Le 31 mai dernier, RYL! a pu taper la discut’ avec le groupe parisien de “rock vulgaire” peu de temps avant son concert au Batofar. Retour sur cet entretien à la cool !
Ludo (chant) : Ceci est un bip de question à la con, à chaque fois qu’une question sera trop con vous entendrez ce bip !
Salut Bagdad Rodeo !
Tous : Salut !
Pouvez-vous vous présenter pour ceux qui ne vous connaissent pas encore ?
L : Biiiiiiiiiiiiip ! (rire général)
Allez, je vais faire un petit historique, le groupe a démarré en 2009 sur les cendres d’un groupe précédent, LIK…ID qui a perduré pendant une dizaine d’années. En fait on s’était un peu lassé de ce qu’on faisait, Ça arrive, du coup on est partis sur un concept un petit peu plus rock : Bagdad Rodeo. Il y a Dadou à la batterie, Tof et Cha à la gratte, Matt aux claviers, Louis aux platines, Yayo à la basse et moi au chant. Un groupe de 7 personne, ça fait du monde !
La question bateau qui va me valoir un bip, d’où vient le nom du groupe, “Bagdad Rodeo” ?
Tous : Non, non, celle là elle est bien par ce qu’on ne l’a pas encore trop faite !
Cha (guitare) : En plus on change à chaque fois.
Tof (guitare) : Finalement je ne sais pas si on doit l’expliquer, vu qu’il y a une chanson dans le nouvel album qui va expliquer tout ça ! On te laisse l’écouter… (rires)
L : Naaaaaaaaaan, naaaaaaaan, reviens ! Pour le truc, en fait Bagdad Rodeo ça vient du fait qu’on se considère comme faisant parti de “la génération Bagdad”. La génération rythmée par la guerre du Golf et sa médiatisation, l’envolée américaine “je veux contrôler le monde je fais comme je veux partout”. Le coté “Rodeo” c’est pour accentuer le coté “n’importe quoi” de tout ça, le coté parfois humorisitique des choses. Ce sont deux mots qui ne vont pas vraiment ensemble, ça ne colle pas, mais ça sonne bien. Un assemblage foireux mais qui marche.
T : C’est à la fois politique et à la fois léger. Ça nous permet d’aborder les choses sans se prendre au sérieux sur des thèmes politiques sans tomber dans la thèse; on est un peu “connardos”.
L :”Irrévérencieux” c’est bien !
Pas je m’en-foutiste, donc.
L : Surtout pas je m’en-foutiste par ce qu’on se sent concernés par les thèmes qu’on aborde.
C : Il y a un vrai discours sérieux sur le fond politique, mais on accentue le coté rock n’roll “connardo”
Quelles sont les influences de Bagdad Rodeo, dans le sens large ?
T : Les influences BR c’est un mélange entre ce qui a été fait en rock français des années 80 comme les Bérus, Ludwig, cette scène là et d’autres influences comme Noir Désir…
C : …Renaud de cette époque pour les paroles !
T : …et aussi des choses plus américaines par ce qu’on a été bercé par tout ça : AC/DC, Guns…
L : Tu parles d’américains, AC/DC ils sont australiens ! (rires)
T (imperturbable) : …mais aussi des trucs comme ZZ Top, Aerosmith, t’entends ce genre de chose, des fois ça sent le Texas. C’est des sonorités qu’on revendique un peu.
L : Johnny Cash, Johnny Cash ! La grande famille des influences blues rock quoi. Cette couleur…
Cette couleur qui sent un peu la pisse, tu vois ! (rires)
…et la bière !
Tous : Et la bière !
En parlant de texte engagés, est-ce que c’est le point de rencontre avec Kemar (No One Is Innocent) et de votre collaboration, comment ça a accroché ?
L : Si tu veux, le fait de passer sa vie à écrire des textes engagés ça a donné un prétexte à une rencontre, mais c’est pas l’élément déclencheur. Pour la petite histoire, on était déjà sur le point d’enregistrer l’album avec Shanka, donc le gratteux de No One, c’était acté. Puis on mis le morceau en boite, j’ai pondu un texte sur le refrain et en l’écoutant, au niveau tessiture et au niveau texte, je me suis dit “ça lui irait” et je suis parti sur ce principe à la con. J’ai pris mes couilles et je suis allé voir Kemar et je lui ai dit “écoute gros batard est-ce que tu veux chanter sur ce morceau ?” (rires) Alors bien sûr il m’a dit “Ben c’est de la merde”, comme d’hab. Première approche. Puis en fait il s’est prit au jeu, il est venu à la maison, on a enregistré le truc et ça l’a fait direct ! Du coup on a construit un truc ensemble qui est super bien, maintenant c’est devenu un peu un référent sur plein de choses, on a beaucoup discuté.
T : Mais non, tout ça c’est grâce à mes pates “à la carbonara” ! (rires).
Du coup le processus de compo de BR c’est toi, c’est le groupe, c’est en studio, c’est en répét’ ?
L : Il y a deux façons de procéder :
– Soit je reçois un riff qui est cool et j’arrive à poser un texte dessus, et là on part !
– Soit je trouve un truc avec la gratte, pourri, puis je trouve un début de texte qui donne envie aux mecs de faire une instru, ou vice versa.
On bosse jamais en répét’ “comme ça” par ce qu’on est sept et bosser à sept en répét’ avec chacun une idée : tu peux pas ! Tu ne peux pas canaliser tout le monde, donc nous on bosse vachement en mode “on est à la zon-mé on s’enregistre”, on fait des pré-prod , des maquettes et on s’envoie le truc et tac-tac on y est ! Pas mal d’interactivité et ça permet de se poser pour l’écoute.
Vous êtes un groupe hyper branché quoi !
L : Bah ouais attend, ça va, j’ai un iPhone ! (rires)
C’est pas très rock n’roll ce truc-là?
L : Je m’en fous je l’ai payé 9 euros, ça c’est rock n roll ! (rires)
Du coup de quoi parle le prochain album en dehors de la chanson sur le nom du groupe ?
L : De saucisson ! (rires)
T : On est parti sur un concept ra-di-ca-le-ment différent de “Bagdad Rodéo” (ndlr : nom du premier album), on a décidé de l’appeler “Beyrouth Corrida” un truc complètement différent quoi !
Matt (claviers) : Ah non on avait dit “Kaboul Chamboule-Tout” ! (rires)
T : Non mais il reste dans la lignée, des textes engagés et des choses plus légères…
L : Il parle de la vie de tous les jours.
C : Mais il est plus abouti musicalement !
T : En même temps on a que quatre morceaux pour le moment ! (rires)
Là c’est votre influence Negra Bouch’beat ?
(rires)
Vous enregistrez à nouveau avec Shanka ?
T : On a fait le premier avec Shanka, on fait le deuxième avec lui, on bosse “à domicile”, ça continue.
L : Bah il est marrant ! (rires)
T : Accessoirement il bosse bien, mais c’est surtout par ce qu’il fait des blagues !
L (l’air connaisseur) : Ah elles sont bonnes !
En tant qu’indépendants, qu’est-ce que vous pensez de la mascarade médiatique de l’industrie du disque qui fait moins de bénefs, certes mais qui continue à générer beaucoup d’argent, sans se remettre en question ?
L : C’est pas une mascarade il y a moins d’argent, c’est clair.
T : Les premiers à trinquer, on est au courant, c’est quand meme nous quoi, c’est tous les petits groupes.
Ça a vraiment changé la donne pour les petits groupes ? Ça a toujours été difficile non ?
Tous : Ouais ! (Brouahaha) Ah ouais ! Mais maintenant… Non mais il n’y a plus de pognon !
T : Il y a moins de choses pour faire de la production, c-à-dire, moins de budget pour faire des albums, moins de moyens pour faire du développement, tu veux trouver un tourneur, le mec te dit “ouais heu c’est compliqué le développement…”. Les mecs ils signent un groupe par an, un groupe tous les deux ans, c’est tout. C’est quand même un truc qui a fait du mal à tous les petits groupes. Moi, je me souviens quand, à l’époque, j’étais jeune, dans ma jeunesseuh quaaa, dans les annnnnées 90…
Ah c’est toi qui vient de Montpellier ?
(rires)
T : T’as reconnu ? J’ai l’accent du nord… …de Montpellier (rires) Non mais dans les années 90 tous les potes plus âgés que moi qui avaient des groupes s’en sortaient mieux pourtant ils avaient pas Internet, n’étaient pas signés, pas de label. Quand t’avais un label, t’avais tout le reste : prod, tournée, plein de choses ! Nous on a un label, mais c’est plus pareil, faut beaucoup faire par nous-même.
C : Déjà on s’en sort bien, être signé aujourd’hui, en gardant une certain indépendance c’est tendu !
Être parisiens pour ça, ça aide ?
Tous : Ouais, ouais ! Mais ouais bien sûr.
L : Honnêtement, vu qu’il n’y a plus que le copinage et toutes ces conneries là pour avancer, les rencontres, si t’es pas sur Paris en ce moment c’est plus dur. Même si Internet prend le relais et que ça fédère tout le monde, à un moment donné y’a des trucs qui ne se débloquent que par relation.
T : Internet c’est à la fois un lieu de liberté, et à la fois…
C : …la mort du disque !
T : … à la fois plein de chose, y’a a boire et à manger, tout le monde met son album sur Internet. Faut vraiment être curieux pour que ça devienne un outil culturel, mais est-ce que les gens sont curieux ?
L : C’est clair. Regarde sur MySpace, tu cherches quoi que ce soit t’as 2500 possibilités, ça devient n’importe nawak. Il va falloir que tout ça, ça se pète la gueule pour aller vers du qualitatif. Tu as toujours la masse et le qualitatif qui va émerger. Il y a un site qui va émerger en proposant de la qualité et c’est celui là qui deviendra le “grand media” et fera du pognon et ça repartira pour une boucle… Après ce sera eux les grandes maisons de disques, et ce sera eux qui enculeront tout le monde, et ainsi de suite ! (rires jaunes). Ça sera pareil que les radios ou la télé, ça finira pareil. Moi je le vois comme ça. Mais je suis très content d’avoir Internet hein. Je trouve que c’est bien, ça m’a permis de découvrir plein de choses parce que je suis curieux ! Faut juste essayer de bricoler la dedans, tranquillou et c’est ce qu’on fait !
C : Quand tu n’as pas de budget promo, même dans un label indé, c’est quand même un outil hallucinant. Autant tu peux tout télécharger, autant c’est un moyen super efficace de faire de la promo.
Est-ce que ça ne force pas les artistes à faire du live pour faire leur promo, ce qui est finalement bon pour le public ?
L : Ça force les artistes à faire du live, mais surtout en ce moment, ça force les artistes indés à perdre de l’argent sur le live. On fait plein de dates déficitaires, c’est dur !
Sur un sujet un peu plus léger…
L : Haha, là on t’a pété les rotules ! (rires)
Tu ne me pètes rien du tout, tu parles de déficitaire, je connais bien le sujet ! (rires) (ndlr : en tant que photographe)
L : Ouais il y a une pression aujourd’hui sur ces métiers, c’est pareil.
Sur un registre un peu plus léger, donc… (rires) Quelqu’un qui vient voir BR en concert il doit s’attendre à quoi ?
C : à de l’amour !
Tous : Ouais ouais !
L : C’est de l’énergie, on se prend la tête pour bien bosser pour les préparer ces concerts ! C’est de la bonne humeur, c’est important, malgré le fait qu’on ait des choses à dire et qu’on soit pas content, on peut les dire dans la bonne humeur. On est pas obligés de partir avec la rage au ventre, partir avec un peu d’ironie ça fait du bien. Et puis c’est de la sueur, par ce que ça rime avec bonne humeur. Ensuite c’est du beurre ! (rires)
C’est pour dans les loges ça ? (rires) Vous êtes définitivement un groupe de scène, donc ?
Tous : Ouaaaaaaaaaaaais !
Vous ne vous éclatez pas forcément en studio ?
C : Si si, on aime ça !
L : Ah si moi je suis un geek du studio, travailler le son, la prise de son, faire des morceaux c’est génial ! Bon, maintenant on est mauvais… (rires) Indéniablement on est plus forts en live !
T : C’est plus dans notre culture.
C’est rock n’roll !
L : Voilà c’est ça, c’est rock n’roll, c’est dur de rester figé le cul sur son tabouret faire “gniiiinn griiin hinnnn” (mimant une gratte).
En ce moment il y a beaucoup d’émergence de personnalités, très peu de groupes, vous faites le même constat ?
L : C’est fini ça ! On arrive à la fin de ces conneries. La Nouvelle Star, Star Ac’ et tout c’est mort ! On commence en en avoir plein le cul d’avoir des chanteurs vides. Sans déconner dans les chanteurs solos qui sont sortis ces derniers temps…
Pourtant “MyMajorCompany” s’en sort ?
L : Ils vont avoir un problème bientôt. Écoute moi bien monsieur “MyMajorCompany” quand tous les gens auront compris qu’en misant 10e ils ne récupèreront jamais leur argent et que tu les as bien enculé. Ils vont tous te faire un procès, tu l’auras bien dans le cul et tu pourras pas sortir Grégoire ta grosse merde ! (gros rires). En fait il n’y a pas de groupes pour leur tenir tête !
Bah, et vous ?
L : Mais non nous on est de la merde encore niveau promo ! On a pas les outils. A l’époque, quand t’as un Noir Désir qui gagne les Victoires De La Musique. L’événement ça n’est pas les victoires de la musique c’est “Noir Des’ qui gagne” tous les autres artistes ils passent à la trappe. Un groupe reste toujours plus fort dans le coeur des gens.
J’estime aussi que c’est une force, mais c’est un coût en compromis, discussions, investissement, en planning.
L : C’est toute la difficulté d’avoir un groupe maintenant, mais les mecs (ndlr : Noir Desir) quand ils ont commencé dans le milieu de la zik ils étaient dans les mêmes délires que nous, avant que M. Barclay vienne avec sa belle chemise blanche et ses billets.
(bruit dans la salle)
L : Eh tu fermes ta gueule, là je suis en interview ! (rires)
C’est la même énergie que sur scène ! (rires)
L (s’adressant aux bruyants) : Non mais je te fais des bisous quand même ! Non mais le coup de l’artiste unique comme en ce moment ça passera, jusqu’aux prochaines “tournées nostalgie” avec tous les vieux.
L’actualité de Bagdad Rodeo ?
L : Le Batofar ce soir. On va enregistrer un deuxième album cet été, qui est déjà en préparation. Sortie fin 2011/début 2012, tournées dans la suite, concerts comme on peut, en bricolant avec trois bouts de cartons et deux bouts de ficelle. Se racheter un minibus par ce qu’on a pété le moteur du nôtre et euuuuuuh…. des “beaux projets” quoi !
Yayo (basse) : Laver nos chemises par ce que franchement… (rires)
T : Retrouver mon Stetson qu’on m’a piqué à La Cigale ! (rires) (ndlr : en première partie de No One).
Des dates en festival cet été ?
C : Le 2 juillet dans le 77 pendant le festival Rock’Ambolesk.
L : On part ensuite six mois au Japon, c’est pour ça que vous ne pouvez pas nous voir ! (gros rires)
C (imperturbable) : …on part ensuite dans l’Aveyron…
T :…après le Japon !
C : …après le Japon, c’est à peu près toute notre tournée d’été.
T : On a commencé à tourner depuis juin 2010. Là on est un an plus tard, il est temps de passer à l’album.
L : On va surtout s’occuper de l’album cet été, par ce qu’on bosse à coté ! Du coup les vacances d’août sont pratiques…
Un dernier mot ?
L : Ouais prenez soin de vous les gens, arrêtez de faire de la merde un peu là, et puis on sera bien ! Euuuuuh non vraiment, le truc, un dernier mot : votez à gauche ! (rires) Définitivement, peu importe le trou de balle, de toutes façons ça sera un trou de balle, mais votez à gauche !
T : Puis soyez intelligent, regardez pas trop la télé, faites un peu gaffe…
L : Arrêtez de cautionner ces trucs ! Parce que c’est aussi à cause de vous si on en est là, à un moment donné ! Arrêtez de regardez les émissions de merde en disant “non non j’ai pas regardé, non, non, non !”. Si t’as regardé ! Traitre ! (rires)
Merci Bagdad Rodeo ! Engagés jusqu’au bout !
L : Non, non (rires)
Site web : bagdadrodeo.org
