expression.

Corps sensibles

Certes, l’album se complaît dans une ambiance relativement monotone, où la rage fait office de catalyseur cathartique de différents types de souffrances. Pourtant, Vended n’est pas un disque froid. Avec une certaine habileté, le groupe parvient à insérer des instants de rupture qui renforcent l’expressivité émotionnelle de l’ensemble.

Quoique limitée, l’alternance entre le growl et le clean donne du relief à des chansons au fort potentiel mélodique (“The Far Side”). Les guitares s’assurent également de la partie la plus atmosphérique du disque : des percées lancinantes, souvent inquiétantes, viennent étoffer l’ambiance solennelle (“Pitiful”, “Nihilism”, “Disparager”, “As We Know It”). On regrette la courte durée de cette dernière, qui fait office de clôture de l’album, tant la combinaison de son riff saccadé, de ses complaintes de guitare saturée et de sa partie vocale presque susurrée ouvrait la voie à une autre couleur sur la palette d’ambiances que Vended est capable de proposer. Celle-ci se manifeste également à travers l’intro et les deux interludes, “Going Up” et “Ones”, fluidifiant l’expérience et offrant une pause méritée au milieu de toute cette rage incontrôlée.

Il faut dire que si le mode d’expression choisi par Griffin Taylor se manifeste par une préférence pour le scream, les paroles, quant à elles, expriment souvent une grande détresse habilement décrite, oscillant entre lamentations personnelles et réflexions philosophiques. Ainsi, “Pitiful” dépeint le pathétisme de la résignation face à sa propre douleur et l’incapacité de se ressaisir; “Serenity” semble être une manière détournée de traiter d’une forme d’apathie conduisant Taylor à implorer les autres de le laisser tranquille. Quant à “Nihilism”, elle traite également de l’apathie en la liant à une certaine vision du monde : “My walls have broken in the fourth dimension / This is the end of times / This is the last stage of my mind“. Finalement, le contenu thématique de l’album est bien résumé par l’ouverture, “Paint The Skin”, qui fait directement référence à l’identité visuelle du groupe, se couvrant de peinture noire lors des prestations live : “Paint the skin / Reveal the pain / You hide within / And see the change“. Vended est un disque qui disserte sur la santé mentale, sous un déguisement sombre et agressif.

Avec ce premier album, Vended confirme à son auditoire que sa légitimité sur la scène neo metal ne repose pas sur l’ascendance biologique de deux de ses membres : Griffin Taylor et Simon Crahan (batterie) ont beau être les fils de Corey Taylor et Shawn Crahan de Slipknot, les prouesses individuelles de chacun et leur talent de compositeurs ne sauraient être minimisés. Au-delà de sa radicalité brute, Vended prouve une grande maîtrise, ses auteurs étant capables d’apporter une vraie complexité et sensibilité à une musique qui flirte constamment avec les limites de l’excès.

Informations

Label : Vended
Date de sortie : 20/09/2024
Site web : www.officialvended.com

Notre sélection

  • The Far Side
  • Where The Honestly Lies
  • Nihilism

Note RUL

 3,5/5

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