Malgré les intempéries, RockUrLife a pu se rendre à Nîmes pour assister à l’un des rendez-vous festivaliers incontournables pour les amateurs d’indie rock en France. Du 3 au 5 juin 2016, le This Is Not A Love Song (TINALS pour les flemmards) a réuni un bon condensé de ce qui se fait de mieux dans le genre dans un cadre idéal : du beau temps (on ne compte pas la petite pluie du samedi !), un site petit format et des sourires sur tous les visages.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, une petite présentation du TINALS s’impose. Organisé par la Scène de Musiques Actuelles de Nîmes, la Paloma, et l’association de programmation musicale locale Come On People, le festival en est à sa quatrième édition. Depuis le début, les organisateurs misent sur un événement où la convivialité et l’accessibilité priment. Résultat, au sein du site qui peut accueillir quelques milliers de personnes par jour, les festivaliers peuvent profiter des concerts tout en passant leur temps à se détendre dans des transats et des poufs géants, ou se montrer plus actifs aux divers ateliers mis en place pour l’occasion : mariages façon Las Vegas par un faux Elvis, multiples jeux de groupes, sérigraphie pour réaliser ses sacs et ses affiches du festival, atelier couture ou encore couronnes de fleurs. On s’amuse donc, et on mange bien grâce aux foodtrucks locaux, systématiquement pris d’assaut aux heures où les estomacs grondent. Mais surtout, on est là pour se faire plaisir à la vue et à l’écoute de nombreux groupes venus de tous les horizons du monde de la musique indépendante.
TY SEGALL AND THE MUGGERS (Scène Extérieure “Flamingo”) – Les portes sont ouvertes depuis 18h, mais la queue pour accéder au site est encore impressionnante, plus d’une heure plus tard. Si bien que beaucoup ratent la performance de l’un des premiers groupes des trois jours. C’est un habitué du TINALS qui lâche les premiers décibels sur la grande scène extérieure baptisée “Flamingo” en l’honneur de l’effigie du festival. Déjà présent lors des éditions précédentes, Ty Segall est cette fois accompagné de ses Muggers et ne joue d’aucun instrument. A ses côtés, les cinq musiciens interprètent la moitié de “Emotionnal Muggers”, dernier né de l’infatigable Américain, ainsi que des titres plus anciens qui ravissent les premiers rangs. Leur garage rock est efficace et annonce la couleur d’un week-end chargé en artistes de cette trempe.
DESTROYER (Grande Salle Paloma) – On tente d’enchaîner avec Car Seat Headrest, le projet prometteur du jeune américain Will Toledo. Mais victime de son succès et de la trop faible capacité du Club Paloma, impossible d’entrer dans la petite salle intérieure sans faire une queue qui coûterait de précieuses minutes pour profiter réellement du concert. Ni une ni deux, direction la grande salle, voisine du Club, pour se consoler avec Destroyer. Dan Bejar n’a pourtant rien à nous proposer de réjouissant, avec son air égaré et son chant traînant qui mêle Bowie et Reed. Mais c’est sans compter la troupe de musiciens qui l’accompagne : trompette aérienne, batterie dynamique, envolées de saxophone et guitares à l’appui donnent une ampleur particulière à la musique du Canadien. Le public profite pleinement des élégantes compositions issues des deux dernières sorties du groupe, les très réussis “Kaputt” et “Poison Season”. La superbe “Bay Of Pigs (Detail)” en particulier mettra tout le monde d’accord, marquant la fin de l’un des meilleurs concerts du week-end.
EXPLOSIONS IN THE SKY (Scène Extérieure “Flamingo”) – La suite du programme a lieu à l’extérieur, où de nombreux festivaliers se préparent à l’arrivée des Texans. L’un des groupes les plus influents de la scène post rock investit la Flamingo pour une heure de montagnes russes sonores. La setlist est construite sur une alternance de morceaux issus du dernier album sorti il y a quelques mois, “The Wilderness”, et de classiques comme la toujours impressionnante “The Birth And Death Of The Day” ou la nostalgique “Your Hand In Mine”. Comme à leur habitude, les cinq musiciens ne s’accordent pas de répit et un flot sonore constant enveloppe les spectateurs. La musique prend aux tripes tandis que la mise en scène vient rendre le voyage aussi visuel qu’auditif, avec des lights flamboyants aux moments les plus intenses et violacés lors des accalmies. Après un “The Only Moment We Were Alone” épique, la formation quitte la scène sous les applaudissements d’un public conquis.
YAK (Grande Salle Paloma) – Un bon gros hot-dog maison et on rentre à la Paloma pour assister à la performance de Yak. Les Anglais viennent tout juste de sortir leur premier album “Alas Salvation” qui n’est pas sans rappeler quelques grands noms du grunge. La recette attire, car la grande salle est pleine et il faut patienter un moment pour entrer. Une fois dedans, batteur et bassiste malmènent leurs instruments pendant que le chanteur guitariste surjoue un peu trop tôt son rôle de frontman à la fois survolté et désinvolte, en enchainant les bières et les slam parfois un peu longuement. Mais c’est bien ça qui marche et l’audience répond présente à chaque instant. Cela étant, les larsens à répétition auront finalement raison de nous, direction la Mosquito.
CHOCOLAT (Scène Extérieure “Mosquito”) – De l’autre côté du site, sur la plus petite scène extérieure, on assiste aux derniers titres des Montréalais de Chocolat. Leur rock aux accents psychédéliques se révèle peu original et linéaire mais on se surprend à taper du pied à certains moments.
FOALS (Scène Extérieure “Flamingo”) – Devant la Flamingo, la foule se fait plus compacte tandis que le moment où Foals doit faire son entrée sur scène approche. La batterie de Jack Bevan claque en amorçant les premières secondes de “Snake Oil” et c’est parti. Encore en tournée pour l’album “What Went Down” sorti en août dernier, les cinq musiciens font preuve d’une énergie qui semble inaltérable. La formation enchaîne ses gros succès comme “My Number” et ne fait pas l’impasse sur son très bon premier album avec des classiques, à l’image de “Red Socks Pugie”.
L’intenable Yannis Philippakis occupe à lui seul l’espace scénique et n’oublie pas la foule, qu’il vient rejoindre à plusieurs reprises, au risque de couper la liaison avec l’ampli voix. Qu’importe, le spectacle est là et le public s’en réjouit. Malheureusement seule composition de “Total Life Forever” jouée ce soir, “Spanish Sahara” rappellera à des spectateurs à peine remis de la furieuse “Providence” que la bande d’Oxford est aussi capable d’adoucir la donne d’une belle manière.
En définitive, le concert est sans réelle surprise mais il reste efficace, s’achevant notamment avec la traditionnelle “Two Step, Twice” pendant laquelle les Anglais donnent leur maximum.
BATTLES (Grande Salle Paloma) – Entre le post punk nerveux de Protomartyr et le math rock de Battles, rien ne va nous bercer à cette heure tardive. On préfère garder les yeux et les oreilles grands ouverts pendant le set de Battles, qui, comme on a pu le constater lors de leur dernier passage à Paris, est d’une remarquable maîtrise. Le show est véritablement lancé quand John Stanier prend place au milieu de ses fûts. C’est le début d’une performance hypnotisante qui va durer une bonne heure. Les trois musiciens, impressionnants de concentration, multiplient les rythmes et les sonorités alambiqués, étourdissant (positivement) une bonne partie de l’auditoire.
Avec cette première journée courte mais dense, on quitte la Paloma avec la forte impression que le week-end va être bon. Le rendez-vous est pris le lendemain pour s’en assurer !