Plus qu’une poignée de jours avant la sortie du tant attendu “The Astonishing” des Américains. A cette occasion, Jordan Rudess nous en dit plus sur cette réalisation qui s’annonce palpitante !
Bonjour Jordan comment vas-tu ?
Jordan Rudess (claviers) : Je vais bien, heureux d’être à Paris.
Votre prochain album sera prochainement disponible dans les bacs, tout d’abord qu’est-ce qui est “époustouflant” (astonishing) ? Le sentiment éprouvé lors de sa conception ? Le concept ? Le tout ?
J : Ce projet a vu le jour deux ans auparavant. Cette histoire a été écrite par John Petrucci, inspirée de la science-fiction, de la fantasy mais également de films tels que “Star Wars”, “Game Of Thrones”, “Le Seigneur des Anneaux”, “Harry Potter”… ce type de choses. D’un point de vue scénaristique mais également musical, sa construction a été très longue. John a écrit l’histoire puis nous avons tous deux composé l’intégralité de la musique qui l’accompagne. Le récit traite de l’espoir, de la musique et son pouvoir guérisseur qui est si important dans notre quotidien et notre culture, nous en tant qu’être humain mais pas seulement.
Lorsque vous avez commencé à travailler sur le successeur de “Dream Theater” avec John, quand avez-vous réalisé que cet album allait prendre une toute autre envergure ?
J : Nous savions que ça allait être géant, car nous voulions faire un concept album. Puis John nous a présenté son idée. Dès le départ nous savions que nous allions créer quelque chose d’imposant. Peu après les premières phases de travail, nous avons réalisé que notre œuvre allait s’approcher d’un rock opéra ou à l’image de “The Wall”.
Quid de son histoire ?
J : L’histoire traite de technologie et de musique organique. Elle implique ces entités robotiques appelées des Nomacs. Dans cet univers dystopique, ces bruyantes machines ont pris le dessus sur la conscience humaine et ont carrément endormi la population, celle-ci vivant donc dans une société vidée de tout sens. Il y a un empereur, des villages etc. L’histoire prend tout son sens avec la découverte d’une personne qui maitrise cette musique inexistante et cela met donc en scène deux forces qui s’opposent avec la population qui prend peu à peu conscience qu’elle veut intégrer la musique à sa vie. Ils ont en quelque sorte trouvée leur élu alors qu’en face Lord Nafaryus qui dirige ce royaume veut contenir cette rébellion avec ses machines. Voici un trame assez classique et d’autres éléments vont également rythmer cette histoire : l’amour, le drame, la violence. Je suis convaincu que les fans de Dream Theater iront au plus profond de cette œuvre.
James dit que “c’est quelque chose que nous devions faire” mais vouliez-vous le faire ?
J : L’idée de réaliser un album sur un modèle d’opéra est quelque chose avec laquelle je suis à l’aise en raison de mes influences musicales. Ainsi lorsque John nous a proposé son concept, cela m’a beaucoup touché car j’aurais aimé travailler sur un projet comme celui-ci et l’occasion se présentait enfin. De plus Dream Theater s’est toujours inspiré de différents styles, le prog et le metal et même parfois le jazz ici, cela nous a donc poussé à faire plus encore et c’était l’un des challenges que présentait cette réalisation.
A quel point était-ce différent de travailler sur cette énorme quantité de musique comparé à un album “traditionnel” Dream Theater ?
J : C’était très différent. Lorsque nous avons décidé de faire cet album, nous avons réalisé que pour le composer de manière efficace il fallait que John et moi soyons dans le même studio, avec nos guitares et claviers. Car il fallait aller au fond des choses, c’était un énorme puzzle non pas d’un point de vue des paroles mais surtout pour l’histoire et les différentes scènes, il fallait que tout s’articule sans accroc. Puis il fallait réfléchir sur les différentes couleurs et nuances à apporter pour les différents personnages et les différentes émotions sans parler des Nomacs et de leurs sonorités électro. Donc nous nous sommes enfermés dans le studio, travaillant tous les jours, faisait des briefs régulièrement pour voir où nous en étions. Je me rappelle une fois, je cherche quelque chose pour un thème précis mais rien à faire. J’ai donc décidé de sortir et de marcher un coup et l’idée m’est venue lors de ma ballade. En rentrant je l’ai joué et c’était ce qu’il fallait ! Il s’en passe des choses parfois ! (rires)
Pour le peu auquel nous avons eu accès, l’abondance d’éléments théâtraux était frappante comme lors de “Lord Nafaryus” où certains rythmes peuvent faire référence au cabaret français. Que pouvons-nous attendre de plus ?
J : Il y a tellement d’éléments différents et c’était très intéressant car nous devions faire des recherches à leurs sujets. Il y a une partie tango à un moment ou bien un passage faisant penser aux parades militaires, il y a tellement de choses qui s’emmêlent mais il y a également beaucoup de sons électroniques qui furent très fun à créer avec tous mes synthétiseurs et je suis quasi certain que certains fans voudront un album électronique signé Dream Theater. (rires) Ces sons renvoient donc aux Nomacs et sont plutôt cool mais elles sont également très divertissantes, et d’un point de vue conceptuel c’est ce qui rend le peuple amorphe et insensible.
Pour quelles raisons ce double album est-il si long ? Y a-t-il de longs titres ?
J : Plus que les morceaux, c’est l’enchainement des morceaux et leurs interactions qui rendent cet album si long. On peut le voir de deux manières : ces titres sont les plus courts qu’on ait jamais composés ou bien c’est l’album contenant le plus de contenu qu’on ait jamais fait. (rires) Il faut le considérer comme un tout et ne pas les dissocier les uns des autres. Il y avait tellement de scènes à traiter qu’il était nécessaire de décomposer cela en petites parties.
Quid des personnages ? Comment vont-ils interagir autour de la musique ? Est-ce une partie du show justement ? Quid du show ?
J : Pour ce qui est des concerts, nous jouerons l’intégralité de l’œuvre et il y aura beaucoup d’éléments visuels pour habiller et accompagner cette expérience et cette histoire. James LaBrie est la voix de tous ces personnages et module parfaitement son chant pour incarner les différents protagonistes; je dois dire qu’il a fait un excellent travail avec ces différentes approches. Mais pour décrire cette histoire de la plus efficace des manières, deux choses : la première est que nous allons jouer dans de belles et petites salles pour que le public puisse entendre de la plus parfaite des manières la musique. Deuxièmement, nous avons travaillé à une autre approche scénique. C’est-à-dire que la structure de lights que nous avons l’habitude d’avoir n’y sera pas, à la place, il y a beaucoup d’éléments visuels qui seront entrepris et que nous n’avons jamais utilisés auparavant. Nous avions l’habitude de travailler avec différentes personnes sur ces projets mais cette fois-ci c’est une unique entreprise, spécialisée dans le domaine et originaire de Montréal au Canada -là où des gens font des choses de ce type (rires)- qui s’en chargera. Et je dois dire que cette expérience s’annonce incroyable.
Allez-vous le jouer en totalité ?
J : Oui, nous sommes bien clairs à ce sujet. Nous allons vous présenter “The Astonishing” en live. Si tu t’attends à entendre “Pull Me Under” tu devras patienter jusqu’à la prochaine tournée. En revanche pour voir Dream Theater pour un show unique en son genre, viens nous voir !
Etait-ce plus éprouvant mentalement de travailler sur un tel projet comparé à un simple album ? Comment se sentait le groupe ?
J : Nous avons fait face à une montagne de travail. Dès la fin de notre précédente tournée mondiale, John et moi avons eu une multitude d’idées puis nous avons mis en commun celles-ci. Lorsque le groupe est arrivé, James par exemple, il devait s’approprier tous les personnages car il n’a pas pris part à la composition, il découvrait la chose et était notre star absolue et son travail fut remarquable. Mike Mangini a fait de même avec ses touches magiques et John Myung également, il a dû performer durant plus de deux heures. Ce projet était tout simplement énorme.
Qu’apprécies-tu le plus à propos “The Astonishing” comparé à tout ce que tu as fait dans ta carrière ?
J : L’une des choses qui me touche le plus est d’avoir collaboré avec John Petrucci de cette manière-là car des seize années passées au sein de Dream Theater, beaucoup des choses que j’ai faite n’ont pas tant été reconnues à leur juste valeur. Les livrets indiquent souvent que la musique a été composée par le groupe or ce n’est généralement pas vrai. Depuis mon arrivée, John et moi sommes toujours ceux concernés par la composition. Donc de voir que finalement la musique a été composée par John Petrucci et Jordan Rudess, “ok ça a pris du temps” mais cela est honnête. Outre cet aspect-là, j’ai beaucoup apprécié cette complicité entre nous, c’est très inspirant de travailler ensemble et, la preuve, d’incroyables choses en découle.
Tu es vraiment à fond dans tout ce qui touche à la technologie, les applications etc. Penses-tu qu’une telle réalisation aurait été possible auparavant d’un point de vu matériel ?
J : Je le pense oui cependant nous n’étions pas dans le mood pour un tel projet.
Enfin nous sommes “RockUrLife” donc qu’est-ce qui rock la vie de Jordan Rudess ?
J : RockUrLife ? Cool ! Je vis pour la musique et les sons, c’est l’une des principales choses qui me tient à cœur. Prendre du temps et travailler sur de nouveaux sons, de différents acabits et de différentes influences. Vivre paisiblement, faire de la musique, ma famille, voyager : toutes ces choses-là rocks ma life.
Site web : dreamtheater.net