La pluie de la nuit s’est un peu calmée, et ce dernier jour à Papillons De Nuit s’annonce sous de meilleurs hospices que prévus. Cela ne nous empêche toutefois pas de saluer l’excellent travail d’anticipation du festival qui a répandu des copeaux en prévision de la formation de zones boueuses. On salue d’ailleurs le professionnalisme de toute l’organisation du festival, ce qui n’est pas peu dire car il est en grande partie porté par un nombre impressionnant de bénévoles, toutes générations confondues, à l’image de ce public du dimanche, familial et hétérogène.
WE WOLF (Scène Erébia) – L’honneur d’ouvrir le festival revient, comme chaque année, au gagnant du tremplin, le groupe We Wolf pour cette édition 2016. Et quelle bonne surprise d’entendre un son aux influences new wave très présentes avec quelques touches plus pop ou plus électro ! La formation investit bien la scène, est en place et joue bien. Il est extrêmement agréable d’entendre ce genre de son, pas très mainstream, investir une scène de grand festival, qui plus est en tant que gagnant d’un tremplin. Ça ne bouleversera pas notre journée, mais on passe un moment très agréable. Merci pour la bonne surprise We Wolf !
LES INNOCENTS (Scène Thécia) – Dans la catégorie “coucou c’est nous que revoilà”, fil rouge de cette édition 2016 des Papillons De Nuit, on appelle maintenant Les Innocents. Les Simon And Garfunkel français présentent leurs nouveaux morceaux, à l’image des plus vieux, représentatifs de cette pop française aérienne et sucrée, faussement naïve. Leur concert, joli moment parfois un brin gentillet, trouve un écho dans une portion plus âgée de ce public composite tandis que les plus jeunes ne décollent pas du pied de la Scène Vulcain, en attendant Boulevard Des Airs. Bon, le concert des Innocents ne restera pas dans les annales, mais en dire du mal serait comme de donner un coup de pied à un chiot qui vient vous lécher les doigts. On a passé un bon moment et c’est déjà pas si mal !
BOULEVARD DES AIRS (Scène Vulcain) – Il y a des programmations qui sont complètement attendues, dans tous les sens du terme, et c’est le cas pour Boulevard Des Airs. La formation, nombreuse sur scène, joue avec conviction une chanson festive engagée sur coulis de beat électro. On accroche pas plus que ça mais le groupe répond parfaitement aux attentes des festivaliers et a au moins le mérite d’exister sur scène et d’aimer le live. Un plaisir manifestement communicatif.
OLIFAN (Scène Erébia) – Du côté de la petite scène Érébia, Papillons De Nuit nous propose une formation jeune public ou en tout cas une programmation familiale accessible aux plus jeunes. Au final, et malgré la bonne humeur joviale qui anime Olifan ça donne un juste milieu qui plait à tout le monde mais ne passionne personne. Un scénario trop “adulte” pour les plus jeunes sur des paroles trop enfantines pour les plus âgés. Le concert jeune public, créneau assailli par les musiques actuelles, n’est pas si simple qu’on aimerait le penser.
JOSEF SALVAT (Scène Thécia) – En revanche, le concert pour teenager, c’est facile pour Josef Salvat. Après sa reprise du “Diamonds” de Rihanna dont on a failli mourir d’overdose l’année passée, l’Australien revient en force avec le très consensuel titre bilingue “Une Autre Saison (Open Season)”. C’est simple, c’est une pop un peu fourre-tout même si la prestation scénique et musicale est plutôt honnête, mais c’est sans saveur.
LOUANE (Scène Vulcain) – Et ça n’est pas avec Louane qu’on va pouvoir se mettre quelque chose de gourmand-croquant sous la dent. La star des petits (ne parlons plus de concert jeune public, parlons de concert pour pré-ado, ça marche du tonnerre) est assez simple, souriante et discrète. Elle déroule son set à la perfection, de manière un peu figée et mécanique et encore une fois, il ne se passe pas grand chose (à part des gros plans vidéos sur des enfants échevelés avec les joues bien rouges, et ok, ça c’est rigolo).
DE STAAT (Scène Erébia) – On commence donc à tourner un peu en rond quand surgit hors de la nuit un cavalier au galop qui signe son nom de la pointe du micro d’un DS qui veut dire De Staat. C’est du rock (appelez ça stoner ou alternatif si vous voulez), ça joue fort (fort bien même), ça tape, c’est explosif, créatif. Les musiciens, au look improbable de dandys bavarois, enchaînent des morceaux qui sont systématiquement là où on ne les attendait pas, l’assemblée ne s’y trompe pas et la foule grossit devant la scène. On a du mal à les mettre dans une case, hormis celle de “on a (très beaucoup) aimé”.
SOVIET SUPREM (Scène Thécia) – Et puis pour continuer sur une bonne lancée, on a vu Soviet Suprem. Encore une fois, on partait en se disant “on ne pas aimer”, parce que la programmation d’électro festif barré vaguement hip hop à la sauce balkan pour festivalier rond comme une barrique, très peu pour nous. Mais voilà, le flow est intéressant, même si musicalement c’est un peu au ras des pâquerettes, et c’est drôle et corrosif, surtout. Au final, on apprécie plus les interventions entre deux morceaux et le jeu avec l’audience que les morceaux en eux mêmes. Mais on a bien rigolé.
MICHEL POLNAREFF (Scène Vulcain) – Michel Polnareff en revanche, ça ne nous a pas du tout fait rire. On n’a pas tout vu, et on n’a pas envie de tout voir puisque le monsieur se donne beaucoup de mal backstage pour ne pas être vu, loin de nous l’idée de le contrarier ! Mais quand même, l’avalanche de musiciens tous plus surdoués les uns que les autres, le grand renfort de technique son impeccable et lumière un peu kitsch, les costumes, les chorées. Rien ne suffit à masquer que Pépé Michel a dépassé les soixante-dix balais, et qu’il les porte sur lui. Et on est d’autant plus agacé que la performance est sans intérêt, hormis émotionnelle pour les fans, alors que la carrière de Michel Polnareff est loin de l’être. Sans parler de ce que peut coûter (en argent comme en efforts) le fait d’accueillir un artiste comme lui. Honnêtement, on n’est pas sûr que ce retour rende service à grand monde.
ALO WALA (Scène Erébia) – On préfère courir voir Alo Wala et son électro-ragga-world dansant. La musique, complètement hybride, ne ressemble à rien de ce qu’on peut entendre, elle est à la fois très riche, subtile et à la fois suffisamment basique pour que nos pieds se mettent à danser tous seuls. Et puis il est impossible de ne pas être impressionné par la classe intersidérale de cette rappeuse à la voix nasillarde atypique, au flow impeccable et au groove beyoncesque. On aurait volontiers dansé jusqu’au bout de la nuit mais cette année les Papillons De Nuit finissent relativement tôt… Alors on rentre.
Une édition étonnante qui nous aura parfois franchement ennuyé, et parfois complètement emballé. Parmi les come-back qu’on s’attendait à ne pas aimer, on aura finalement été agréablement surpris par Indochine et Louise Attaque, et on essaie d’oublier Michel Polnareff. Et surtout on retiendra Nach, Minuit, Bombay, Feu! Chatterton, Fat White Family, Jeanne Added, De Staat et Alo Wala, à découvrir, écouter, voir et revoir. On retiendra aussi qu’en trois jours, on a pu voir une trentaine de concerts, croiser des équipes bénévoles, salariées accueillantes et compétentes, manger des sandwichs mais aussi du risotto, des tripes et des bulots, marcher cent cinquante kilomètres (minimum), apprendre que le drapeau normand ne représente pas des lions mais des léopards. Et comme dirait César : “On est venu, on a vu, ça nous a plu” !