C’est lors qu’une journée spéciale en promotion à Paris que RockUrLife a eu la chance de rencontrer Ben, guitariste de l’emblématique groupe de hardcore français L’Esprit Du Clan. Après quatre années de doute, les quatre musiciens, originaires de la région parisienne, signent leur grand retour avec l’album sobrement intitulé “Chapitre VI” disponible depuis le 15 avril dernier. L’occasion d’éclaircir sans langue de bois les raisons de ce retour très attendu sur la scène metal française.
Vous êtes de retour en 2016 avec un nouvel album “Chapitre VI“. Pour commencer, pourquoi ce retour après avoir arrêté ?
Ben (guitariste) : Le dernier album est sorti en août 2011 et notre dernier concert était en décembre 2012 exactement. Donc ça fait presque quatre ans qu’on n’était plus sur scène. Ce retour parce qu’on en avait envie tout simplement. On s’est décidé là, il y a peu de temps. Tout s’est accéléré clairement quand on s’est revu, on se revoyait déjà pour la plupart durant la pause. Déjà quand on s’est arrêté, il n’était pas question que se soit ni définitif ni qu’on reprenne. On ne savait pas. Pourquoi la reprise ? Tout simplement parce que les deux membres fondateurs du groupe, à savoir Arsène et Chamka, qui est l’autre guitariste, se sont vu en juin l’année dernière. Ils se sont parlés et puis ils sont venus sur le truc “est-ce que ça te dirait de refaire le groupe et tout ?”. Il fallait que ça passe par eux de toute façon pour que ça se refasse. Moi, j’aurais bien initié le truc mais si eux deux ne parlaient pas entre eux, c’était compliqué donc ça s’est passé comme ça. Très rapidement, on s’est tous vu, et on a repris, pas tout à fait sous le même line up qu’auparavant mais on a repris avec quatre mêmes membres.
Si ce n’est pas indiscret, qu’est-ce que vous avez fait entre temps ? Aviez-vous d’autres projets musicaux ?
Ben : Pour certains non. Pendant la pause, j’ai bossé à titre personnel en tant que régisseur dans une salle parisienne. J’ai eu l’opportunité d’accéder à ce projet, on me la proposé et j’ai accepté. On est tous techniciens en parallèle du groupe, presque tous, depuis pas mal de temps, on est intermittents. Quand on a arrêté avec le groupe, j’ai eu cette opportunité donc j’ai foncé. L’autre guitariste est dans la pyrotechnie, depuis des années, donc ça lui permet de beaucoup voyager. Il bosse pour une grosse boite donc c’est vraiment une deuxième passion. Arsène a continué un peu la musique dans un groupe qui s’appelle Parisian Walls qu’on a composé tous les deux avant que l’on arrête avec L’Esprit Du Clan. Moi, je n’ai pas continué après le studio, j’ai fini mon truc, je me suis pas mal investi dans la composition et tout, mais je n’ai pas continué. Lui a continué, a fait quelques dates, une dizaine je crois. Et puis sur la fin, il s’est arrêté. Notre batteur a un groupe de brutal death qui lui prend un peu de temps, il est aussi prof de batterie, il s’investit beaucoup, il fait des masters classes. Donc il est souvent occupé à promouvoir son truc. Et pour ceux qui ne sont pas resté, comme Shiro le deuxième chanteur, lui il est dans le sport depuis très longtemps. Donc il a créé une école en Thaïlande, donc il s’est vraiment investi dans ce domaine. C’était déjà une passion qui lui prenait pas mal de temps à l’époque, c’est ce qui la conduit à ne pas reprendre maintenant avec nous. Et Clem, l’ancien bassiste, il joue dans un autre groupe, musicalement, il ne se retrouvé pas dans L’Esprit Du Clan la dernière année donc il a préféré arrêter. Mais cette pause a été salvatrice pour tout le monde. Moi, j’ai vraiment décroché avec le style honnêtement, autant je me tenais à la page etc. Déjà d’une part, je bossais dans une salle de concert donc tous les soirs voila quoi. Quand je rentrais chez moi je n’avais pas envie d’écouter de la musique, et aussi parce que j’avais besoin de décrocher avec le metal. Ce groupe c’est un peu comme une thérapie pour moi, je me suis beaucoup investi dans le groupe donc je n’avais pas la nécessité de jouer avec d’autres gens.
Dans quelles conditions cet album a t-il été écrit ?
Ben : A partir du moment où on s’est dit qu’on reprenait, trois mois après, dès qu’on a recommencé à se voir, ça a été composé en deux mois et demi. On a composé treize titres, ceux qui sont sur l’album. On n‘a pas jeté de morceaux. C’est ce qu’on voulait. Au moment de la composition on s’est dit, il y a un côté à vif, impulsif, que l’on voulait garder. Il y a une espèce de truc très impulsif qu’on a bien aimé donc ça nous a influencé dans notre manière de faire. On se voyait une fois par semaine. On sortait avec une structure, on la gardait, parfois on arrondissait les angles mais le gros du truc était fait très rapidement. Voilà en tout cas pour la composition.
Pourquoi avoir fait le mixage aux Etats-Unis ?
Ben : On n’est pas allé aux Etats-Unis, ça s’est fait par transfert de fichiers. Pourquoi ? Parce que d’une part, c’est quelque chose qu’on a jamais fait avec le groupe. C’était une envie particulière. Autant, on a vraiment exploré jusqu’au bout l’auto-production, on était très impliqué dans tout ce qu’on faisait. On avait un regard sur tout, on donnait notre avis sur tout. Sur les deux derniers albums, on a tout fait nous-mêmes, des prises de sons en passant par les mix. Avec du recul, on n’est pas satisfait du résultat clairement, et là, il y avait cette envie de marquer le coup. Les sons américains, c’est ce qu’on a écouté quand on était gamins. Le mec on aime bien son taff, donc c’était assez évident pour nous de bosser avec lui. Ça s’est bien passé, pour le coup on est vraiment satisfait du son, c’est très professionnel. Il a vraiment bien bossé. D’un côté, c’est bien aussi de se laisser driver, de faire confiance à des gens qui bossent pour toi.
En 2016, quels sont les sujets d’inspiration ou de revendication de l’Esprit Du Clan ?
Ben : C’est assez récurrent finalement, c’est surtout la forme qui change. La revendication du groupe est la même : c’est cette espèce de constat de cette banalisation de plus en plus flagrante de la violence, de l’individualisme, des inégalités, des tas de sujets récurrents au groupe. Le vrai truc était dans la forme, c’est beaucoup plus métaphorique, c’est abstrait : il faut creuser un peu plus loin pour comprendre de quoi ça traite. En même temps, c’est aussi propre à chacun de se faire une idée sur le truc. C’est aussi la maturité qui fait ça. Voilà, on n’a pas envie de faire la même chose à chaque fois non plus.
On a vraiment eu un coup de coeur sur la chanson “L’Art Est Grand”. Est-ce que tu as un autre titre à défendre ? Et pourquoi ?
Ben : Je les aime tous si tu veux mais moi personnellement, on a forcément des affects avec l’un ou l’autre, mais c’est “Rat Des Villes” que j’aime beaucoup parce qu’il y a toujours une petite empreinte de ce qu’on faisait déjà avant, dans les tempos, dans les harmonies. Il y a un truc qui me fait penser à ce qu’on faisait avant donc c’est le bon palier entre ce qu’on faisait avant et ce qu’on fait maintenant. Après il y a d’autres titres que j’aime bien comme “Zénon”, “Des Volcans”, qui sont des titres un peu plus harmonisés si je peux dire ça. Mais “Rat Des Villes” je pense que c’est ce qui ressort vraiment.
Quel est le contexte actuel de la scène metal française selon toi ?
Ben : Pour le moment, on n’a pas fait encore énormément de dates donc je ne sais pas trop. Pour le moment, je ne vois pas vraiment de changement. En ce qui concerne l’écoute, en ce moment j’écoute des anciens trucs.
Comme quoi ?
Ben : Mes classiques : Pantera, Down, les premiers Sepultura, Metallica les premiers albums. En plus, j’ai l’impression qu’en ce moment on est dans une espèce de nostalgie. C’est peut-être aussi parce qu’on s’est noyé au bout d’un moment : il y avait beaucoup, beaucoup de propositions, donc on été gavé. Mais j’écoute aussi des trucs un peu plus récents. Mais j’ai envie de m’y remettre et voir un peu ce qu’il se fait maintenant.
Quand on fait une pause de quatre ans, est-ce qu’il n’y a pas une petite crainte de ne pas retrouver son public ?
Ben : Je ne sais pas, je pense qu’on a la chance d’avoir un public fidèle rien que par le fait de chanter en français. Il y a un public, comme ça, qui soutient vraiment le metal francophone, donc on a cette chance-là. Après des fans, tu en perds à chaque fois et tu en gagnes d’autres, on ne peut pas plaire à tout le monde. Après honnêtement, il y a plus une envie de reconquérir, peut-être des gens qu’on a déçu par le passé avec cet album, que d’en perdre.
Vous êtes des figures de la scène metal française, quels conseils pouvez-vous donner aux jeunes groupes qui débutent ?
Ben : On le dit à chaque fois dans les textes, il faut persévérer, vraiment, il ne faut rien lâcher. Déjà, quand tu as un rêve et que tu t’acharnes, que tu arrives à te satisfaire de ce que tu fais, de la plus petite échelle à la plus grande, je trouve ça déjà beau. Déjà, d’avoir un projet, d’avoir un rêve, et de se donner du mal pour y arriver, si en plus après tu arrives à avoir assez de recul et de maturité pour t’en contenter sans vouloir plus je trouve ça noble. Donc je pense que c’est vraiment la persévérance et la détermination. Je pense que le travail ça paye tout le temps. Si tu y crois et que tu es en phase avec toi-même normalement tu vas faire quelque chose. Sinon ça veut dire que tu n’es pas sincère ou qu’il y a un truc qui ne va pas. En plus, avec les réseaux sociaux qui se développent, tout le monde peut avoir sa tribune et diffuser ce qu’il veut, c’est super pour les groupes. Donc plus besoin d’attendre qu’un truc tombe du ciel, ça tient qu’à toi de diffuser et surtout d’y croire.
Vous êtes en concert le 21 mai à Paris, d’autres shows ou festivals à venir ?
Ben : Oui, on sera le 21 à La Flèche d’Or. Pour le moment, on n’a pas énormément de dates car on tourne sur des dates qui ont été bookées quand on a annoncé notre retour, sans proposer encore l’album. On espère bien, maintenant que l’album est sorti, avoir beaucoup plus de dates. A part La Flèche d’Or, on joue le 13 mai dans l’est de la France à Dommarien et on a un autre festival le 25 juin. Par les plannings de chacun, on a brodé avec ce qu’on pouvait faire mais à partir de septembre on espère bien avoir un réseau un peu plus fourni car on doit le défendre cet album. (rires)
Pour terminer, notre webzine s’appelle “RockUrLife” comme tu le sais. Question traditionnelle : qu’est-ce qui rock ta life ?
Ben : Qu’est-ce qui rock ma life ? Franchement, c’est con mais mon groupe ! Actuellement à part mon chat et mon groupe je ne vois pas. (rires) Oui mon groupe clairement, en plus c’est doublé par le fait qu’on a repris donc il n’y a pas de routine ! Je suis comme un gamin vraiment. (rires)
Site web : facebook.com/lespritduclan