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WHILE SHE SLEEPS (23/02/24)

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À quelques jours de la sortie du nouvel album de While She Sleeps, RockUrLife a eu la chance d’échanger avec le guitariste Mat Welsh pour en savoir plus sur ce nouveau disque.

Comment te sens-tu à l’aube de sortir un nouvel album ? Tu connais les morceaux de SELF HELL par cœur, mais pour le public, c’est quelque chose de tout nouveau.

Mat Welsh (guitare) : Je pense que cette période est vraiment excitante parce que lorsque tu finis l’album, c’est tellement loin de la sortie que tu as juste l’impression d’avoir un secret à garder pendant des siècles. Ça devient cette chose que tu ne peux tout simplement pas partager. Maintenant que la sortie approche, je veux commencer à montrer des morceaux aux gens et je ne le fais pas. Au lieu de cela, je suis dans un processus presque scientifique. Tu choisis quel morceau tu veux partager avec les gens. Et à ce stade, le public a eu trois morceaux, une dynamique s’installe, les fans précommandent l’album, et cela devient un moment assez interactif. C’est vraiment ma partie préférée de tout le processus de sortie d’un nouvel album.

Vous avez sorti trois singles, très différents les uns des autres. Le groupe est connu pour son énergie punk, ses breakdowns et ses passages mélodiques. Mais là, vous repoussez encore plus loin les limites de votre univers sonore. Il y a plus de sons électroniques, de synthwave, de sons symphoniques. Comment équilibres-tu ces éléments pour maintenir un son cohérent ?

Mat : Je pense que nous avons toujours essayé d’entrer en studio avec un esprit très ouvert sur ce que nous allons faire. Nous ne discutons vraiment pas ou ne décidons pas de ce que nous allons faire avant d’aller en studio. C’est plutôt une question de se lancer et de voir simplement ce qui vient. On essaie de faire quelque chose de très personnel, et on voit ce qui en ressort parce que c’est la meilleure façon d’obtenir une véritable représentation de nous en tant que personnes. Nous essayons toujours de n’avoir absolument aucune limite sur ce que cela va être, sur quel instrument ou chose cela va être joué. Je garde toujours à l’esprit qu’il ne faut pas chercher à imiter personne d’autre ni chercher à sonner comme quelqu’un d’autre. Nous utilisons nos voix naturelles pour chanter, nous avons les mêmes guitares depuis toujours, et tant que l’on reste comme ça, ce que l’on peut faire musicalement est illimité.

Vocalement, le registre ne cesse de s’élargir. Du rap de “Leave Me Alone” à l’intensité de “Down”, c’est juste incroyable de voir l’étendue de ce que vous proposez.

Mat : Encore une fois, c’est juste parce que nous sommes ouverts à toutes les influences. J’écoute beaucoup de rap, et je pense que c’est probablement la musique qui m’influence le plus et me donne le plus envie d’écrire des paroles et de créer des timings intéressants. C’est la forme de poésie la plus active qui soit. C’est vraiment expressif et intéressant.

Au début de l’album avec “Leave Me Alone”, il y a ces voix rap qui sont très fluides puis un refrain très pop avant que tout explose. Tu arrives juste à mélanger le tout pour faire quelque chose qui vous ressemble.

Mat : C’est ça, oui, et j’espère que cela te garde en haleine. J’aime l’idée que tu puisses dire, je pense savoir ce qui va arriver et puis ce qui arrive ensuite n’est pas ce à quoi tu t’attendais. Être surpris, c’est ce que je préfère quand j’écoute de la musique.


“Rainbows” arrive à juxtaposer des riffs de guitares assez sinistres tout en dégageant une énergie ultra vibrante. C’est déconcertant et plaisant à la fois.

Mat : J’aime cette description, c’est cool. Il faudra le garder pour la chronique de l’album. (rires)

© Enzo Iriarte


Plus tu avances dans l’album et plus les morceaux deviennent surprenants. Par exemple, le titre éponyme “Self Hell” dégage une forte nostalgie des années 90. Il y a du britrock et un refrain qui pourrait être du Limp Bizkit. Vous semblez avoir pris une approche hyper décomplexée pour créer ce morceau.

Mat : Je pense que cette chanson a vraiment cette influence des années 90. Le refrain a une sensation légèrement nostalgique de britpop anglaise, qui est la musique qui nous entourait quand nous grandissions. Ce genre de truc de Manchester, presque Kasabian, comme la britpop qui est enterrée là quelque part.

Le clip met encore plus en avant ces influences tout en créant une ambiance très 90 et joyeuse.

Mat : Nous avons vraiment essayé de nous amuser avec cette vidéo et d’essayer de ne pas nous prendre trop au sérieux. Le brief, c’était de faire une vidéo pop des années 90 mais à notre manière. Essentiellement, s’habiller comme dans les années 90, essayer des coiffures et se lâcher. Je crois que ça a vraiment marché. Quand les gens ont entendu la chanson et regardé la vidéo, je pense qu’ils ont été plus surpris par le titre que si nous avions été debout dans un entrepôt sombre en jouant le morceau. La vidéo est si colorée et si vibrante, tout le monde a cru que nous étions devenus un groupe pop. (rires)

On trouve que ce côté fun assumé, presque décomplexé met en avant le morceau et les paroles.

Mat : Oui, exactement et c’était vraiment notre but.


Mais les vidéos que tu fais en général, c’est tellement créatif, c’est tellement unique et original, comme ce que tu as fait pour “Down”. C’est quelque chose qui nous a vraiment époustouflés. La chanson est assez géniale, mais le clip est juste fou. Comment as-tu eu cette idée ?

Mat : J’ai une obsession massive avec l’art très physique. Dessiner des choses sur des objets physiques, puis prendre des photos d’elles. C’est un trait commun chez beaucoup de Sleeps. Nous aimons les choses physiques. Donc la couverture de Brainwashed, par exemple, c’est comme si nous avions peint un drapeau puis que nous ayons mis le drapeau quelque part. Pour SELF HELL, la couverture c’est une photo de quelque chose qui existe. Elle a sa propre vie et sa propre histoire. J’ai toujours aimé ces genres de techniques. Par contre je déteste des lyric vidéos qui semblent être créées artificiellement. C’est sans personnalité. Nous n’avions pas de budget pour la vidéo, principalement parce que SELF HELL est si flamboyant que nous avons dépensé tout notre argent. Je me suis demandé ce que nous pourrions faire avec peu d’argent mais qui aurait une vraie originalité. Je me suis dit : “faisons une lyric video mais faisons-la en photos pour qu’elle ait notre touche“. Je voulais qu’elle soit physique, que les paroles apparaissent sur un support physique mais je ne savais pas trop comment faire. Et puis, j’ai eu cette idée de faire comme photomaton lors d’une soirée.


J’ai acheté un objectif d’un appareil photo jetable. Je l’ai monté sur un appareil photo numérique pour garder ce sentiment d’un appareil photo jetable ou d’un photomaton. Je me suis lancé dans le projet et j’ai commencé à travailler sur la façon dont nous pourrions le faire en phase avec la musique. Concrètement, on commençait à filmer, on arrêtait et je courais pour peindre le mur derrière puis on continuait de prendre des photos et de peindre à chaque fois le derrière. Le montage final était vraiment fun, mais très compliqué. En fait c’est beaucoup de maths derrière tout ça. Il s’agit d’essayer de faire quelque chose sur lequel le spectateur passe un moment de plus et regarde pour se dire : “wow, comment avez-vous fait ça ?” Nous savons que tout est possible sur un ordinateur. Nous savons que l’on peut vous faire faire n’importe quoi à l’IA maintenant. Mais nous sommes allés si loin dans cette direction que je ne suis plus intéressé par la qualité des graphiques ou à quel point vous pouvez rendre quelque chose de faux. Je veux voir quelque chose de vraiment physique. Je veux voir l’opposé du spectre et voir ce qu’un humain peut faire avec une idée cool dans une petite boîte.

Quand on regarde cette vidéo, parfois on oublie que ce ne sont que des photos. Le mouvement devient tellement fluide. Certains passages donnent envie de faire pause pour lire ou regarder les détails. C’est vraiment bien fait.

Mat : J’essaie d’en faire un livre pour que vous puissiez physiquement jouer la chanson et obtenir le même résultat visuel. Ce serait une sorte de vidéo physique qui serait une chose assez cool à posséder. Ce serait tellement cool.


Mais ensuite, vous avez fait une autre vidéo qui est juste très, très émotionnelle et c’est juste si différent et si radical. Elle est là pour sublimer un morceau qui trouve une vraie profondeur. Tu peux nous en dire un peu plus ?

Mat : Ce morceau a été créé de manière très naturelle en studio. Nous avons toujours aimé ce côté mélodique, et il y a toujours eu un peu de cela dans nos albums. Nous écoutons beaucoup de musique comme ça. Nous aimons aller dans ces grands voyages mélodiques un peu plus émotionnels qui sont un peu plus épiques. Le morceau s’est produit très naturellement, nous avons eu un très beau sentiment à chaque fois que nous y travaillions en studio. Cela se sentait vraiment, c’était épique et puissant. Nous avons choisi de sortir cette chanson parce que tout le monde à qui nous l’avions montrée avait ressenti quelque chose de tellement fort qu’il paraissait inévitable d’en faire un single.

Quand on écoute “Self Hell”, puis “Down”, puis “To The Flowers” il est impossible de savoir où va aller cet album.

Mat : C’est exactement ça. Vont-ils devenir plus doux ? Vont-ils devenir plus lourds ? Quelle est l’ambiance ? Nous voulions vraiment laisser cette porte ouverte. Je ne veux pas dire à tout le monde exactement ce que c’est. Je veux que vous écoutiez l’album et que vous le découvriez par vous-même. Et donc cette chanson semblait importante à sortir à cause de la façon dont nous nous sentions à chaque fois que nous l’écoutions. Et puis la vidéo, je voulais juste faire quelque chose que nous n’avions pas encore fait dans ce processus de sortie. Allons à l’opposé du spectre de là où nous étions avec “Down” et là où nous étions avec “Self Hell”. Je m’ennuie de voir le groupe dans une vidéo en train de jouer. C’est ce que tu veux voir en concert, mais pas dans un clip. Parfois une vidéo qui capture du live peut être géniale, mais là je voulais aller vers quelque chose de plus créatif. Aaron, le bassiste du groupe, fait des films comme passe-temps. C’est devenu une autre profession à côté. Je me disais qu’il fallait utiliser cette compétence. Se servir de la puissance du morceau pour raconter une histoire émouvante. Cette réflexion a ouvert une nouvelle porte. Nous nous sommes transformés en équipe de tournage et nous avons fait comme si c’était notre nouveau job pour le mois qui suivait. Nous avons fait ce court métrage en essayant de peindre une image qui est le reflet de la chanson.

C’est un vrai défi de montrer des évènements qui soient réalistes, tragiques et émouvants en quatre minutes. Il faut arriver à parler d’amour, de deuil et de douleur sans avoir de temps pour construire les personnages ou avoir des temps de dialogues.

Mat : Oui, essayer de faire cela sans mots, sans paroles des acteurs et essayer de raconter une histoire en cette quantité de temps est très difficile, c’est sûr. C’était le vrai défi. Le tournage pour essayer de faire comme si on avait filmé l’histoire de la vie de quelqu’un nous a pris plus de deux semaines. Normalement, les groupes prennent une journée pour faire leur clip vidéo.


Mais While She Sleeps ne fait rien normalement. À partir du moment où vous avez décidé de vous financer avec les fans, de tout produire, de faire les clips. D’ailleurs comment maintiens-tu une bonne relation au sein du groupe avec cette quantité de pression et cette quantité de travail ?

Mat : C’est une courbe d’apprentissage constante, je pense. Je navigue encore sur comment être des deux côtés, être musicien et être impliqué dans le jeu, l’écriture et en plus du côté créatif être impliqué avec le côté commercial. Comment cela se passe-t-il ? Comment payons-nous le loyer ? Comment y arrivons-nous ? Toute la logistique et ces genres de choses. Je suis dans un état d’esprit où je me dis que si je m’implique autant dans un projet, j’ai envie d’être associé à toutes les décisions et je veux en avoir le contrôle. Je n’aime pas l’idée que j’ai dédié la majorité de ma vie à un projet et que d’autres personnes pourraient s’en occuper à ma place. J’ai aussi envie de montrer à une génération d’artiste que c’est possible de réussir de cette manière. J’espère que ça encouragera d’autres artistes à devenir plus indépendants. Quand nous étions enfants, nous pensions que tout était question d’être signé sur un label et d’avoir un management et puis c’était tout. Ils feraient tout le travail et nous serions juste le groupe. Mais en fait c’est l’inverse qui est intéressante. C’est de tout faire en interne et de changer le modèle. Beaucoup d’équilibre à essayer de naviguer ces choses, mais nous y arrivons.

En parlant d’équilibre, comment penses-tu qu’un morceau comme “No Feeling Is Final” s’intègre dans la structure globale et le thème de l’album ?

Mat : Nous avons travaillé avec un artiste appelé Aether qui est un artiste canadien. Nous écoutons beaucoup de musique de ce genre. La musique que j’écoute le plus c’est de l’ambiance et du lo-fi et des morceaux de musique assez relaxants, longs et lents. Quand tu as un album de quarante-cinq minutes tu ne peux pas avoir que des titres où tu cries, où tu joues vites, etc. Ça devient vite trop. Il faut des morceaux qui agissent comme des “nettoyeurs de palais“. Je ne sais pas ce que cela serait en France. Comme une pause entre les plats de votre repas pour être sûr de bien goûter le suivant. Il faut prendre une seconde et réinitialiser un peu. Sinon, je pense parfois qu’avec la musique heavy, si tu essayes d’écouter un disque entier et que la dynamique est toujours à 100 %, alors cela commence à se brouiller en sonnant assez similaire. J’aime essayer de tout calmer et de changer les dynamiques pour ne pas avoir ce sentiment.

© Enzo Iriarte


Vous faites tout par vous-mêmes, mais vous osez collaborer avec d’autres personnes, d’autres artistes, ce qui n’est pas quelque chose que tout le monde est prêt à faire. Parfois on peut avoir l’impression de perdre son identité lorsque l’on travaille avec quelqu’un d’autre. C’est une habitude chez vous de faire des feat, mais comment avez-vous choisi ceux-ci pour cet album ?

Mat : Je pense que nous aimons faire cela maintenant et nous commençons à essayer d’être moins possessifs sur les morceaux. L’idée de collaborer est moins effrayante pour nous car nous sommes plus en confiance que ce qu’est Sleeps. Nous essayons de faire les choses d’une manière différente et le groupe est assez indépendant. Il est important que nous collaborions pour que ce ne soit pas juste nous. Il ne faudrait pas non plus tourner en rond. Nous avons commencé à faire tourner les idées et certains passages nous ont fait penser à d’autres artistes. Comme Alex sur “Down”. C’est juste une collaboration parce que nous nous connaissons depuis toujours et il vit juste à côté de nous. C’était le moment de faire jouer la communauté. Aether est un artiste avec qui nous parlons depuis des années et nous aimons ses trucs solo. Il est incroyable, je l’écoute tout le temps juste à la maison et au bureau. Et puis Fin, qui est sur “Dopesick”, j’ai juste aimé le son de ce groupe. Et si vous écoutez leur groupe, ils sont la nostalgie ultime. Ils sonnent comme Manchester dans les années 90. C’est ce mélange d’Ian Brown et de Kasabian, Oasis, The Stone Roses, toute la britpop. Je l’ai juste contacté sur Instagram et il m’a répondu qu’il adorerait venir faire un morceau. Et puis il est venu à l’entrepôt quelques semaines plus tard et nous avons passé toute la journée avec lui à essayer différentes idées sur la chanson. Nous savons maintenant que Sleeps sonne comme Sleeps. Et bien que nous nous sentions très capables de faire n’importe quoi, nous savons aussi de quoi nous sommes physiquement capables avec nos propres voix et avec nos propres capacités musicales. Donc c’est juste agréable d’avoir quelqu’un d’autre qui vient et met un peu de sa patte dessus.

Est-ce que tu peux nous en dire plus sur la “enemy mentality” dont tu parles dans la chanson ?

Mat : C’est une bonne question parce que ce sont mes paroles. Je regarde les gens commencer leurs relations avec des gens qu’ils ne connaissent pas et penser que l’autre personne est là pour les détruire. Donc au lieu de moi et toi qui parlons normalement et intéressés par cette interview, c’est comme si je me mettais à penser que tu voulais obtenir quelque chose de moi ou que tu veux gagner quelque chose pour ton propre gain personnel ou penser que tout le monde est là pour t’avoir. Je vois les gens commencer des relations avec d’autres personnes comme ça. Et je pense juste que c’est une manière tellement malsaine de se comporter. C’est regarder le reste du monde comme s’il était l’ennemi alors cela ne mène nulle part. Je vois tellement de gens avoir peur de poser une question à un étranger ou qui ne veulent pas demander quelque chose parce qu’ils pensent qu’ils vont avoir l’air stupides ou qu’ils pensent que l’autre personne est dangereuse. C’est un peu l’idée que tu te dis que tu ne peux pas sortir de la maison parce que dehors tout le monde te veut du mal. Tu finis par ne plus vivre. Ce morceau essaie de forcer les gens à se poser d’autres questions et à changer de mentalité.

Dernière question : notre média s’appelle RockUrLife, donc qu’est-ce qui rock ta life, Mat ?

Mat : Être avec ce groupe, faire de la musique, créer de nouveaux sons et jouer sur scène. C’est tout ça qui rock ma life !

© Enzo Iriarte


Site web : whileshesleeps.com

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Marion Dupont
Engagée dans la lutte contre le changement climatique le jour, passionnée de Rock et de Metal le soir !