Quelques jours après la sortie française de son album “The Boy Who Died Wolf”, Highly Suspect a donné le coup d’envoi de sa toute première tournée européenne à Paris, dans une salle pleine à craquer.
Les Américains de Highly Suspect ont beau poser leurs valises à Paris pour la première fois, Les Etoiles affiche complet. S’ils ont bien casé guitares, batterie et merch dans leurs bagages, aucune trace de première partie. C’est après un DJ set que la grosse voix théâtrale d’un membre de son équipe annonce l’arrivée imminente du trio, devant une salle bouillonnante et surexcitée. Sur fond de hip hop, les jumeaux Rich et Ryan Meyer et Johnny Stevens, chaînes autour du cou et casquette estampillée MCID, le slogan du groupe, sur le crâne, grimpent sur la scène des Etoiles.
Comme un hommage à ses débuts de cover band dans les bars crasseux du Massachusetts, la formation entame son set par “Send Me An Angel”, une reprise de Real Life. Un début tout en douceur, vite chamboulé quand les musiciens enchaînent trois des morceaux les plus enragés de leur premier album, “Bath Salts”, “Lost” et “Bloodfeather”. Voix éraillée et riffs furieux s’emmêlent, il n’en faut pas plus pour que la salle parte au quart de tour, bondissant et chantant devant un groupe qui semble agréablement surpris d’une telle réactivité. Le déferlement d’énergie de la fosse n’a d’égal que celui du trio, Ryan Meyer frappant puissamment sur sa batterie dans la pénombre, son frère Rich martelant les cordes de sa basse et Johnny Stevens, contrôlant aussi bien sa guitare que la foule. Particulièrement expressif, le chanteur gronde et rugit, joue avec le public et s’offre des solos fougueux. Mais il cède aussi sa place à son bassiste, qui prend le micro sur “Round And Round”, morceau ne figurant sur aucun album des Américains. La “voix d’ange” de Rich (dixit le frontman) plus claire mais pas moins puissante, offre un contraste agréable alors que les membres s’essayent au blues sur une rythmique retenue, à grands renforts de solos de guitare imprévisibles.
Si la formation dégage une pure énergie punk, elle exploite aussi ses influences blues, s’offrant des jams tortueux et délicieux. Cela ressort particulièrement sur les derniers singles “Serotonia” et “My Name Is Human”, rallongé d’un solo captivant de plusieurs minutes, mais moins puissant que sur l’album car la voix du chanteur, si maîtrisée et envoûtante pendant la première partie du set, s’enroue et s’affaiblit. Johnny et Ryan s’éclipsent en coulisses, laissant Rich seul au micro pour l’émouvante “Winston”, une autre exclusivité live. Quand ses deux comparses reviennent, la voix du leader a retrouvé toute sa profondeur et c’est plus remonté que jamais que le trio attaque la bombe à retardement “Wolf”. L’ouragan final transforme l’émotion initiale du morceau en énergie explosive, décuplée quand la formation enchaîne avec le grinçant hymne anti-racisme et anti-homophobie “Viper Strike”, particulièrement agité. Si les pogos vont bon train, ce n’est rien comparé à ce que déclenche la fougueuse intro de “Claudeland”. Pressante, légère et excitée, la piste retourne Les Etoiles, dont l’exaltation atteint des sommets quand les trois Américains s’éclatent pour finir sur un jam blues ensorcelant, mettant successivement en lumière la force de Rich, la rapidité de Ryan et la dextérité de Johnny.
Sous des acclamations assourdissantes, le batteur se fait porter par la foule devant les mines hilares de ses bandmates, qui quittent la scène un grand sourire aux lèvres. Pendant près de dix minutes, les applaudissements ne s’atténuent pas et le chanteur a même du mal à placer un merci en français quand ils remontent sur scène. Après le grunge traînant de “Little One”, Highly Suspect électrise une dernière fois la salle en balançant l’incisif “Look Alive, Stay Alive”, aussi rapide qu’efficace. En pleine frénésie et s’attendant à entendre “Lydia”, le tube qui a fait exploser Highly Suspect, la foule se retrouve coupée dans son élan quand le groupe fait ses véritable adieux après 1h30 de concert. Malgré dix minutes d’ovation, HS ne remonte pas sur scène et ce sont les vigiles qui doivent déloger les gens, réclamant en vain un dernier morceau.
Après l’écoute de “The Boy Who Died Wolf“, on soupçonnait qu’Highly Suspect soit explosif en live mais le concert aux Étoiles a carrément dynamité nos attentes. Avec son énergie punk, son impertinence et sa dextérité, le trio fait preuve d’une démonstration de force et signe un premier passage parisien triomphant.