2017, The Answer revient avec Solas, album des plus classiques de la part d’un groupe qui commence à se perdre. En 2018, Cormac Neeson (chant) s’envole enregistrer un disque de country à Nashville. The Answer disparaît des radars et ne réapparaît qu’en mars 2023 avec Sundowners, album qui signe le retour du groupe, mais aussi de l’inspiration. On en parle avec Paul Mahon (guitare) et Cormac.
Cormac, c’était comment d’enregistrer votre premier album solo ?
Cormac Neeson (chant) : Faire mon premier album solo a été très différent de ce que je pouvais imaginer, tout en restant une superbe expérience. J’imagine que j’étais très inspiré et sûr de moi par rapport à mon poste de chanteur dans The Answer. Inconsciemment je m’attendais à quelque chose de similaire, et… cela n’avait rien à voir ! (rires) Déjà, je n’avais pas la même charge de responsabilités. S’il y avait un problème, je n’avais personne d’autre à pointer du doigt ou confronter, il n’y avait que moi.
Et vous vous entendez bien avec vous-même ?
Cormac : Cela aurait pu être pire. J’avais l’impression d’avoir complètement changé de vie. Mais je crois que j’ai aimé la vivre. C’est assez étrange. (sourire) Travailler sur des chansons très différentes de ce que nous pouvions faire avec The Answer ? Je crois que nous en avions tous besoin de cette période, de ce temps donné pour accomplir autre chose.
C’était acté entre tous les membres du groupe ?
Paul Mahon (guitare) : Non, pas spécialement. Quand nous avons bouclé notre précédent album (ndlr : Solas (2017)) et la tournée qui a suivie, nous n’avons jamais évoqué l’idée de faire une pause. C’est vraiment arrivé comme cela. Cormac parlait de besoin, et je crois qu’il a raison, mais c’était très inconscient. Je ne m’en suis rendu compte que lorsque nous nous sommes retrouvés en 2020 pour jammer.
Vous élevez la voix pour le dire. Vous aviez quand même une attente par rapport au fait de vous retrouver donc.
Paul : Pendant que Cormac était à Nashville pour bosser sur son album, j’ai plus été occupé avec ma famille. J’ai pris du temps pour moi. J’ai fait des choses, et d’autres, sans jamais vraiment me poser de questions. C’est très compliqué d’être objectif dans ces moments. On ne se rend pas compte de tout, surtout du positif. Et pourtant, il n’y a eu que de cela !
Cela s’entend sur l’album. Votre musique gagne une épaisseur, il y a une cohésion qui n’a jamais été aussi forte. Vous sonnez comme “un seul homme“, si on peut le permettre.
Paul : Nous avions été ensemble pendant si longtemps. Nous avons partagé tant de choses. C’était vraiment hyper bizarre d’envisager de faire cette pause, mais ses effets étaient bénéfiques. Puis, lorsque l’on se retrouve, j’ai la sensation que tout est plus acéré. Plus juste. Plus frais. Je ne voyais plus les choses de la même manière. Je suis devenu père entre temps, donc peut-être que j’ai gagné en sagesse par exemple ? (sourire)
Cormac : Je me souviens encore de ce que j’ai ressenti quand nous avons joué notre première répétition ensemble. Surtout les premières notes. C’était presque de la plénitude ! C’était début 2020, nous avons fait deux sessions, puis nous avons dû continuer via Zoom. Pour les raisons que vous connaissez.
Attendez, vous voulez dire que vous avez commencé à bosser dans la même pièce et vous avez continué sur Zoom ? Le résultat final ne le laisse pas présager.
Cormac : N’est-ce pas ?! (rires) L’album sonne vraiment comme un tout comme vous le disiez toute à l’heure. Pourtant, cela n’a vraiment pas été simple. Surtout les premières sessions en “visio“. Quelle horreur. Nous n’étions qu’aux balbutiements de ce qui allait devenir Sundowners. Il y avait encore une “coquille” à briser, et souvent, cela passe par le fait de jouer ensemble. Ici, le feeling n’était pas le même. C’était dur, vraiment.
Paul : On se balançait des idées, on les enregistrait, on se les envoyait, on recommençait.
Vous devez être des pros maintenant.
Paul : C’était dur de se dire qu’on enregistrait un disque de rock n’roll, du coup nous avons dû pas mal expérimenter. Nous avons surtout appris à être plus “précautionneux“. Ce n’est peut-être que mon avis, mais beaucoup de nos nouveaux titres auraient été plus “nature” si nous avions pu rester dans une salle de répétition pour faire du bruit.
Cormac : Tu dis vrai. Les sensations hyper étranges provoquées par ces sessions de composition “online” étaient contrebalancées par une forme de méticulosité que nous aurions peut-être abordée différemment. Je trouve que l’unité de The Answer transpire de chacune des compositions que nous avons sur cet album. C’est ce qui lui donne ce côté très brut et qui permet à une identité très semblable de s’exprimer.
Tout est contrebalancé par cette “force tranquille” que vous déployez. C’est très naturel. On a l’impression que vous avez tout enregistré en une fois.
Paul : Nous avons bâti un environnement de travail qui était propice à tout cela. Nous voulions que chaque titre mérite sa place, pas seulement grâce à ses qualités, mais aussi car il pouvait correspondre à l’ambiance que nous voulions pour Sundowners.
Cormac : Mais aussi, nous souhaitions garder que ce que nous pouvions reproduire en live de la meilleure des manières, et surtout sans que cela ne devienne une prise de tête. Nous voulions que ce soit du plaisir autant pour vous que pour nous.
Paul : J’ai même “calculé” exactement comment j’allais devoir tout organiser sur scène pour jouer ces nouveaux morceaux, comment j’allais gérer le son etc. Tout était facile, vraiment. C’était une bénédiction, surtout quand vous connaissez ce que cela peut représenter d’enregistrer un album. Lorsque vous arrivez au bout vous avez une sensation de plénitude, car cela y est, c’est fini. Il n’y a que sur un seul album où je n’ai pas eu cette sensation.
Lequel ?
Paul : New Horizon (2013). J’avais vraiment tiré sur la corde pour le faire. Je suis allé dans des terrains qui ne me convenaient peut-être pas, et je n’ai rien dit. J’ai serré les dents. C’était compliqué d’en retirer quoique ce soit en termes de satisfaction. C’était plus facile avec Sundowners vraiment.
Cela faisait longtemps que vous ne vous étiez pas retrouvés, cela a dû aider.
Paul : Je ne sais pas vraiment. Nous sommes plus âgés, plus expérimentés, peut-être plus sages aussi.
Cormac : En fait, avant notre pause, je crois que The Answer commençait à trop ressembler à un “travail“. Ce n’était plus totalement une “bénédiction” pour reprendre un terme prononcé plus tôt. Lorsque nous avons repris à jouer par contre, cela ressemblait de nouveau aux grandes vacances. (sourire) C’est ce à quoi ce métier doit ressembler, cette passion, c’est ce qu’elle doit provoquer. Sinon, il y a quelque chose qui ne va pas.
Paul : Oui, je crois que nous avions perdu ce sens du laisser-aller qu’on pouvait avoir sur nos premiers albums. Nous ne voulions plus avoir la pression de nous dire : “OK, il faut que cela sonne comme cela, OH et, surtout il nous faut un single de ce type.” C’était des raisonnements qui pouvaient exister.
Vous étiez donc à la recherche d’un état d’esprit perdu. Pourquoi ces pensées se sont-elles frayé un chemin vers vos esprits ?
Paul : Peut-être que nous nous mettions une pression par rapport à ce qui pouvait se faire au même moment. Je ne sais pas vraiment. Maintenant, je crois que nous nous sommes libérés de ce carcan. Nous réalisons ce que nous avons envie d’entendre, et c’est très bien comme cela.
Cormac : Nous nous sommes écoutés. Et surtout, je crois que nous avons appris à nous refaire confiance. Il faut savoir s’écouter lorsque l’on trouve qu’un titre est bon. Sundowners a été conçu comme un tout cohérent. Nous avons dû faire des sacrifices, et par là j’entends, laisser des chansons de côté.
Paul : C’est comme une équipe de foot. (rires) Vous avez votre onze, et parfois, il faut mettre de très bons joueurs sur le banc. L’important c’est la cohésion.
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