
Rencontre avec Ol Beach, chanteur et leader d’Electric Pyramid, à l’occasion de la sortie du nouvel album du groupe, LION. Entre souvenirs personnels, vision du monde et amour de la scène, Ol revient avec sincérité sur son parcours, ses inspirations et les messages qu’il souhaite transmettre à travers sa musique. Une conversation placée sous le signe de l’optimisme, de la simplicité et du partage.
Quand on écoute ta musique, il y a quelque chose de très frappant dès le départ : une approche assez positive. D’ailleurs, ça s’entend dès le premier morceau “Diorama” qui plonge directement dans cette idée de rêve, d’optimisme. C’est assez étonnant.
Ol Beach (chant) : Être optimiste ?
Oui, surtout dans les temps qui courent.
Ol : Justement, aujourd’hui, je crois qu’il faut être optimiste dans la vie, parce que la vie, c’est un miracle. Même s’il y a des raisons d’avoir des insécurités sur l’époque qu’on traverse, je pense qu’à la fin, l’humanité va survivre à tout ça. Donc oui, croire dans les gens, c’est essentiel.
Ça demande aussi d’avoir une vision à long terme, de la patience, et un regard positif sur les autres. Comment est-ce que tu arrives à canaliser ça, ou à l’appliquer dans ta vie de tous les jours ?
Ol : On fait de notre mieux. Il y a des moments où on échoue, souvent, mais il faut toujours mettre un pied devant l’autre et continuer à y croire. Sinon, il n’y a pas vraiment de raison d’exister dans ce sens.
Et apprendre de ses échecs.
Ol : Oui, il faut avoir le courage d’aimer.
Le premier morceau d’un album donne aussi le ton. C’est la première impression qu’on laisse. Pourquoi avoir choisi de commencer avec celui-là ?
Ol : C’est l’énergie qu’il dégage. Il y a quelque chose qui nous pousse, qui nous donne de l’élan. Et puis on aime vraiment ce morceau, donc c’était un choix assez simple dans le tracklisting. Il représentait bien l’idée de l’album. Et on était tous d’accord, il n’y avait pas de désaccord dans le choix. C’était dans l’écriture et dans le fait de le faire. L’énergie derrière, c’est de pouvoir trouver l’idée de l’amour de la vie, et de ces personnes ensemble. C’est l’imagination de tout ce qui est possible.
Dans l’amour de la vie, on retrouve aussi le titre “Lions”, un titre très personnel pour toi.
Ol : Oui, c’était à propos de ma fille. Elle était malade à la naissance, on était à l’hôpital pendant quelques jours. Elle a dû rester sous des lumières bleues, elle avait une forme de jaunisse assez grave. Elle était si petite, mais il y avait une force incroyable en elle. Et puis, j’étais devenu père. C’est de là que vient cette idée.
Dans le morceau, on ressent cette dualité entre la fragilité et la force. C’est quelque chose qui ressort beaucoup dans “Devil Eyes“, et surtout ici.
Ol : Oui, je crois qu’on a tous cette dualité dans la vie. Ensemble, on essaie d’assumer notre fragilité, mais aussi d’avoir du courage en soi.
Le fait de continuer avec un deuxième album, c’est aussi une forme de courage. Est-ce que c’est venu naturellement ou il y a eu des doutes ?
Ol : Non, on voulait vraiment le faire. En fait, on avait enregistré l’album, tout était prêt pour le mastering, et j’ai perdu les fichiers. On a dû tout réenregistrer une seconde fois. C’est à ce moment-là qu’on s’est demandé si on devait recommencer ou non. Finalement, on a décidé de le faire, et je suis très heureux de cette décision. En tant que musicien, c’est ça la vie. À la fin, on a besoin d’écrire, de créer, et de continuer.
C’est là où l’approche positive prend tout son sens. On pourrait voir ça comme un échec, se dire qu’on ne va pas tout recommencer. Mais c’est aussi une opportunité de faire mieux, parce qu’on a appris des premiers enregistrements.
Ol : On a dû penser comme ça, sinon ça aurait été trop dur à encaisser.

Tu te souviens des premiers enregistrements ? Est-ce que tu sens que le résultat final est encore meilleur ?
Ol : Oui, c’est beaucoup mieux. On a perdu une année de travail, mais dans cette deuxième version, on a laissé de côté des choses qu’on avait peut-être trop retravaillées avant.
Parfois, trop de travail peut tuer la magie. Là, je crois qu’on a gagné en spontanéité. Travailler à l’excès peut parfois étouffer le morceau.
C’est ce qu’on voit beaucoup aujourd’hui : une surproduction, des effets dans tous les sens. On oublie que la musique doit respirer, qu’il y a besoin de silence aussi. Vous avez réussi à retrouver ça ?
Ol : Oui, exactement. Sinon, on peut vite se perdre.
Comment on fait ça ?
Ol : Je pense qu’il faut savoir s’arrêter. Accepter de laisser des choses imparfaites, mais qui sonnent juste. Il ne faut pas trop intellectualiser non plus. On essaie de faire comme ça, je ne sais pas si on y arrive toujours, mais c’est l’intention.
C’est intéressant ce que tu dis, qu’il faut accepter l’imperfection.
Ol : Oui, c’est une contradiction en soi. On essaie toujours de faire du mieux qu’on peut. Mais à un moment, il faut avoir la maturité de se dire que c’est assez bon. Ça peut toujours être mieux, bien sûr. Peut-être qu’on fera mieux la prochaine fois. Et c’est comme ça qu’on avance. Sinon, on ne sortirait jamais d’album. Parce que ce serait impossible.

Quand on parle de la quête du morceau parfait, on pense souvent à ce parfait équilibre entre quelque chose d’accrocheur, de puissant et d’intemporel. Tu as des exemples de morceaux que tu considères comme parfaits ?
Ol : Oui, bien sûr. Les grands groupes des années 70 ont écrit des morceaux comme ça. “Hotel California”, par exemple, c’est une chanson parfaite. C’est pour ça que ces artistes restent parmi les plus grands, même aujourd’hui. Il y a des morceaux tout simplement incroyables. Pour nous, c’est une source d’inspiration. On essaie de faire des choses dans cet esprit. Je pense qu’on n’atteindra jamais ce niveau-là, mais on peut toujours rêver, oui.
Ce sont des morceaux qui ont une forme d’immortalité. Ils parlent à tout le monde, peu importe l’origine ou le bagage musical. Dans l’album, tu explores aussi cette idée de l’immortalité ou, en tout cas, une autre vision de la vie. C’est ce que tu abordes dans “Land Of Ghosts”. Tu peux nous en dire plus ?
Ol : “Land Of Ghosts”, pour nous, parle de la vie à Londres. De ces grandes soirées où tout le monde rêve de réussir, de devenir une star. Et puis, le lendemain, tout s’est évaporé. C’est un peu ça, l’idée de la chanson.
C’est aussi une chance, quand on fait de la musique, d’être anglais.
Ol : Oui, ça aide.
C’est comme si vous étiez déjà infusés d’une culture musicale extrêmement riche, avec des récits de gens partis de rien, et en plus la langue.
Ol : Oui, c’est vrai. Mais au fond, je crois que ce sont les Américains qui ont fait que l’anglais est devenu la langue de la musique. Je pense que je suis quelqu’un d’assez fataliste. Parfois, les choix sont déjà faits pour nous. C’est inscrit dans les étoiles, la vie qu’on mène, ce qu’on fait, et là où on finit. Pour moi, c’est comme ça.
Tu as fait des choix assez radicaux dans ta vie. À la base, tu étais concertiste, et finalement, tu as décidé que ce n’était pas pour toi.
Ol : Oui. Disons que, pour moi, le jazz, ce n’était pas ce que je voulais faire. J’aime les grandes mélodies, les refrains puissants, jouer devant un public, rassembler les gens. C’est ça, la musique pop, le rock.
J’admire des artistes comme Miles Davis, bien sûr, mais ce n’est pas Queen. Ce que je veux, c’est être sur scène, dans une grande salle, devant les gens. C’est ça, la puissance de la musique pop.
C’est l’idée d’une communion, d’un moment de partage.
Ol : Oui, c’est la seule chose dans la vie qui nous rassemble vraiment. Tout le reste, c’est souvent de la compétition. Mais avec la musique, on entre dans une salle, on en ressort, et on se sent plus proche de la personne à côté.
C’est ça, la musique.
Quand tu es arrivé en Suisse, tu as eu l’impression d’être un peu à part ? Comment ça s’est passé ?
Ol : La Suisse, c’est un pays incroyable : les montagnes, les lacs, le ski… J’ai eu beaucoup de chance.
C’est là que tu as appris à parler français ?
Ol : Oui. Mes parents m’avaient dit que ça prendrait six mois. Ça a pris un peu plus longtemps !
On est allés dans une école française, ma sœur et moi. Il nous a fallu une bonne année pour vraiment parler. Et puis, être inclus a pris encore plus de temps. On était “les Anglais“, donc il y avait un petit fossé. Mais au final, ça s’est fait.
Vous aviez quel âge ?
Ol : J’avais 10 ans.
C’est un âge où on a besoin de s’intégrer.
Ol : Oui, ce n’était pas simple. Mais je pense que mes parents ont fait le bon choix.
Plutôt que de rester en Angleterre ?
Ol : Oui. Pouvoir parler d’autres langues, ça ouvre des portes. Et ça donne une vision plus européenne. L’Angleterre, c’est… l’Angleterre. Partir en Suisse nous a vraiment ouvert les yeux. C’est devenu une part de notre histoire.

Apprendre une langue, c’est aussi apprendre une culture, une manière de penser. Qu’est-ce que le français t’a apporté ?
Ol : J’ai appris à bien aimer le fromage, déjà ! (rires) Mais au-delà de ça, oui, j’ai acquis une vraie vision européenne. La France est au cœur de l’Europe. C’est aussi une manière de ne pas juste attendre que les choses se fassent. C’est ce que j’essaie aussi de transmettre à ma fille : elle apprend l’italien. J’espère que ça nous rend meilleurs. On veut y croire.
Un enrichissement culturel, une ouverture. Dans ton album, on sent d’ailleurs beaucoup d’influences. Il y a un morceau qu’on a beaucoup aimé, “Devil Eyes”, qui fait penser à “Blue Hotel” de Chris Isaak. Il y a vraiment cette essence du rock. Pour toi, quel est le morceau auquel tu es le plus attaché ?
Ol : Je crois que… “Rio”. Mais je les aime tous. En live, “Devil Eyes”, c’est un morceau qu’on aime beaucoup jouer. Et “Supersize”, c’est un titre auquel je tiens vraiment. L’histoire derrière est forte. Comme dans “Blue Hotel”, l’idée, c’est que l’humanité pourrait aimer davantage, partager l’amour qu’on garde souvent pour soi, et ne plus croire aux histoires qu’on nous impose. Je pense que le monde s’en porterait mieux. C’est quelque chose en quoi je crois profondément. Heureusement, je les aime tous.
Pour justement dépasser les conflits actuels, la peur de l’autre. On est dans une logique de rejet, de non-inclusion. On a du mal à se connecter. Comment tu fais pour rester optimiste ?
Ol : Parce qu’à la fin, le soleil se lève tous les matins. La vie, c’est l’histoire du monde. Quand on regarde autour de soi, c’est de la magie. Il faut juste croire en cet espoir. Sinon, il ne nous reste rien. Je crois qu’on pense trop, qu’on réfléchit trop. On est des animaux, mais l’univers autour de nous… il est extraordinaire. L’optimisme est là.
C’est le message que tu aimerais que les gens gardent en écoutant l’album ?
Ol : J’espère, si c’est possible.
Au début de “Mindful Eye”, il y a des sonorités très contemplatives. Ça évoque presque le bouddhisme.
Ol : Oui, c’était l’idée. C’est Chris, notre batteur, qui a construit cette intro. Du coup, les paroles se sont naturellement basées sur ce concept. Il y a cette idée du Third Eye. On a tous quelque part… une forme de conscience intérieure.
C’est quelque chose que tu apprécies depuis toujours, ou que tu as étudié ?
Ol : C’est quelque chose qu’on doit travailler. La méditation, dans ce sens, demande un engagement. Il faut s’y consacrer.
Qu’est-ce que tu fais, toi ?
Ol : J’essaie. En ce moment, j’ai moins de temps, mais j’essaie de m’améliorer chaque jour. Comme je le disais, faire de son mieux, c’est déjà beaucoup.
On a moins de temps, ou on ne le prend pas ?
Ol : On ne le prend pas assez. On pense toujours qu’on n’a pas le temps pour ce genre de choses.
C’est une question de priorités.
Ol : Oui, exactement. Et souvent, on se dit qu’on commencera demain.

C’est un bon message. Protecteur et optimiste. Quelles sont les prochaines étapes pour toi ?
Ol : On a encore dix concerts à faire. On tourne ici, on prend les choses au jour le jour. Ensuite, on retournera en studio pour enregistrer de nouveaux morceaux. On revient en mai pour jouer à nouveau, et j’espère faire quelques festivals cet été. Continuer, tout simplement.
C’est une belle récompense.
Ol : Oui. Pouvoir jouer, ça montre que les choses avancent. C’est une opportunité qu’on saisit.
Le live, c’est ce que tu préfères ?
Ol : C’est différent. J’adore sortir jouer. Ça développe la musique, lui donne une nouvelle dimension. Parfois, en live, on se dit qu’on aurait dû faire ça sur l’album ! Et puis, être en tournée avec la famille du groupe… c’est beaucoup de plaisir.
Notre média s’appelle RockUrLife, donc dernière question : qu’est-ce qui rock ta life ?
Ol : Je suis un homme très chanceux. J’ai une belle femme, une petite fille, un grand chien… et la musique. La famille, les amis, la musique… c’est ça, la vie.

Site web : electric-pyramid.com